Non, le salaire minimum ne protège pas du chômage les plus défavorisés : la preuve<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Non, le salaire minimum ne protège pas du chômage les plus défavorisés : la preuve
©Reuters

Fausse bonne idée

Si l'on combine un salaire minimum trop élevé avec des subventions étatiques payées à ceux qui ne travaillent pas, du style RSA, alors le résultat est certain : le chômage augmente. Et ce sont les moins compétents et les moins bien formés qui trinquent les premiers.

Charles Gave

Charles Gave

Charles Gave est président de l'Institut des Libertés, un think tank libéral. Il est économiste et financier. Son ouvrage L’Etat est mort, vive l’état  (éditions François Bourin, 2009) prévoyait la chute de la Grèce et de l’Espagne. Il est le fondateur et président de Gavekal Research et de Gavekal Securities, et membre du conseil d’administration de Scor.

 

 

Voir la bio »

Les économies de la plupart de grands pays sont dirigées aujourd’hui par des gens dont la conviction profonde est qu’ils savent comment "améliorer" le fonctionnement "anarchique" des marchés.

La tradition historique d’intervention dans les systèmes économiques est longue et glorieuse, depuis les édits de Dioclétien en 301 pour bloquer les prix, qui conduisirent à la fois à une explosion à la hausse des prix et à une pénurie totale de nourriture, en passant par le colbertisme en France, en continuant par les "édits du maximum" de la Convention en 1793 (même résultat que pour Dioclétien) ou le Blocus continental de Napoléon qui garantit la maitrise du commerce internationale à la Grande Bretagne pour un siècle, en  passant par l’annulation des traités de libre-échange entre la Grande-Bretagne et la France signés par Napoléon III par la Troisième République (Méline) et en terminant par toutes les politiques de stimulation Keynésienne qui partout ont toujours échoué.

En général, les Etats essaient de manipuler les taux d’intérêts, les taux de change, de bloquer certains prix, ou de fixer certains autres prix à un niveau qui n’a rien à voir avec celui qui permettrait au système d’être en équilibre, le but étant toujours le même : avoir à la fois de la farine chère et du pain bon marché.

Dans cette dernière catégorie, la fixation d’un "salaire minimum" a une longue et prestigieuse  histoire.

Si le salaire minimum est fixé trop haut, les moins compétents et/ou les moins bien formés, c’est-à-dire souvent les plus défavorisés, ne peuvent trouver un travail puisque leur "coût" pour les entreprises est supérieur à leur rentabilité.

Si l’on combine un salaire minimum trop élevé avec des subventions étatiques payées à ceux qui ne travaillent pas, du style RSA, alors le résultat est certain : le chômage augmente et l’on voit apparaitre une espèce de "lumpen prolétariat" qui perd toute chance de jamais intégrer le monde du travail… En Grande-Bretagne aujourd’hui, un enfant sur quatre est élevé dans une famille ou PERSONNE n’a jamais travaillé… Ce sous-prolétariat pèse très rapidement d’un énorme poids sur le budget des Etats et rend le retour à une meilleure situation des comptes publics quasiment impossible.

Comme le disait Milton Friedman fort justement : "si on paye les gens à ne rien faire et si on monte les impôts sur ceux qui travaillent, il ne faut pas s’étonner si le chômage se met à monter".

Nos amis Keynésiens, à  ce moment du raisonnement, nous expliquent que la hausse du coût du travail va "stimuler la consommation" et permettre une reprise de la croissance, plombée par les excès d’épargne.

Diagnostiquer un excès d’épargne dans un pays qui a des déficits des comptes publics et des comptes extérieurs relève de l’exploit, mais nos amis ne sont jamais vraiment intéressés par les chiffres et les réalités mais beaucoup plus par leur dogme.

Dans l’esprit qui est celui de l’IDL, j’ai pensé qu’il était utile de vérifier s’il existait une relation entre salaire minimum et taux de chômage dans les populations "défavorisées".

Pour arriver a un résultat , j’ai choisi l’exemple des Etats-Unis, non pas que j’ai une quelconque préférence intellectuelle pour ce pays, mais simplement parce que les statistiques y sont disponibles (merci au passage pour les récentes lois française ne le permettant plus). Comme exemple de populations défavorisées, j’ai choisi la population noire et la population latino-américaine.

Encore une fois, il n’y a la AUCUN jugement de valeur, et je ne fais que reprendre des statistiques disponibles aux Etats-Unis sur les catégories les plus défavorisées. J’aimerais simplement pouvoir faire les mêmes calculs sur la France, mais publier de telles informations en France sur l’origine ethnique des chômeurs est interdit par la loi, ce qui constitue bien sur une entrave à la liberté d’information. Mais ceci est un autre débat…

Voici les résultats pur les Etats-Unis :


La ligne noire, échelle de droite, représente le salaire minimum en termes réels, base 100 en 1990.

La ligne rouge, échelle de gauche, donne le taux de chômage en pourcentage de la population active des latino-américains, tandis que la ligne en pointillés, échelle de gauche encore, donne le même taux de chômage, mais cette fois-ci pour les citoyens d’origine afro-américaine.

Les hachurages gris de haut en bas du graphique indiquent les périodes de récessions.

Il semble bien que toutes les périodes de hausse du salaire minimum soient suivies assez rapidement par des fortes hausses du taux de chômage des populations les plus vulnérables, le seul cas discutable étant 1997 : les Etats-Unis étaient à ce moment là en plein boom économique lié à l’émergence de la bulle Internet.

Les hausses du salaire minimum décidées par l’administration Obama semblent bien avoir déclenché un vrai cataclysme pour les populations défavorisées aux Etats-Unis, mais qu’importe à nos Oints du Seigneur. Ce qui compte c’est la pureté des intentions et non pas les résultats..

Il semble donc bien que le salaire minimum fasse partie de ces fausses bonnes idées comme le partage du temps de travail, le blocage des loyers ou le protectionnisme.

Car, après tout, il y a un certain nombre de pays en Europe où le salaire minimum n’existe pas et où le chômage est à bas niveau depuis très longtemps, tels la Suède ou l’Allemagne, mais bien sûr chacun sait que dans ces deux pays, les jeunes des catégories défavorisées et les femmes seules ayant la charge d’enfants couchent sous les ponts et meurent de faim dans la rue, tandis que leurs petites filles vendent des allumettes en grelotant sous la neige qui tombe.

A ce point du raisonnement, le lecteur doit se demander : mais pourquoi donc nos élites suivent-elles une politique dont ils savent qu’elle ne marche pas ?

La seule explication est la suivante : nos élites sont élues par une classe sociale (les bobos) qui veut se sentir généreuse et compatissante et qui en général travaillent dans la fonction publique. L’idée ne leur viendrait pas de créer une entreprise et d’embaucher des gens puisque, bien sûr, ce serait entériner l’exploitation de l’homme par l’homme qu’est le capitalisme. Il est beaucoup plus simple de voter pour l’un des siens qui sera chargé de corriger cette exploitation par la réglementation, la taxation et la fixation arbitraire des prix du travail.

Et le fait que rien de tout cela ne marche ne doit pas interférer avec le but numéro un : que EUX se sentent bien. Et bien sûr, plus leurs actions amènent à des désastres, plus les classes défavorisées vont voter pour eux. Mais cela n’a rien à voir avec leurs décisions. Penser le contraire serait leur faire injure.

Article préalablement publié sur le site de Charles Gave, l'Institut des Libertés.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !