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Comment traiter les djihadistes français opérant à l'étranger ?
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Dilemme

Deux djihadistes français arrêtés au Mali ont été transférés cette semaine vers la France pour y être jugés. Alors que le terme de "djihadiste" ne correspond à rien juridiquement, ces hommes doivent-ils être jugés en fonction du droit commun ou de la convention de Genève ?

Jean-François Daguzan

Jean-François Daguzan

Jean-François Daguzan est directeur adjoint de la Fondation pour la Recherche StratégiqueIl a publié de nombreux livres traitant des questions de terrorisme, dont La fin de l'Etat-Nation : de Barcelone à Bagdad (CNRS Editions, 2015).

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Atlantico : Un djihadiste français a été extradé du Mali vendredi pour être jugé en France. Cette situation n'est-elle pas paradoxale sur le plan juridique ?

Jean François Daguzan : Dans ce cas particulier il n'y a pas d’ambiguïté ou de vide juridique, puisque la personne en question n'est pas un prisonnier de guerre. La question se serait posée autrement si ça avait été le cas, mais nous avons ici affaire à un terroriste, et le droit français compte bien traiter l'affaire comme telle. La Convention de Genève, qui définit justement ce que l'on peut considérer comme "un prisonnier de guerre", ne s'applique pas et c'est donc le Droit Pénal français qui prend le relais.

La France, à travers les voix du Président de la République et des ministres des Affaires étrangères et de la Défense, a déclaré qu'elle combattait des "terroristes" et non des soldats d'une armée souveraine, ce qui justifie cette différence de traitement. Nous sommes de plus dans une opération légale exécutée telle qu'elle a été définie par les Nations unies, et non dans un conflit inter-états. Bien que nous soyons dans une opération de type "militaire", les adversaires sont donc considérés comme terroristes et relevant du droit commun.

Cette affaire aurait aussi pu être jugée sur le sol malien. Pourquoi cela n'a pas été le cas ?

On aurait pu effectivement considérer que la personne en question soit jugée sur le sol malien. J'imagine que dans ce cas de figure, la convention d'extradition signée entre la France et le Mali dès 1962 a dû jouer assez rapidement, puisque le transfert est automatique si Paris en formule la demande. Ce choix relève somme toute de raisons proprement diplomatiques. 

N'y-a-t-il pas justement la volonté symbolique d'envoyer un message dissuasif en faisant traiter l'affaire sous le droit français ?

Le message existe et est resté le même depuis 2001 : la France a toujours voulu dénier toute forme de légitimité politique aux personnes qui s'engagent dans le terrorisme. Notre armée fait face à des criminels et rien que des criminels sur le plan juridique. On voit ici s'illustrer le souhait de rappeler que ces gens seront frappés quoiqu'il arrive par la législation française, et ce avec des peines aggravés ou des possibilités d'extension de gardes à vue. La condition de leur capture, même si elle se fait à l'extérieur du territoire, ne joue encore une fois en rien sur le statut du prisonnier. Cela peut aussi fonctionner pour des djihadistes n'ayant pas la nationalité française, à partir du moment où ils s'attaquent aux intérêts français. Il suffirait que le terroriste en question soit identifié comme l'auteur d'attentats sur le sol français ou sur des Français en personne pour qu'une demande d'extradition soit formulée légitimement par Paris. 

Quel(les) peine(s) risque d'encourir le prévenu ?

Cela dépendra des modalités de la justice française et de comment elle définira le crime ou le délit qui sera jugé. On peut rappeler cependant que dans le cadre d'une action terroriste les sentences prononcées seront forcément plus sévères en fonction du délit ou du crime choisi. Quoi qu'il arrive et quelque soit la nature de son arrestation, le "djihadiste" (terme qui ne correspond a rien juridiquement dans le droit hexagonal) sera bien traité comme un criminel du droit commun.

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