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La hausse de l’or est essentiellement due à des taux d’intérêt réels négatifs dans toutes les grandes monnaies fiduciaires.
La hausse de l’or est essentiellement due à des taux d’intérêt réels négatifs dans toutes les grandes monnaies fiduciaires.
©Reuters

Decod'Eco

L'or est passé sous la barre des 1 600 dollars : faut-il en déduire, comme l'avancent certains, que le grand marché haussier aurifère entamé en 1998 est terminé ?

Simone Wapler

Simone Wapler

Simone Wapler est rédactrice en Chef des Publications Agora (analyses et conseils financiers).

Elle est l'auteur de "Comment l'Etat va faire main basse sur votre argent: ... et ce que vous devez faire pour vous en sortir !", paru chez Ixelles Editions en mars 2013.

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Choc mercredi 20 février 2013 : la Fed a fait savoir qu’elle pourrait arrêter la planche à billets. La cataracte du QE3 infini qui déverse 85 milliards de dollars de liquidités par mois sur les marchés actions pourrait ne plus être… infinie.

Les marchés actions et l’or sont allés au tapis.

Pourtant, la Fed n’arrêtera pas d’imprimer. Elle ne le peut plus, et l’or, la relique barbare, n’a pas dit son dernier mot.

Pourquoi la Fed dit-elle qu’elle arrêtera ses mesures de soutien ?

Parce que cela n’est peut-être pas utile et pire, cela pourrait être nuisible. Extrait des minutes des 29 et 30 janvier : "un certain nombre de participants ont établi que l’évaluation de l’efficacité du coût et des risques des rachats d’actifs pourrait conduire le Comité à diminuer ou terminer ces rachats avant qu’on puisse constater une amélioration substantielle du marché de l’emploi".

GKResearch, dans sa note du 21 février signée Will Denyer (The Fed in The Red), fait remarquer que le doute étreint un certain nombre de participants car il y a désormais un danger clair et évident pour la Fed d’afficher des pertes. Si le QE3 se poursuivait durant 2013, la Fed pourrait basculer dans le rouge en 2015. Une partie (1 000 milliards de dollars) des actifs obligataires qu’elle détient est sensible à une hausse des taux. Or, les taux ne peuvent plus maintenant que bouger dans un seul sens : la hausse.

Fin 2012, un article de la Fed (The Federal Reserve’s Balance Sheet and Earnings: A primer and Projections) divulgué en janvier calculait que pour éviter des pertes, il fallait arrêter le QE fin 2012.

Une banque centrale américaine en perte pourrait ébranler la confiance du monde dans le dollar, devise de réserve mondiale. La vénération concernant les banques centrales en général et leur contrôle des monnaies fiduciaires et de l’économie pourrait s’évaporer.

Nous entrerions alors en territoire inconnu. Donc la Fed fait savoir qu’elle va arrêter ses mesures de soutien.

Le scénario de Goldman Sachs entre fiction et réalité

Fin 2012, Goldman Sachs avait prévu la baisse de l’or sur fond d’amélioration de l’économie américaine et de remontée du taux directeur de la Fed. La porosité entre Goldman Sachs et le monde politico-financier est de notoriété publique. La reprise de l’économie américaine est la partie fantaisiste de ce scénario, mais la prévision de l’arrêt du QE lui donne de la crédibilité.

Seule une observation superficielle des chiffres peut permettre de croire à une quelconque reprise américaine. Les dernières mises en chantier de maison restent inférieures de 61% au niveau de 2006. Le chômage est toujours à un niveau élevé. Le chômage de longue durée est en progression fulgurante. Les créations d’emplois sont insuffisantes. Le PIB est surestimé du fait d’une minoration de l’inflation suite à un changement de mode de calcul entrée en vigueur dans les années 1990. La production industrielle n’a pas retrouvé son niveau d’avant-crise. La balance commerciale est toujours déficitaire. La consommation ne tient que par les 1 000 milliards de dollars de prêts étudiants. Sans ces prêts, elle serait au niveau de 2005.

Il n’en demeure pas moins que l’annonce de l’arrêt prochain de la planche à billets et l’effondrement consécutif de l’or renforcent la crédibilité de Goldman Sachs.

Que pourrait-il se passer sans intervention de la Fed ?

Les marchés actions américains sont au plus haut, comme en 2000, comme en 2008. S’ils perdent leur soutien, qui va acheter ?

Par ailleurs, les capitaux se retireront aussi des pays émergents. L’effet richesse va se dissiper.

La planche à billets est une drogue. Le sevrage brutal donne des crises de delirium tremens.

L’or est-il mort, fondamentalement ?

La hausse de l’or est essentiellement due à des taux d’intérêt réels négatifs dans toutes les grandes monnaies fiduciaires. Les rendements des emprunts d’Etat diminués de l’inflation sont négatifs, donc votre épargne s’évapore.

Récemment deux voix prestigieuses - Martin Wolf et Adair Turner - se sont élevées pour que la planche à billets serve à financer le déficit, c’est-à-dire l’accroissement de la dette et non plus simplement les rachats de vieilles dettes.

Toute hausse des taux d’intérêt aggrave les déficits et les finances publiques des pays développés. Le stock de dette augmente… La croissance n’est toujours pas là…

Le chemin de la facilité sera choisi par ceux qui nous ont emmenés jusque-là. Le demi-tour n’est plus possible. La création monétaire se poursuivra sous une autre forme, une autre appellation, d’autres simagrées qui feront à nouveau, un temps, illusion.

L’or n’est donc pas fondamentalement mort.

[L'or et ses perspectives, mais aussi le délitement de la Zone euro, les coulisses de la Fed et les vraies questions derrière la crise économique actuelle : vous retrouverez tout cela jour après jour en cliquant ici.]

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