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PSA : comment Hollande le Bon missionna le chevalier Montebourg pour affronter la famille Peugeot
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Bonnes feuilles

Depuis l'entrée d'Hollande le Bon au Palais de l'Elysée, les intrigues à la cour ne s'arrêtent pas ! Dominique de Saint-Honoré revient avec humour sur la gestion du plan social de PSA par le gouvernement. Extrait de "Hollande le Bon" (3/3).

Dominique  de Saint-Honoré

Dominique de Saint-Honoré

Dominique De Saint-Honoré arpente les allées et les antichambres de la nouvelle gouvernance.Il y observe, avec une distance amusée, l'éternelle comédie du pouvoir. 

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Notre Monarque jusque-là n’en perdait point son auguste contenance, il laissait manoeuvrer le Cardinal et ses ministres. Lesquels expliquaient  l’augmentation par les travaux de rénovation nécessaires pour remettre aux normes l’infrastructure dépassée de la compagnie d’électricité ; quant aux autres mesures d’austérité fiscales en cours, on se justifiait encore en trouvant de quoi critiquer le bilan de l’ancien gouvernement. Lorsque l’affaire PSA Peugeot éclata, le peuple – c’est-à-dire pas mal de salariés – eut pourtant du mal à ingurgiter cette nouvelle huile de foie de morue. L’entreprise annonça à terme la fermeture de son site d’Aulnay, et la suppression de huit mille emplois. Le gouvernement fut tout abasourdi par cette information.

On réclama une enquête, on sut que ce plan de licenciement avait été décidé bien avant les élections. Le Débonnaire affirma que le directoire de l’entreprise, en accord avec l’ancien gouvernement, avait sciemment rangé le dossier au placard afin qu’il sorte seulement après la campagne, c’est-à-dire sous le règne de notre Actuel Monarque. Notre Débonnaire profita du 14 Juillet pour affirmer que « le plan PSA n’était pas acceptable ».

Son Éminence, le Cardinal d’Ayrault – c’est-à-dire François de Hollande –, ordonna au Commissaire du peuple, le détesté M. de Montebourg, qu’il monte au créneau. Tout heureux qu’on le mandate à présent pour ce qu’il faisait naguère sans qu’on le lui demande, le bellâtre dédaigneux alla clamer sur les antennes paraboliques, les tubes cathodiques, les fonts baptismaux et dans les gazettes du royaume que le plan de licenciement massif – et la fermeture à terme de PSA Aulnay – était un scandale. Péremptoire comme à son habitude, il accusa la très protestante et très discrète famille Peugeot, détentrice de vingt-cinq pour cent du capital, d’avoir pris des dividendes considérables alors que le groupe était encore à se débattre contre la crise.

De sa voix onctueuse, notre Saint-Just de la rue de Solférino, lequel avait pourtant la mine saine de celui qui va se servir en légumes et fruits frais chez Fauchon, accusa M. Philippe Varin, PDG de PSA Peugeot, d’être un « dissimulateur ». Et quand on lui objectait que, pour faire face à la crise automobile, Peugeot se devait de prendre de telles mesures qu’on dénommait par ce curieux euphémisme de « plan social » comme si, par-dessus le marché, l’on voulait se foutre de la gueule de l’ouvrier, notre ministre en rajoutait, traitant toujours le groupe PSA de « malade imaginaire ». Comment expliquer que ces messieurs aient versé de larges dividendes aux actionnaires si l’entreprise faisait déjà face à des difficultés, ce sont là des libéralités dont je m’étonne, disait Montebourg. Le Commissaire convoqua au ministère l’austère Varin pour qu’il s’explique. Sous les dorures du palais, on rapporta que l’affreux Montebourg se plut à alterner la plus extrême des amabilités avec des paroles sournoises et un cynisme de mauvais aloi. M. Philippe Varin fit ainsi part de ses inquiétudes à notre ministre, il considérait que celui-ci faisait preuve de légèreté quant aux réalités du marché et surtout celle, impitoyable, de la Bourse qui venait de perdre quinze pour cent, il considérait qu’il prenait trop le parti des syndicats. Le Commissaire de Montebourg, de sa voix faussement étonnée, lui rétorqua : « Et alors ? » Cela sidéra Varin.

C’en fut trop pour la famille Peugeot – Thierry Peugeot craignit que la véhémence du Commissaire de Montebourg n’enflamme d’autant plus la colère des sans-culottes salariés, lesquels étaient déjà à manifester sous la bannière des syndicats. Sous sa fenêtre verdoyante, l’héritier de cette famille de capitaines d’industrie crut déjà entendre la clameur des manants, il se souvint alors d’une chanson en vogue dans les années soixante-dix. Oui, le respect se perdait bel et bien dans les usines de son grandpère, d’autant que la colère de ces ignares d’ouvriers se voyait avaliser par les fulminations de ce dingue de Montebourg. Avait-il eu raison de faire confiance à Varin ? Le polytechnicard se prévalait de belles réussites jusqu’ici. N’avait-il pas redressé auparavant Corus, alors que le groupe sidérurgique coulait, avant de revendre l’entreprise à un prix quinze fois supérieur à ce qu’elle valait lors de son arrivée ? Varin était payé assez cher après tout, presque autant qu’un joueur de football, il n’aurait qu’à en faire le sacrifice afin d’apaiser les ressentiments des salariés d’Aulnay et le courroux du Commissaire de Montebourg. Il y avait péril en la demeure, ces socialistes redevenus très durs faisaient un chantage à l’expropriation en envisageant de préempter d’autorité le site d’Aulnay, si une solution acceptable n’était pas trouvée par le groupe. C’est l’information que venait justement de lui déposer Varin en lui transmettant aussi les rapports de la Bourse. C’était autrement plus sérieux.

Le cours de l’action PSA avait considérablement chuté depuis que le Débonnaire et son gouvernement, à coups de grandes déclarations, s’en étaient mêlés. Où étaient donc passés ces imbéciles du Parti impérial ? Encore à se déchirer pour obtenir la première place. Il fallait agir et vite. D’ordinaire si discret, M. Th ierry Peugeot convoqua la presse, donna un entretien au Figaro. Rappela que l’entreprise Peugeot était en proie à des difficultés car elle ne s’était justement pas résolue à s’expatrier là où la main-d’œuvre était dix fois meilleur marché, brandit la menace d’une OPA, laquelle n’était pas impossible, en appela enfin à plus de modération.

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Extrait de "Hollande le Bon", Jean-Claude Gawsewitch (janvier 2013)

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