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Ondes électromagnétiques : que sait-on vraiment de leur nocivité (et de ceux qui travaillent sur le sujet) ?
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Danger ?

Le débat sur le danger des ondes électromagnétiques vient d'être relancé par la ministre de l'Economie numérique Fleur Pellerin qui estime notamment que la dangerosité de ce phénomène n'est "pas étayée scientifiquement".

Yves de Ghuilem

Yves de Ghuilem

Yves de Ghuilem est l'ancien rédacteur en chef de "Minitel Magazine" et spécialiste des nouvelles technologies de l'information.
 
Il est le co-auteur de "Aux risques d'innover : les entreprises face au principe de précaution" aux éditions Autrement (2009).
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Atlantico : La ministre de l'Economie numérique Fleur Pellerin estime que la dangerosité des ondes électromagnétiques n'est "pas étayée scientifiquement". Alors que plus d'un milliers d'études ont été publiées sur ce thème depuis les années 70, comment expliquer qu'aucun consensus n'émerge dans la communauté scientifique ?

Yves de Ghuilem : Les ondes électromagnétiques sont un phénomène complexe comme on peut l’imaginer. On se trouve ici face à quelque chose de difficilement mesurable scientifiquement et qui touche en plus à une problématique concernante. 85% des Français étaient équipés d’un téléphone portable en 2011 et son caractère indispensable dans la société actuelle rend sa dénonciation problématique. Par ailleurs on peut noter que les différentes études sur le danger des ondes électro-magnétiques se sont opposées entre elles, avec des contres études qui venaient toujours contester les résultats précédents, d'ou le flou que nous connaissons actuellement.

Je peux citer à titre d'exemple une étude baptisée Interphone lancée dans les années 2000 et qui se concentrait sur quatre types de tumeurs qui auraient pu être provoquées par une surexposition aux ondes. La méthode a été ici de reprendre un grand nombre d'utilisateurs fréquents et de voir si l'on observait des modifications notoires sur dix ans. La conclusion de l'expérience estimait qu'il n'y avait pas de développement de gliomes et de méningiomes (cancers du cerveau ndlr) sur les cas retenus par l'étude. 

D'autres enquêtes ont pourtant démontré que, dans les pires conditions d'utilisation, le niveau de radiation des ondes électromagnétiques peut être multiplié par mille, en particulier dans les premières secondes d'une conversation et au moment de la connexion. Face à ces constats inquiétants bien qu'incomplets, les pouvoirs publics se sont très tôt saisis du sujet et ont instauré une norme à ne pas dépasser avec l'arrêté du 8 octobre 2003.

Le but était de manière plus générale d'installer un principe de précaution qui postulait qu'en l'absence de preuves démontrant que le mobile était nocif pour la santé, l'utilisateur devait tout de même avoir un usage modéré et prudent. D'aucuns ont ainsi recommandé le fameux kit oreilletes qui possède un faible indice DAS (outil mesurant la capacité maximale de « rayonnement » de chaque type de terminal téléphonique ndlr). Il n'en reste pas moins que l'on ne possède pas de preuves tangibles de tumeurs cérébrales et bien que le principe de précaution soit un progrès il faut ici trouver un juste équilibre pour éviter qu'il ne se transforme en une vérité acquise qui s'opposerait à la recherche.

La peur face à la technologie peut-elle aussi expliquer ce flou ? 

Effectivement. Selon un sondage Sofres daté de 2009, 29% des Français pensent que le téléphone mobile est dangereux pour la santé contre seulement 7% qui pensent qu’il ne l’est pas du tout. Nous sommes ici dans un paradoxe ou l'on se méfient de produits qui nous sont extrêmement utiles et dont l'usage est quotidien. Je pense pour aller plus loin que la communauté scientifique n’est pas étanche à la peur que génère toujours un  phénomène relativement nouveau (une quinzaine d’années environ…), ceci étant tout aussi vrai dans les domaines de l’agroalimentaire, de la gestion des déchets ou encore du nucléaire. Tous ces sujets suscitent une méfiance de l’opinion et d’une partie des professionnels car il existe des suspicions autour de laboratoires financés par des grands industriels sur des sujets qui les concernent parfois directement. Le spectre du conflit d’intérêt n’étant jamais très loin…

Que sait-on des organismes travaillant sur le sujet ?

Pour l'étude Interphone que j'ai évoqué plus haut, il s'agissait d'une coordination du Centre International de la Recherche pour le Cancer (CIRC) le financement global s’élevait à 19,2 millions d'euros (€). De ce montant, 5,5 millions € proviennent de sources industrielles. Sur ces 5,5 millions €, 3,5 million € ont été versés par le Mobile Manufacturers Forum (MMF) et la GSM Association,

Chacun contribuant pour moitié à ce montant, par l'intermédiaire d'un pare-feu assuré par l'UICC (Union internationale contre le Cancer) pour garantir l'indépendance des chercheurs. La plus grande part du reste de ces 5,5 millions € a été versée par des opérateurs et fabricants de téléphones portables aux différents centres individuels, par exemple par le biais de taxes et de droits collectés par des agences gouvernementales. Seul 0,5 million € (2,5 %) des coûts globaux de l'étude a été fourni directement par l'industrie. (extrait de l'étude Interphone en question). Ce modèle de financement via le privé se retrouve le plus souvent dans les études qui sont commandées par les industriels.

On trouve aussi les organismes publics comme l'AFSSET en France (Agence Française de la Sécurité Sanitaire, de l'Environnement et du Travail) qui a mis en place une unité de veille du champ électro-magnétique et instauré le principe de précaution dont nous avons déjà parlé.

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