Euro 2012 : quand la Grèce affronte l'Allemagne dans un match légendaire<!-- --> | Atlantico.fr
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Alors que la crise gronde en Europe, la Grèce affronte l'Allemagne en quart de finale de l'Euro 2012.
Alors que la crise gronde en Europe, la Grèce affronte l'Allemagne en quart de finale de l'Euro 2012.
©Reuters

Bonnes feuilles

La situation économique et sociale de la Grèce est dramatique quand début l'Euro 2012 et les manifestants grecs ne cessent de s'en prendre à l'Allemagne. Chérif Ghemmour revient sur le quart de finale très attendu et redouté qui oppose les deux pays. Extrait de "Terrain miné : Quand la politique s'immisce dans le football" (1/2).

Chérif  Ghemmour

Chérif Ghemmour

Chérif Ghemmour est journaliste au magazine So Foot depuis sa création en 2003. Il a par ailleurs collaboré avec RMC (L’After Foot), Europe 1 et Eurosport (Lundi Foot ainsi que le blog « Tac au tacle » sur eurosport.fr). Depuis un an, il commente également les matchs du championnat des Pays-Bas sur Ma Chaîne Sport.

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Au moment où débute l’Euro 2012, le 8 juin, la situation économique et sociale de la Grèce est dramatique. Outre un taux de chômage de 22,6 %, l’organisation humanitaire Caritas Internationalis s’alarmait, en mars, de l’apparition de « nouvelles catégories de pauvres ». Auparavant, le journal médical britannique The Lancet avait rapporté une étude sur les ravages sociaux observés depuis le début de la crise : « Des tendances très inquiétantes : un doublement des cas de suicides, une hausse des homicides, une augmentation de 50 % des infections au virus HIV et des gens qui nous disent que leur santé a empiré mais qu’ils ne peuvent plus consulter de médecins même s’ils devraient le faire. » Le rapport évoque aussi le recours en augmentation à la prostitution pour parvenir à subsister. Le foot n’échappe évidemment pas au marasme, comme en témoigne, à la veille de l’Euro, dans L’Équipe, Giorgos Karagounis. À 34 ans, le capitaine de l’équipe de Grèce et héros de l’Euro 2004 est sous contrat avec le Panathinaïkós, qui ne le paye plus depuis le début de la saison : « Bien sûr que le joueur grec ressent la crise. Il ne sait pas si le championnat va continuer, s’il va trouver une équipe. Et ça, ça déstabilise… Il y a des joueurs qui ne sont pas payés depuis un an. Il y a moins de monde dans les stades parce que les gens ont plus de difficultés à s’acheter des places. Autour de toi, il y a tant de chômeurs, tant de personnes en dépression ou qui n’ont pas à manger. La tristesse est partout. » À tort ou à raison, l’Allemagne, principale créancière inflexible de la zone euro quand la Grèce en est sa plus grande débitrice, apparaît aux yeux du peuple hellène comme la responsable de tous ses malheurs. Les manifs anti-austérité sont sans équivoque : le 17 février 2012, à Athènes, des manifestants brûlent comme ils le font souvent des drapeaux nazis. Car l’inconscient collectif grec est aussi chargé du souvenir douloureux de l’occupation allemande durant la Seconde Guerre mondiale (avril 1941-octobre 1944)… Sans entrer dans les détails, le peuple grec fut l’un des peuples européens les plus martyrisés par les hordes hitlériennes, avec ceux de Pologne et de Russie.

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Tout concourt donc à clouer au pilori la pauvre Angela dont la Grèce a fait son punching-ball. Sitôt la qualif acquise et le quart contre l’Allemagne fixé au vendredi 22 juin, à Gdansk, les médias grecs se déchaînent. « Donnez-nous Merkel ! », fanfaronne le site Goal News, qui joue aussi sur le double sens du mot « Euro » (la compète de foot et la monnaie unique continentales) : « Vous ne pourrez jamais bouter la Grèce hors de la zone euro ! ».

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Place au foot, désormais ! Le rapport de forces est inégal : l’Allemagne, 3e au classement Fifa, est favorite du tournoi avec l’Espagne. La Grèce, 15e Fifa, n’a que son courage et le soutien de tout un peuple qui croit en une revanche symbolique. Après tout, depuis la divine surprise de l’Euro 2004, tout est possible.

[…]

Le match somptueux du vendredi 22 juin à l’Arena de Gdansk s’est déroulé selon un scénario parfait. Une superbe Mannschaft a vaincu grâce à quatre buts magnifiques, et sans que la Grèce en sorte humiliée. À l’ouverture du score par Lahm (39e) avait répondu l’égalisation de Samaras (55e). Un but qui avait relancé le suspense et qui avait surtout attesté de la vaillance tout athénienne de la légion hellénique. Et puis Khedira (61e), Klose (68e) et Reus (74e, 4-1) plieront l’affaire avant qu’un penalty de Salpingidis, à la 89e minute, ne ramène le score final à d’honnêtes proportions. À 4-2, la Grèce pouvait sortir la tête haute, d’autant que le capitaine héroïque Karagounis était absent pour suspension contre l’Allemagne. Or, tous les peuples du monde se consolent plus facilement des défaites sévères quand l’un des leurs a manqué… Il n’a échappé à personne que le talent juvénile de cette Mannschaft si séduisante et menée par le sexy Joachim Löw a éteint, ne serait-ce que momentanément, tout sentiment anti-allemand.

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Extrait de "Terrain miné : Quand la politique s'immisce dans le football", Hugo Sport Editions (février 2013)

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