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François Hollande en croisade contre les paradis fiscaux : les mesures annoncées peuvent-elles changer la donne ?
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On réorganise tout

Le président de la République souhaite notamment systématiser l'échange d'information entre pays et contraindre les banques françaises à rendre publique la liste de toutes leurs filiales y compris dans les paradis fiscaux.

Roger  Lenglet

Roger Lenglet

Roger Lenglet est un philosophe français et journaliste d'investigation. Il a écrit plusieurs livre sur les lobbies. En 2012, il publie avec Olivier Vilain Un pouvoir sous influence - Quand les think tanks confisquent la démocratie chez Armand-Colin. Il est également l'auteur de Lobbying et santé - Comment certains industriels font pression contre l'intérêt général (2009) et profession corrupteur - La France de la corruption, éditions Jean-Claude Gawsewitch (2007).

Son dernier livre est "24 heures sous influences - Comment on nous tue jour après jour" (François Bourin Editeur, avril 2013)

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Retrouvez le détail des mesures annoncées dans notre article :
François Hollande : de nouvelles mesures pour "assurer la transparence de la vie politique"

François Hollande a annoncé ce mercredi une série de mesure visant lutter contre la fraude fiscale et les paradis fiscaux. Seront-elles efficaces ?

  • "Les banques françaises devront rendre publique chaque année la liste de toutes leurs filiales partout dans le monde pays par pays et devront publier la nature de leurs activités."

Roger Lenglet : Ce point est très important, historique même pour notre république. Mais, comme le sait François Hollande, il ne faut pas s'arrêter aux banques françaises ayant des filiales dans les paradis fiscaux. Même si l'évasion fiscale est facilitée par le jeu de filiales françaises, les personnes fortunées peuvent se faire ouvrir un compte dans une banque n'ayant aucun lien avec les banques françaises. Beaucoup de banques étrangères sont présentes sur les places off shore où il est toujours possible de placer de l'argent ou d’en recevoir directement. Souvent, les entreprises "corruptrices" ouvrent des comptes dans des paradis fiscaux. La proposition du président de solliciter les autres Etats et de faire avancer les discussions internationales pour s'occuper de ces banques est fondamentale même si elle reste pour l’instant très floue.

Il faut absolument, en plus des corrompus, renforcer les sanctions aussi contre les corrupteurs. Pourtant, ce point n'est jamais abordé. Ainsi, une grande société qui corrompt un élu ou un haut fonctionnaire ne risque presque rien alors qu'elle devrait être sanctionnée, par exemple en lui interdisant de se représenter sur les marchés publics pendant un certain nombre d'années.

François Hollande ne pourra pas mener ce combat seul. Il devra passer par l'Europe et les instances internationales, en s’appuyant notamment sur les pays nordiques qui sont les plus en avance en matière de lutte contre la corruption et les paradis fiscaux. Ce sont eux qui tirent par le haut les autres pays.

  • "La France établira une liste des paradis fiscaux."

Cette liste, déjà largement connue, ne présentera d’intérêt que si des sanctions sont fixées en cas de non collaboration dans la lutte contre la fraude. Un point important est que lutte contre la fraude fiscale ne relève pas seulement des services de l'Etat mais qu’elle renforce les possibilités de mobilisation judiciaire des associations citoyennes et des collectivités locales. Autre point, la loi protégeant les lanceurs d’alerte qui dénoncent des malversations financières ne couvre que les salariés du privé, c’est anormal. Du coup, les fonctionnaires sont toujours soumis à la menace de représailles de leur hiérarchie et, in fine, des ministres.

En un mot, les agents de l'Etat ne sont pas protégés s'ils voient passer des cas de fraude fiscale ou de corruption, alors qu’ils sont souvent bien placés pour les observer. J’en connais qui ont été sanctionnés simplement parce qu’ils ont avertis leurs supérieurs. Il faut donc une loi qui protège les fonctionnaires "lanceurs d'alerte". Au lieu du système actuel qui les condamne au silence.

  • "Je veux avec d'autres pays européens, un échange automatique d'informations sur les revenus et le patrimoine des Français résidant à l'étranger."

Techniquement, la France est un pays puissant de même qu'elle peut s'allier à un ensemble d'autres pays qui souhaitent également lutter contre la fraude fiscale. Encore faut-il que la volonté politique du gouvernement soit réelle, c’est-à-dire opiniâtre et ambitieuse, au-delà de l’effet d'annonce.

Il faudra un travail de fond avec des accords internationaux. Il est possible de faire avancer les choses en ce domaine, même si cela semble énorme et a priori plus difficile encore que la protection de la planète. D’ailleurs, il est tout à fait certain que d’autres scandales surgiront en matière de fraude fiscale en France et dans les pays étrangers qui obligeront les politiques à avancer.

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