1415 : à quoi ressemblait la frénésie médiatique la dernière fois qu'un pape s'est retiré<!-- --> | Atlantico.fr
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Comment l'information a-t-elle circulé en 1415, la dernière fois qu'un pape a renoncé à sa fonction ?
Comment l'information a-t-elle circulé en 1415, la dernière fois qu'un pape a renoncé à sa fonction ?
©Reuters

Les infos de l'an mil

Alors que la renonciation de Benoît XVI a été connue du monde entier en quelques clics, comment l'information a-t-elle circulé en 1415, la dernière fois qu'un pape a renoncé à sa fonction ?

Jacques  Le Goff

Jacques Le Goff

Jacques Le Goff est normalien et agrégé d'histoire, il a consacré sa vie à l'exploration du Moyen Âge.  En 1972, il succède à Fernand Braudel à la tête de la VIe section de l’École pratique des hautes études, devenue École des hautes études en sciences (EHESS) sociales sous sa présidence.

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Atlantico : Le dernier départ du Vatican d'un pape de son vivant date de 1415. Comment l'information se diffusait-elle à l'époque ? Les habitants du royaume de France étaient-ils rapidement au courant de ces informations ?

Jacques Le Goff : Une petite précision tout d'abord, le dernier départ volontaire d'un pape, comme l'a fait Benoît XVI, a eu lieu en 1294 avec Célestin V. Le pape qui a quitté son siège en 1415 a plutôt été écarté par les cardinaux.

La fausse idée que l'on se fait du Moyen-Age, c'est l'image de gens vivant retirés dans leur coin, ce qui est une idée qui ne correspond absolument pas à la réalité médiévale. Le grand nombre de courriers circulant, notamment depuis Rome, nous laisse penser que la nouvelle du départ d'un pape devait être connue dans toute la France en quelques jours seulement. Bien entendu, le principal vecteur de diffusion de l'information se faisait à travers les représentants de l'Église. 

Il y avait au Moyen-Age un nombre très important de paroisses qui, par la prédication permettait la délivrance de l'information à tous. La prédication n'avait en effet pas seulement pour but de former les paroissiens à la foi, mais bien de les informer, à tel point que quasiment personne ne vivait complètement retiré des affaires du monde

L'autre grande source de communication, c'était le foyer royal et seigneurial, qui a commencé à se développer notamment avec Philippe le Bel, à la fin du XIIIe siècle. Les grands discours où le roi s'adressait à la foule peuvent se rapprocher du discours d'un président de la République à la télévision.

Il n'y avait donc pas d'inégalités dans la diffusion de l'information entre les différentes parties du territoire ?

Il y avait sans doute une inégalité entre les villes et les campagnes. Mais un évènement essentiel s'est produit entre le XIe et le XIIIe siècle : la multiplication des villes. En effet, à cette époque, dès 4 000 ou 5 000 habitants, on pouvait commencer à parler d'une "ville" développée avec une activité économique bien présente et donc le passage de courriers et de pèlerins, qui furent aussi d'importants vecteurs de l'information, et donc de messages. La croissance du nombre de villes a donc permis l'augmentation de la diffusion de l'information.

Si l'Église était la principale source de diffusion de l'information, n'y avait-il pas une uniformité peu propice au débat dans ce qui était diffusée auprès des populations ?

La diffusion de l'information n'était pas du tout homogène. La chrétienté formait certes une unité très liée, ce qui a clairement permis la diffusion rapide et organisée d'une information. Mais elle a aussi connu de grandes divisions. Le message n'était donc pas uniforme, ce qui contribuera ensuite à la diffusion des hérésies. De plus, dès le XIIIe siècle, les langues vernaculaires ont commencé à s'affirmer par rapport au latin ce qui a rendu la communication du message dans les prédications de plus en plus hétérogène. Que l'Église ait donc été le vecteur largement majoritaire de l'information n'a donc jamais empêché une vraie diversité de l'information. 

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