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Chine : éveillée mais coincée
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Libérer le yuan

Face à une inflation galopante, la Chine choisit de durcir sa politique monétaire. Elle devrait plutôt de laisser le Yuan s'apprécier pour renforcer sa compétitivité sur des bases saines qui permettent de financer les investissements et d'augmenter les salaires.

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel est professeur à l'ESCP-Europe, et responsable de l’enseignement de l'économie aux élèves-ingénieurs du Corps des mines. Il est également directeur de la revue Sociétal, la revue de l’Institut de l’entreprise, et auteur de plusieurs ouvrages sur l'économie, en particulier américaine.

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Face à un taux d’inflation de 5%, la Chine serre sa politique monétaire. Ce faisant, les dirigeants de Pékin commettent deux erreurs d’analyse.

Une nécessaire remise à niveau des prix

La première est de ne pas comprendre qu' une économie qui rattrape son retard par rapport aux économies dominantes comme celles de l’Europe et des États-Unis connaît inévitablement une remise à niveau de ses prix. Quand la Chine aura atteint le même stade de développement économique que les pays du G7, elle aura des prix identiques. Comme ce n’est pas encore le cas, chaque année qui comble l’écart entre les PIB par tête comble aussi les écarts entre les niveaux de prix. Cela s’appelle en théorie économique « l’effet Balassa Samuelson ».

Cette situation n’a pas que des aspects négatifs car parmi les prix qui augmentent, il y a les salaires. Cet accroissement des rémunérations est naturel : une économie ne peut vivre durablement dans la spoliation de sa force de travail par la perpétuation autoritaire de salaires trop bas.

La compétitivité par le progrès technique

La seconde erreur tient là encore à l’évolution du coût du travail. Dans son obsession mercantiliste, la Chine fonde sa croissance sur les exportations, c'est-à-dire sur une forte compétitivité. Mais elle se trompe sur le moyen de l’obtenir. Tout pays a trois possibilités pour renforcer sa compétitivité : la première est la dévaluation et la sous évaluation de sa devise ; la deuxième est la déflation salariale ; la troisième est l’amélioration de la productivité par le progrès technique.

Alors qu’à long terme, c’est cette dernière qu’il faut choisir, les Chinois s’arc-boutent sur les deux premières. Certes, par un contrôle des changes d’un autre âge qui perturbe l’économie mondiale et stérilise dans les caisses de leur Banque centrale des sommes abyssales, ils arrivent à limiter la hausse du yuan. Mais la pression sur les salaires est de plus en plus forte et nourrit une inflation « Balassa-Samuelson » qui immanquablement érode leur compétitivité.

Laisser le Yuan s'apprécier

La bonne réponse au problème chinois d’inflation n’est ni de serrer les conditions de crédit, ce qui pénalise une économie qui a encore beaucoup d’investissements à financer, ni de chercher à maintenir des salaires de misère. Elle est de supprimer le contrôle des changes et laisser le yuan s’apprécier.

D’une part, cela obligerait les entreprises, confrontées à la réalité productive de leurs concurrents, à mener le combat de la compétitivité sur des bases saines et durables ; d’autre part, cela ferait baisser le prix des importations, ce qui freinerait l’inflation. En outre, comme une part significative des importations est agro-alimentaire, en baisser le prix par le taux de change permettrait d’éviter une révolte frumentaire.

La rue arabe s’est révoltée notamment contre l’évolution des prix des produits de première nécessité. A Pékin, on sait que la rue chinoise est susceptible de s’enflammer pour les mêmes raisons. Mais les décisions prises, soumises à l’esprit mercantiliste qui y règne, sont à côté de la plaque.

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