Retombées de l'affaire Cahuzac : le peuple français exprimera-t-il son ras-le-bol en boycottant les impôts ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Après le scandale Cahuzac, les Français ne devraient pas apprécier les mesures fiscales impopulaires à venir.
Après le scandale Cahuzac, les Français ne devraient pas apprécier les mesures fiscales impopulaires à venir.
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Onde de choc

S'il ne réagit pas rapidement après les scandales qui éclaboussent son gouvernement, François Hollande risque de retrouver le peuple dans la rue dès l’annonce des inévitables mesures économiques impopulaires à venir.

Fabio Rafael Fiallo

Fabio Rafael Fiallo

Fabio Rafael Fiallo est économiste et écrivain, ancien fonctionnaire à la CNUCED (Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement). Il est diplômé d’économie politique de l’université Johns Hopkins (Baltimore).  Son dernier ouvrage, Ternes Eclats - Dans les coulisses de la Genève internationale (L'Harmattan) présente une critique de la diplomatie multilatérale.

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Crise de la démocratie. Crise de régime. L’abîme entre le peuple et la classe politique prend des proportions abyssales. En moins d’un an à l’Elysée, François Hollande n’a fait que décevoir ceux qui l’ont élu. Et il y a de quoi.

Il avait promis de renégocier le pacte budgétaire adopté par l’Union Européenne du temps de son prédécesseur. Et pourtant, il le signe, tout en prétendant avoir réussi à y incorporer une annexe qui, en réalité, n’aura servi qu’à l’aider à sauver la face. Il avait promis de taxer à 75% les revenus dépassant le million d’euros. Or, de par son caractère confiscatoire et décourageant, cette taxe est devenue pour Hollande un boulet aussi lourd à traîner qu’elle avait été, pendant la campagne électorale, un aimant lui permettant de s’attirer des voix.

Puis, contraint de ne pas désespérer les marchés financiers, il avait promis de ramener le déficit public à 3% du PIB en 2013. Il s’est vu obligé d’admettre qu’il lui sera impossible de respecter une telle promesse dans les délais fixés. Hollande est pris dans la nasse de ses impossibles engagements électoraux. Rien d’étonnant que, après une petite année à la présidence de son pays, seul le dernier carré de ses sympathisants – autour de 30% des électeurs – continue à lui accorder sa confiance.

Et voilà que, pour couronner le tout, l’image d’ennemi des riches qu’il avait entretenue dès avant même la campagne électorale, et qui lui avait apporté bien des voix, vient à deux reprises d’être piétinée.

Premier coup dur à ce sujet : l’affaire Cahuzac. Qu’un membre clef du gouvernement français, le ministre du Budget, chargé de traquer les fraudeurs, soit lui-même un fraudeur, ne peut qu’éclabousser le président de la République qui avait décidé de le nommer. Car soit Hollande connaissait la véracité des accusations portées contre son ministre, et alors il aurait fait preuve de laxisme ; soit il ignorait tout, et dans ce cas il aurait péché par incompétence.

Second coup dur : la presse vient de révéler que le trésorier de campagne de Hollande est actionnaire de deux sociétés offshore dans les îles Caïman, paradis fiscal par excellence. C’est du joli. Hollande arguera qu’il ne savait rien. Or, un candidat prétendument ennemi de la finance, qui aurait commis l’imprudence de confier les fonds de sa campagne à quelqu’un sans se soucier de connaître les agissements financiers de celui-ci, peut-il prétendre avoir la perspicacité nécessaire pour diriger un pays ?

Rien d’étonnant que les Français soient de plus en plus nombreux à lui avoir retiré leur confiance.

Dans un climat politique si délétère, avec quelle autorité morale François Hollande pourra-t-il demander aux Français les sacrifices qui s’imposent, aussi bien pour redresser les comptes de l’Etat, notamment ceux des retraites et de la sécurité sociale, que pour relancer l’économie du pays par le biais d’une libéralisation du marché du travail à la Schroeder ?

Aussi, pour prévenir l’ouragan social qui s’annonce, Hollande se doit-il d’agir. Or, quelles sont ses options ? Pas formidables, à dire vrai.

Procéder à un remaniement ministériel, changement de Premier Ministre y compris ? Cela ferait désordre à moins de douze mois du début de son quinquennat. Pis encore, cela donnerait l’impression que le gouvernement dans son ensemble a quelque chose à se reprocher concernant le scandale Cahuzac. Et même, un remaniement pour quoi faire ? Pour inclure des technocrates à la Mario Monti en Italie (par exemple Louis Gallois ou Pascal Lamy) ? Ce n’est pas sûr que de telles figures aient la poigne politique, l’ascendant moral et l’expertise politicienne pour faire accepter des réformes douloureuses auprès des Français.

Pourquoi pas, alors, un gouvernement d’union nationale, faisant entrer des représentants du centre et des secteurs de la droite ? Pagaille assurée. En effet, qui fixerait la politique à suivre et les réformes à mener ? Hollande ou la droite entrée au gouvernement ? Une telle solution ne tiendrait pas longtemps.

Quant à un référendum sur la moralisation de la vie publique, brandi par le secrétaire général du PS, une telle hypothèse pourrait bien devenir un plébiscite anti-Hollande se manifestant par une forte abstention.

La seule issue à la hauteur de l’actuelle crise politique et morale consisterait à consulter à nouveau le peuple. Ce qui veut dire dissoudre l’Assemblée nationale, avec une possible cohabitation à l’horizon. Mais on voit mal Hollande, à une année à peine de son quinquennat, vouloir répéter l’expérience d’une cohabitation longue comme celle subie malencontreusement par Jacques Chirac.

Hollande préférera plutôt faire le dos rond en attendant que passe l’onde de choc – ce qui correspond à son image d’indécis. Mais dans ce cas, dès l’annonce des inévitables mesures économiques impopulaires à venir, Hollande risque de retrouver le peuple dans la rue et de provoquer une insurrection civique qui pourrait prendre la forme d’un boycott des impôts par des citoyens exaspérés.

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