Sexe : et si un simple baiser était plus érotique que faire l'amour ?

Le baiser sec est la première approche du baiser de la vie d’un adolescent. Il s’agit d’embrasser chastement, sans bout de langue ni filet de bave, une personne avec qui nous flirtons. Sans échange de germes, nous collons nos lèvres fermées les unes contre les autres. Cela reste souvent gravé dans notre mémoire comme étant notre premier émoi érotique.

Pourtant, une fois adulte, le baiser sec devient par la suite dénué de sensualité. Les couples l’utilisent au quotidien pour se dire « bonjour », « à ce soir », « merci ». Il ne donne généralement pas lieu à une promesse charnelle. Le baiser sec peut être effectué en public sans offusquer personne. Vous pouvez déposer un baiser furtif sur la bouche de votre compagne / compagnon devant vos amis ou votre famille sans que personne ne se sente gêné. Il s’agit simplement d’une version plus intime du serrage de main, qui permet de maintenir un contact privilégié durant les événements simples de la vie de tous les jours. Éventuellement, il peut permettre de symboliser une entente cordiale (baiser Brejnev-Honecker).

Le baiser profond est, en revanche, la première manifestation d’un désir d’échange de fluides et la représentation symbolique du coït : la cyprine et le sperme sont ici représentés par la salive, et la pénétration du corps de l’autre se fait par la langue.

Il s’agit, symboliquement, de notre première expérience sexuelle. Elle précède de quelques années, en principe, la perte effective de notre virginité. Le baiser est non seulement sexué et genré, mais également individuel. Nous « baisons » généralement les yeux fermés. Or, il est possible de distinguer un homme d’une femme par la pure sensation, par la mollesse de ses lèvres, par leur douceur, par leur goût. Il est individuel dans le sens où nous reconnaîtrions entre mille et les yeux bandés une personne qui nous est intime.

Pourtant, nous n’embrassons pas toujours de la même manière, et ajustons notre « technique » en fonction de l’individu que nous embrassons, du contexte, et de l’intensité de la relation. C’est ainsi qu’un changement dans notre manière habituelle de baiser est souvent annonciateur de profonds bouleversements au sein du couple (renforcement d’un amour ou, a contrario, infidélité, voire désamour). Embrasser, plus qu’un prélude à un rapport sexuel, est une manifestation de notre désir de fusion.

Par le souffle, nous aspirons l’âme de la personne contre qui nous collons notre bouche. Et, précisons qu’accessoirement nous échangeons un bien plus grand nombre de germes en mélangeant nos salives qu’en faisant une fellation ou un cunnilingus. Il n’est pas anodin de constater que certaines prostituées trouvent plus « douloureux » de livrer leurs lèvres plutôt que leur sexe. Car pour embrasser, il faut une réciprocité. On ne peut pas embrasser seul, alors que l’on peut pénétrer seul et sans consentement (viol). C’est dire si l’implication émotive lorsque nous rendons un baiser est bien supérieure à une simple pénétration.


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Extrait de "Sexe Philo" aux éditions Bréal (janvier 2012)