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Au fil des années, notre industrie des biens de consommation a subi un lent processus de déclin
Au fil des années, notre industrie des biens de consommation a subi un lent processus de déclin
©Flickr/KaiChanVong

Nouveaux modèles ?

Les exportations constituent le seul moteur aujourd'hui pour relancer la croissance en France qui a donc besoin de produire des biens innovants, différenciés. Dans cette recherche de la compétitivité dans un nouveau modèle de développement, la consommation peut jouer son rôle.

Philippe Moati

Philippe Moati

Philippe Moati est professeur agrégé d'économie à l'Université Paris-Diderot. Ses axes de recherche privilégiés sont les transformations du système productif et, plus généralement, les mutations du capitalisme (en prenant en compte les dimensions sociétales). Au cours des 23 ans passés au Crédoc, il a développé une expertise reconnue sur le secteur du commerce ainsi que sur les comportements de consommation. Il assure la co-présidence de l'Association L'Observatoire Société et Consommation.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages tels que L'Avenir de la grande distribution et La nouvelle révolution commerciale en 2011 aux éditions Odile Jacob.

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Quatre moteurs peuvent tirer la croissance : la consommation des ménages, les dépenses publiques, les exportations et les investissements des entreprises. Les entreprises n’investissent que si elles perçoivent des perspectives de croissance de l’activité. Il ne reste donc que trois moteurs.

Le robinet des dépenses publiques s’est fermé avec la priorité que le gouvernement accorde à la réduction des déficits et de la dette. La consommation des ménages dépend du pouvoir d’achat. Or, depuis mi-2011, le pouvoir d’achat des Français est en berne – en grande partie en raison de l’effet déflationniste de la politique budgétaire – et il en sera très certainement de même en 2013. Seule une réduction du taux d’épargne est susceptible de relancer la consommation. Le scénario n’est pas à exclure, les ménages ayant tendance à utiliser l’épargne pour amortir l’effet sur leur consommation des variations du pouvoir d’achat. Ils le feront d’autant plus que le rendement de l’épargne est aujourd’hui peu incitatif. Mais quand bien même la consommation des ménages serait-elle encore en (faible) croissance, cela suffirait-il à relancer l’économie ? On peut en douter.

Au fil des années, notre industrie des biens de consommation a subi un lent processus de déclin, qui s’est accéléré avec le déclenchement de la crise et qui touche aujourd’hui jusqu’à certains de nos fleurons, comme l’automobile. Un surcroît de consommation induit certes un surcroît d’activité pour certaines entreprises industrielles et, plus encore, pour le secteur du commerce et des services. Mais il provoque surtout un accroissement du volume des importations, en particulier lorsque la dépense porte sur les produits high-tech ou des vacances à l’étranger. Même l’achat d’une voiture française ne garantit pas un effet sur l’emploi en France. Dès lors, il ne reste qu’un moteur pour relancer (durablement) la croissance : les exportations, c’est-à-dire la compétitivité internationale de l’économie française, qui s’est fortement dégradée si l’on en juge par le caractère abyssal du déficit de notre commerce extérieur.

Le gouvernement l’a bien compris. L’urgence est à une politique de l’offre pour relancer la compétitivité de notre système productif. Il n’est pas sûr pour autant qu’il ait opté pour les bons leviers pour y parvenir.

Le problème de l’industrie française n’est pas un problème du coût du travail ou, plus exactement, s’il l’est, c’est que nous ne produisons pas suffisamment de produits innovants, différenciés, pour lesquels le prix n’est qu’une variable secondaire.

Nous ne rebâtirons pas l’industrie d’hier. La compétitivité doit être recherchée dans l’engagement résolu dans un nouveau modèle de développement. Ici, la consommation peut jouer son rôle.

Selon une enquête récente de l’Observatoire Société et Consommation (l’ObSoCo), 52 % des Français aspirent à consommer mieux. Ils sont même 30% à se dire prêts à consommer moins pour consommer mieux.

Consommer mieux signifie consommer utile, sans gaspillage, des produits de qualité, qui durent, qui respectent l’environnement et ceux qui participent à leur fabrication. Pour les acteurs de l’offre, ceci est une chance à saisir, une incitation forte à s’engager dans une stratégie de qualité. Plus encore, une incitation à comprendre que ce qui importe pour les consommateurs n’est pas nécessairement le produit, mais l’usage du produit, les effets utiles qu’ils tirent de sa consommation.

Il y a ici de nouveaux modèles économiques à élaborer – à l’instar de Vélib ou d’Autolib pour la mobilité urbaine – qui permettraient à notre économie de se montrer fer de lance dans l’invention d’un modèle de développement permettant de mieux satisfaire les besoins des gens, tout en apportant une réponse au formidable défi écologique. À la clé, sans doute, une compétitivité retrouvée, associée à des emplois (notamment des emplois de services) moins vulnérables à la concurrence des pays à bas salaires. Dans ces conditions, la consommation peut effectivement être l’une des perspectives de la sortie de crise. 

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