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La réforme des rythmes scolaires à Paris fera-t-elle couler le navire Delanoë ?
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Tribune

Bertrand Delanoë veut faire appliquer la réforme des rythmes scolaires dès la rentrée prochaine. Le projet sera voté ce lundi au Conseil de Paris.

Jean-Baptiste Menguy

Jean-Baptiste Menguy

Jean-Baptiste Menguy est porte-parole du groupe UMP Paris et responsable des questions d'éducation, jeunesse et sports.

Il est l'auteur du livre Paris, un défi capitale également décliné en site internet : paris-defi-capitale.fr

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Tout commençait bien dans cette histoire. Le scénario était parfait. Candidat puis président élu, François Hollande annonçait la réforme des rythmes scolaires, aussitôt relayé par son bancal ministre de l’Education nationale en juin dernier.

Rien de plus facile alors pour Bertrand Delanoë, commandant de bord d’un navire qui normalement ne « mergitur » pas, d’anticiper et de préparer la mise à flots des nouveaux rythmes dans la Capitale avec les moyens municipaux et le concours du Rectorat. D’autant que Bruno Julliard, son adjoint à la culture et ancien syndicaliste étudiant était le conseiller spécial de Peillon pour la réforme et Colombe Brossel, son adjointe chargée des questions d’éducation présidait justement la table ronde sur les rythmes scolaires dans le cadre de la grande concertation nationale sur la refondation de l’école l’été dernier.

Le casting parfait, donc. Mais n’est pas Léonardo di Caprio qui veut…

En voulant faire une « Peillonade » (qui entrera dans le dictionnaire comme : « annonce unilatérale d’une réforme sans concertation et avant recadrage »), le Commandant Delanoë a créé les conditions d’une mutinerie digne des marins russes du cuirassé Potemkine, en annonçant en marge de ses vœux en janvier 2013 que cette réforme serait appliquée dès le mois de septembre prochain.

Et là, avis de gros temps. L’iceberg de la contestation arrive et ne détourne pas sa route.

Branle-bas de combat chez les syndicalistes enseignants qui se mettent à « faire la grève » à 90 % le 22 janvier dernier (du jamais vu d’ailleurs sous un gouvernement de droite) ; mécontentement des personnels de la Ville qui leur emboîtent le pas ; et ne parlons pas des enfants et des parents d’élèves, qui au final devront payer le renflouement du navire, voire l’affranchissement du courrier du Maire de Paris qu’ils ont reçu à leur domicile...

Quant à l’opposition, nous alertions le Maire dès le Conseil de Paris de juillet dernier et n’avons cessé, collectivement, dans tous les arrondissements et lors de chaque réunion sur le sujet, de mettre en garde le Maire de Paris sur les risques de naviguer à vue…

Car cette réforme à Paris n’est pas une mince affaire. Elle coûte au bas mot 20 millions d’euros par an, voire plus de 40 selon les dernières déclarations d’Anne Hidalgo (!), à la collectivité qui ne sera que peu aidée par l’Etat (à hauteur de 6,5 millions uniquement la première année). Et l’interrogation plane sur les moyens de financement. Delanoë annonçait d’ailleurs récemment que la CAF pouvait abonder de 10 millions d’euros par an et compléter ainsi l’apport de la Ville et de l’Etat, sauf que, en bon organisme paritaire, il faut l’accord des syndicats loin d’être acquis…

Elle implique aussi d’importants mouvements de personnels au sein des animateurs et la DRH parisienne a déjà annoncé nombre de titularisations, contractualisations et autres formations « par kit ou mallette » (sic). 

C’est sans compter aussi sur l’impact de l’école le mercredi matin qui privera beaucoup d’associations sportives et culturelles d’adhérents pour assurer leur activité. Et surtout les obligera à se reporter sur d’autres créneaux en semaine et déjà complètement saturés…

Sanction immédiate. Débordé de tous côtés, Delanoë concédait enfin quatre réunions publiques sur le sujet, où l’exécutif socialiste -Anne Hidalgo en tête- devait essuyer les embruns du mécontentement. Difficile évidemment de porter la voix du Maire de Paris qui s’est, disons-le, dérobé, et se faire entendre seule contre tous. N’est pas Céline Dion qui veut non plus…

Le Titanic des rythmes scolaires à Paris a déjà commencé à sombrer… et Bertrand Delanoë est seul. D’autant plus seul que la plupart des grandes villes ont déjà décalé à septembre 2014, qu’elles soient de droite ou de gauche.

Pourtant il avait le temps. Près de 18 mois, pour bien préparer les choses. En perdant ces 18 mois, le Maire de Paris et son équipe nous ont fait rater une occasion formidable de mettre la puissance humaine et financière du bateau Ville de Paris au service d’un projet éducatif large, juste et convaincant.

Nous aurions pu dresser un état des lieux des locaux scolaires, des équipements sportifs et culturels ; budgéter de nouvelles infrastructures comme des gymnases ou des conservatoires ; remettre à plat les relations sociales au sein du personnel de la Ville, des animateurs comme des Professeurs de la Ville de Paris plutôt que d’improviser des promesses tous azimuts et acheter une paix sociale bradée.

Nous aurions pu enfin lancer des expérimentations dans des arrondissements pour avoir le projet le plus proche des besoins et des attentes des petits Parisiens.

Bertrand Delanoë a voulu faire une transat en solitaire avec un paquebot. Mais ça ne se manœuvre pas aussi facilement.

Le 25 mars, le Maire de Paris soumettra son projet au vote des élus. En imposant grâce à des accords politiciens avec les Verts, l’application dès 2013, il annonce déjà la fin du film : nous fonçons, en avant toute, vers l’iceberg, car le commandant de bord a plus écouté les sirènes des ministères que les vigies en haut des mâts de son propre navire.

Fluctuat nec mergitur… On disait le Titanic insubmersible…

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