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Entendra-t-on moins d’intervenants radicaux lors du Congrès de l’UOIF cette année ?
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Angoisses ?

Malgré la volonté d’apaisement affichée par les organisateurs du congrès annuel de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), des orateurs controversés seront présents ce weekend au Bourget. Parmi eux, le cheikh saoudien Abdallah Basfar, interdit en 2012, Hani Ramadan, le frère pro-lapidation de Tariq, ou encore Hassan Iquioussen et Mohamed Al-Arifi, coutumiers de propos antisémites.

Haoues Seniguer

Haoues Seniguer

Haoues Seniguer est maître de conférences en science politique à l'Institut d'Études Politiques de Lyon (IEP)

Il est aussi chercheur au Triangle, UMR 5206, Action, Discours, Pensée politique et économique à Lyon et chercheur associé à l'Observatoire des Radicalismes et des Conflits Religieux en Afrique (ORCRA), Centre d'Études des Religions (CER), UFR des Civilisations,Religions, Arts et Communication (CRAC), Université Gaston-Berger, Saint-Louis du Sénégal.

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Atlantico : Le 30e congrès de l'UOIF se tient ce week-end. Qui sont ses principaux intervenants et quel message peut ressortir de cette réunion ?

Haoues Seniguer : Tout d'abord, il convient de rappeler que les congrès annuels sont, pour l'UOIF, l'occasion d'une démonstration physique et idéologique  de sa présence dans le champ islamique français, et, au-delà, européen. Le congrès annuel du Bourget est aussi conçu aux fins de montrer, aux yeux du grand public, que l'organisation islamique a un savoir-faire militant et une audience parmi les musulmans de notre pays. Pour ce qui est du profil des intervenants, il est grosso modo de quatre types : des doctrinaires ou religieux, généralement proches de l'idéologie des Frères musulmans, mais qui peuvent être parfois critiques à son endroit, des responsables chrétiens, des intellectuels organiques, et des universitaires, musulmans ou non, ouverts au débat pluriel, en particulier avec l'islam et ses fidèles. Enfin, il est difficile de préjuger du message qui pourra en sortir, mais je crois sincèrement que le climat  sera à l'apaisement, dans la mesure où l'UOIF ne veut certainement pas être de nouveau au cœur d'une polémique qui la desservirait inéluctablement. Puis, la présence de personnalités qu'on ne saurait soupçonner de cautionner quelconque forme de violence que ce soit, est une garantie morale supplémentaire à la bonne tenue de ce rassemblement. Il faut en tous les cas l'espérer. 

L'invité vedette sera Tariq Ramadan, comme quasiment chaque année. Il interviendra à lui seul pas moins de six fois (je crois que c'est un record pour une même personne dans l'histoire de ce rassemblement, cela reste à vérifier), sans compter sa présence dans les stands pour signer des ouvrages. C'est un échange de bons procédés entre l'UOIF et Tariq Ramadan, car la première sait qu'avec le second, le public francophone musulman sera plus nombreux à venir, ce qui est important du point de vue matériel et symbolique. Enfin, sévèrement critiqué, notamment sur les réseaux sociaux, par des musulmans de plus en plus nombreux à être remontés contre lui, soit pour ses positions conservatrices, soit pour sa proximité de plus en plus manifeste avec au moins une partie de l'appareil dirigeant qatari, soit pour les deux raisons à la fois, le prêcheur suisse a besoin du soutien de la base pour redorer le blason de sa crédibilité qui pourrait se tarir, l'UOIF lui offrant à cet égard une tribune de choix !

Le ministère de l'Intérieur s'est arrangé pour compromettre la venue d'imams jugés trop radicaux. Cette mesure peut-elle réellement empêcher la diffusion d'un discours extrémiste ?

Avec Internet et les différents supports de diffusion de messages radicaux au nom de l'islam, il est rationnellement impossible d'empêcher totalement "la diffusion d'un discours extrémiste". Cependant, soyons extrêmement précis : si l'UOIF entretient effectivement des relations avec des prêcheurs ou théologiens à qui il peut arriver de tenir des discours haineux et/ou ultra rigoristes, en revanche, force est de constater que les cadres de l'organisation ont toujours veillé à ce que les messages diffusés durant les congrès soient respectueux de la loi commune et des valeurs de la France. 

Quel est le poids de cet organisme auprès des musulmans vivant en France ?

Il est difficile d'évaluer en toute rigueur son poids réel, numériquement notamment, mais c'est sans conteste l'organisation islamique la mieux structurée et la plus influente en termes idéologiques. La théologie conservatrice de l'islam que l'UOIF contribue à promouvoir sur le terrain est généralement naturalisée par un bon nombre de concitoyens musulmans pour lesquels, à tort ou à raison, il ne fait pas l'ombre d'un doute que le foulard est une obligation canonique, que le port de la barbe est fortement recommandé, que l'investissement communautaire est vital pour la diffusion du message de l'islam, etc. 

Ce congrès a déjà été l'objet d'une surveillance accrue des services de police par le passé. Comment garantir une liberté de parole aux musulmans sans heurter les principes républicains ?

Je crois que l'UOIF ne doit faire l'objet, de la part des services de police, de sécurité et des autorités officielles, ni de plus ni de moins d'indulgence. L'organisation sait par ailleurs que ses activités sont étroitement surveillées depuis quelques années déjà et que toute parole publique qui recèlerait la moindre écume de haine serait immédiatement mise à l'index et potentiellement sanctionnée.

La parole et la liberté d'expression doivent être rigoureusement garanties et respectées pour et par toutes les composantes de notre société, musulmanes ou non, sauf en cas de manquement avéré aux règles de droit qui en fixent le cadre. 

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