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Succession à la tête du Monde : l'anti-libéralisme échevelé est-il une maladie transmissible au sein de la presse française ?
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Pensée unique

Natalie Nougayrède a été désignée par les actionnaires du "Monde" comme directrice du journal. Matthieu Pigasse et Xavier Niel soutenaient pourtant la candidature d'Arnaud Leparmentier. Mais pour Pierre Bergé, l'éditorialiste n'était pas assez à gauche.

Benjamin Dormann

Benjamin Dormann

Benjamin Dormann a été journaliste dans la presse financière et trésorier d'un parti politique. Depuis 18 ans, il est associé d'un cabinet de consultants indépendants, spécialisé en gestion de risques et en crédit aux entreprises. Il est executive chairman d'une structure active dans 38 pays à travers le monde. Il est l'auteur d’une enquête très documentée : Ils ont acheté la presse, nouvelle édition enrichie sortie le 13 janvier 2015, éditions Jean Picollec.

Le débat continue sur Facebook : ils.ont.achete.la.presse et [email protected].

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Natalie Nougayrède a été désignée par les actionnaires du “Monde” comme directrice du journal. Matthieu Pigasse et Xavier Niel soutenaient la candidature d'Arnaud Leparmentier, éditorialiste politique, déjà candidat à la direction du Monde en 2011. Pierre Bergé lui préférait Franck Nouchi, directeur du développement éditorial, jugé plus à gauche. Arnaud Leparmentier est-il victime d’un réflexe anti-libéral de la part de du « Monde » ?

Benjamin Dormann : Il est victime de l'insuffisance de professionnalisme de la presse française. Les journalistes militent, plus qu'ils n'informent. Et comme de plus, les directeurs de rédactions doivent être approuvés par un vote des rédactions, ils doivent satisfaire leur exigence déplorable d'endogamie et  d'homogénéité politique. Candidature pas retenue car incompétent ? Inexpérimenté ? Trop peu leader d'équipe ? Non, son point faible, éliminatoire : pas assez à gauche... Pauvre presse obsédée de rester dans son "petit monde"

Pendant ce temps, les contribuables continuent d'inonder de subventions, contre leur gré, ce secteur incapable d'évoluer correctement et rapidement :  1,2 milliards de subventions annuelles à la presse, d'après notre Ministre de la Culture. En réalité, le double selon le calcul détaillé figurant dans mon enquête "Ils ont acheté la Presse". 5 milliards d'euros entre 2009 et 2011, d'après la Cour des Comptes elle-même cette semaine. 18 m€ d'euros d'aides directes pour Le Monde sur cette période, plus un flot d'aides indirectes. Là est le vrai scandale dont il est impossible de débattre publiquement avec ces privilégiés des temps nouveaux.

De manière générale, les idées libérales sont-elles bien représentées dans les médias français ?

Le libéralisme est inexistant en France. Pour être personnellement diplômé de l'école de Chicago, je peux vous dire ce qu'est le vrai libéralisme, pur et dur, pour certains de ses défenseurs : "vous prenez le code du travail, et vous le mettez à la poubelle" ! Les français ne connaissent pratiquement pas les idées d'un économiste libéral renommé, tel Pascal Salin (auteur de "Libéralisme"). Ils sont depuis des années médiatiquement imbibés de la seule doctrine socio-économie, ultra dominante. Pourtant, les modèles différents qu'on étouffe (économie alternative, libéralisme, protectionisme/nationalisme, ...)  percent dans les urnes, à défaut d'accéder aux médias consensuels.

Cet ostracisme est-il une spécificité française ?

Oui. Le militantisme politique de nos rédactions, l'homogénéité des opinions dans les rédactions et les plus de 20% de subventions du secteur, alors que ce secteur est subventionné en moyenne à seulement 2% en Europe, sont uniques. Nous sommes les seuls à avoir une presse d'information qui n'a apparement aucune honte de son absence d'indépendance idéologique et financière, et qui en meurt, à juste titre.

Au pays des Lumières, les lecteurs veulent des journalistes qui travaillent, plus qu'ils ne recopient; et qui les informent, pour que chacun de nous puisse se forger sa propre opinion. La presse ne le fait plus. Elle commente, elle peoplise, elle juge les autres, elle moralise, elle dramatise,... elle oublie juste de faire son métier : informer, intéresser ses lecteurs.

La Droite forte, l'un des mouvements de l'UMP, a proposé aujourd'hui de et "libérer l'information en garantissant l'embauche de journalistes de droite". Que pensez-vous de cette proposition ?

On en répond pas à une étroitesse d'esprit par une autre étroitesse d'esprit opposée. On ne décide pas administrativement d'instaurer la tolérance et les débats d'idées. Le mieux est de continuer à laisser cette presse paresseuse et/ou sectaire mourir, faute de lecteurs, et de manifester contre les financements abusifs publics, au moment ou Mediapart milite pour que sa TVA passe à 2,1%, pendant qu'elle augmente pour toues les autres Français.

La loi peut-elle vraiment imposer le pluralisme dans les médias ?

Non. Seul internet peut permettre au pluralisme de vivre. Internet échappe au controle et à l'oligopole des médias, qui se partagent la gateau des subventions, votés par des élus obsédés de les avoir de leur côté, car leur carière politique personnelle dépend hélas d'eux.

Le gouvernement socialiste avait expliqué qu'il était contre les grands groupes de presse proches du pouvoir. Chiche ? Qu'ils coupent les millions d'excès de subventions à l'Humanité, Libération, Les Inrcokuptibles, Le Figaro, Le Monde, ... Qu'ils les économisent, ou soutiennent les multiples initiatives de qualité que l'on trouve sur Internet, toutes sensibilités politiques confondues. Sur ces sites, et sur ces forums non censurés (pardon, "non modérés" comme disant pudiquement les conservateurs du marché de la presse), on trouve beaucoup d'informations et d'opinions passionnantes et vivantes. Parfois inattendues, et souvent pleines de bon sens. A vérifier et entre-couper, naturellement. Mais au moins pas formatées par les annonceurs et les agences de com. Une vraie bouffée d'air frais pour tous !

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