Connaissez-vous les "auto-quantificateurs", ces gens qui traquent leurs courbes de poids, de sommeil ou même leur nombre d'orgasmes pour optimiser leur biologie ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Selon une étude, 7 américains sur 10 "traquent" leurs données, afin de mesurer et de corriger leurs habitudes
Selon une étude, 7 américains sur 10 "traquent" leurs données, afin de mesurer et de corriger leurs habitudes
©Reuters

Auto piratage

Dave Asprey est l'un d'entre eux. Il a déjà investi 300 000 dollars dans la connaissance de son corps.

C'est un étrange régime auquel s'est soumis Dave Asprey. Il ne s'est ni privé de viennoiseries, ni de chocolat. En revanche, cet entrepreneur de la Silicon Valley a décidé de réduire au strict minimum... son nombre d'orgasmes ! Pas pour des considérations religieuses ou pour des raisons de santé, mais dans le but de déterminer le nombre optimal d'éjaculations nécessaires au bonheur. Pendant plusieurs mois, Dave Asprey ne s'est donc autorisé qu'une seule éjaculation par semaine. Il a ensuite représenté sous forme de graphiques la fréquence de ses orgasmes et les a mis en parallèle avec son degré de satisfaction globale dans la vie. Puis, il a tenté de voir de quelles manières ces données avaient une influence l'une sur l'autre.

Dave Asprey est même allé plus loin, relate Business Insider. Pendant des mois, il a dormi avec tout un arsenal électronique afin d'évaluer la qualité de son sommeil. Un dispositif un peu encombrant qui l'a conduit à faire chambre à part avec son épouse pour ne pas la déranger. Au cours d'une précédente relation, Dave Asprey a même listé tout ce que sa petite-amie mangeait, pour tenter d'établir un lien de corrélation entre les aliments ingérés et ses états d'âme.

Tout commence à l'âge de 25 ans. Malgré le succès professionnel et une bonne forme physique, Dave Asprey se rend compte qu'il commence à perdre de la vitesse. Et il décide de mesurer cette "régression". Il commence à jouer sur Internet au jeu de cartes FreeCell pour voir comment ses performances évoluent. Très vite, il constate que certains joursil lui faut 10 minutes pour finir une partie, et d'autres jours seulement 2 ou 3 minutes. C'est la révélation : il se rend compte qu'il existe des outils lui permettant d'évaluer et de mieux comprendre ses performances. Dave Asprey décide alors de mesurer les moindres données que son corps peut révéler.

Pourquoi un tel comportement dignes des plus grands mono-maniaques ? Dave Asprey estime que toutes ces données lui permettent tout simplement, à lui et à son épouse, de s'améliorer. Rassembler toutes ces données personnelles "peut expliquer certains comportements et mettre en lumière des mauvaises habitudes", explique Dave Asprey qui tient un blog où il raconte tous ses efforts pour "pirater" son corps et son esprit. "Les données vous donnent le pouvoir de changer votre relation, et c'est énorme", assure-t-il.

Dave Asprey est loin d'être le seul à agir de la sorte. Il fait partie du mouvement des "auto-quantificateurs", des personnes qui prônent la connaissance de soi grâce à la traque de leurs propres données. Traditionnellement, les auto-quantificateurs utilisent l'électronique ou des outils analogues afin de mesurer, puis éventuellement de corriger, leurs propres habitudes. Aujourd'hui, une nouvelle catégorie d'auto-quantificateurs voit le jour : comme Dave Asprey, ils traquent aussi les données de leurs proches. Pour le meilleur et pour le pire.

Selon un récent rapport du Pew Research Center, relayé par le Huffington Post, 7 Américains sur 10 sont des "traqueurs" de données. Et un quart des traqueurs vont même jusqu'à partager ces données. Pendant des années, "Internet a permis aux gens de trouver l'amour parmi une multitude de sites de rencontres", explique Gary Krane, co-fondateur de CoupleWise, un site qui autorise les couples à traquer les besoins de leur partenaire. "Mais la technologie qui aide les gens à garder leur conjoint a été largement ignorée jusqu'à présent", ajoute-t-il.

Et si ce type de dispositif permet d'en savoir plus sur soi-même ou sur sa vie de couple, ces outils changent aussi grandement la donne en matière de surveillance, de responsabilisation de l'individu et de compétition entre les personnes. Laurie Hick a pris pour habitude d'évaluer la qualité de sommeil de son couple ainsi que les habitudes alimentaires d'elle et son mari. Grâce à Internet et à une application à laquelle les deux époux peuvent accéder, Laurie peut évaluer l'hygiène alimentaire de son mari à distance. S'il part en voyage une semaine, elle peut savoir s'il a mangé sainement ou s'il a enchaîné Mac Do sur Mac Do. Big Brother le retour ?

Certains couples affirment que les données collectées les aident effectivement à être plus respectueux et attentifs aux besoins de l'autre. C'est le cas par exemple de Lisa et Joe Betts-LaCroix. "Si je vois que Lisa a 38 points de sommeil [un score faible qui témoigne d'une mauvaise nuit, NDLR] je me dis : "Aujourd'hui, je vais marcher sur des œufs car un score de 38 points signifie qu'elle sera d'humeur lunatique", explique Joe. 

"Plus que de découvrir des secrets cachés, le fait de collecter des données offre tout simplement des outils pour mieux communiquer", explique Elliott Hedman, lui-même traqueur. Lorsque l'on discute en se basant sur un graphique nous sommes plus honnêtes les uns avec les autres, affirme-t-il. "C'est moins accusateur. Cela supprime les sentiments personnels." Certains traqueurs vont jusqu'à dire que la collecte de données permet d'exprimer comment on se sent de manière plus crédible... puisqu'il y a des données chiffrées à adosser à notre comportement. C'est peut-être vrai, mais cela reste tout de même une manière de concevoir l'Homme et les rapports humains de manière très froide...

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