Les six risques économiques majeurs en 2013<!-- --> | Atlantico.fr
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Des risques majeurs pèsent sur l'économie mondiale en 2013.
Des risques majeurs pèsent sur l'économie mondiale en 2013.
©Reuters

Attention danger

"Mur fiscal" aux Etats-Unis, dette publique monstrueuse au Japon, fin de la période bénie pour la Chine... Alors que la crise semble s'atténuer pour les pays de la zone euro, des risques majeurs pèsent sur l'économie mondiale en 2013. Premier volet de notre série sur les perspectives économiques de l'année à venir.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Etonnante cette année 2013 qui inquiète autant, comme si nous savions tous que rien n’est vraiment réglé, nulle part, que tout peut se renforcer ou bien s’affaisser de nouveau dans les mois qui viennent. Six risques au moins sont devant nous.

1 - La falaise américaine

Les Etats-Unis aiment jouer avec le feu. Ils sont en train de sortir de la crise de l'endettement privé. Banques, puis entreprises, puis ménages vont mieux... reste donc l'Etat, autrement dit "la falaise fiscale". Pourquoi falaise ? Parce que c'est le moment où le dernier ajustement doit se passer, celui qui a été constamment repoussé, et que la question se pose de la méthode à suivre : impôts en hausse ou bien dépenses sociales en baisse ? Cet ajustement "final" peut remettre les "autres" en question selon la manière dont il est mené et présenté. Car les "autres" ajustements ont déjà eu lieu, mais en partie : taux d’intérêts, salaires et dollar en baisse... conduisant à des tensions jusqu'à présent gérées. La gestion de la falaise peut ainsi être vue comme la dernière pièce de l'ajustement dans le partage de la valeur ajoutée, celle qui consolidera le futur américain. Mais un ajustement qui cristallisera aussi, par construction, des baisses de revenu net (du fait des impôts) ou bien de la consommation (du fait des réductions des dépenses sociales) avec plus ou moins de réduction des écarts de revenu, et là est la question, autant politique qu’économique.

Les marchés financiers se disent que tout va bien se passer. Soit ils imaginent que les politiques n'oseront pas prendre le risque de la crise... Soit ils pensent qu'une crise serait plus sûre pour s'ajuster vraiment, avec les coupes automatiques de dépenses qu’elle implique, et les responsabilités politiques qui devraient alors être assumées par chacun. Falaise ou pas, les Etats-Unis poursuivent et finissent leurs ajustements, avec des risques considérables sur la croissance mondiale - des risques dont ils ne se soucient pas.

2 - L'implosion japonaise

Où va le Japon ? Chaque année on s’étonne de son ratio dette publique/PIB. Il atteint 2,2 pour 2013. Autrement dit, avec un taux d'intérêt à dix ans à 0,8%, l'année commence avec des frais financiers de 1,8% du PIB ! Pas de surprise si le déficit termine à plus de 10% du PIB ! Pour en sortir, les autorités cherchent la croissance et l'inflation, les deux par une politique monétaire hors norme, sachant qu’elles ont déjà réduit les impôts des entreprises et des ménages, alimentant ainsi la dette publique. Là aussi nous avons un passage de la dette privée à la dette publique, comme aux Etats-Unis, mais avec la différence qu’il est deux fois plus important et entièrement financé par les Japonais eux-mêmes (95% du total). Ou plutôt les institutions financières japonaises (90%) ! La banque centrale japonaise entend ainsi faire remonter l’inflation et baisser le yen, financer directement les entreprises, grandes ou petites. Le risque de cette manœuvre est énorme. A l’intérieur, ce seraient les Japonais transformant rapidement leur épargne en dollar, à l’extérieur ce seraient la Chine et les Etats-Unis refusant cette guerre des changes. Voilà des années qu’on parle de cette fameuse résilience japonaise : une année encore ?

3 - Les tensions autour de la Chine et des pays émergents

La Chine est repartie, mais on voit bien que si elle ne peut plus exporter autant qu’avant, elle investit trop, au risque de surinvestir. La demande interne de consommation est encore trop faible, ce qui implique que ce pays doit changer de modèle, non seulement par des augmentations de salaires ce qui se produit, mais par une consolidation des revenus dans le temps, avec des retraites et des systèmes d’assurances et de soins efficaces. En même temps, on voit que la Chine prend la tête des pays émergents, étant le plus gros des BRICS, avec l’idée de consolider sa puissance régionale, au détriment du Japon (peut-il réagir ?) et de moins dépendre du dollar (les Etats-Unis vont-ils aimer ?). L’année qui vient sera celle des pressions sur la Chine, pour que sa monnaie monte et s’internationalise. Attendons la "solution" américaine pour la falaise.

4 - L’Angleterre, dedans ou dehors ?

L’Angleterre est géographiquement en Europe, stratégiquement aux Etats-Unis, financièrement en Asie, politiquement à Londres. Son déficit budgétaire dépasse 10% du PIB, avec une banque centrale qui l’achète en grande part, jusqu’où ? La livre, dans ce contexte, ne pouvait tenir par rapport à l’euro et s’est accrochée de fait au dollar, qui le sait ? Ses banques sont nationalisées. Les autres qu’elle abrite, et qui dépassent ses capacités de soutien en cas de crise, sont priées de renforcer leurs structures de détail pour éviter un effet en chaîne en cas de choc, qui y croit ? Le Royaume-Uni fait un grand écart, qui ne cesse de s’élargir. La question de l’union bancaire va-t-elle marquer la fin du jeu ? Ou bien, pour donner le change, celle du budget européen ? Réponse dans quelques semaines.

5 - La zone euro, sauvée ou rafistolée ?

La Grèce va un peu mieux, puisqu’elle vient de recevoir des milliards d’aides, comme l’Espagne. L’Italie joue un jeu politique pour faire reculer le populisme et s’engager dans une décennie d’ajustement. Nous verrons. Le pire de mi-2012 cède le pas aux ajustements effectifs sur les dépenses budgétaires : la Banque centrale européenne est là pour aider, mais pour autant que les Etats le demandent, et que les autres soient d’accord pour soutenir. La détente se met en place sur les taux, mais on mesure les années qu’il faudra pour revenir à cette norme rêvée d’une dette égale à 60% du PIB : dix ans, plus ? Pendant ce temps, dans une population qui vieillit, il faudra être constamment sérieux et surveiller. Un dérapage est toujours possible : la croissance sera longtemps faible, les peuples seront-ils patients, les politiques convaincants, les marchés convaincus ? Partout, tout peut glisser. Et dès les premiers jours de 2013.

6 - La France va devoir se dire quelques vérités

La France a surestimé la croissance 2012-2013, car elle a sous-estimé la profondeur de la crise. La réduction du déficit public ne peut venir de la hausse des impôts mais de la croissance, et celle-ci est opposée à celle-là. Il faudra donc réduire la dépense publique, ce qui a été annoncé mais reste à faire, et remonter la compétitivité des entreprises, ce qui reste à faire aussi. Autrement dit, il s’agit de remonter la part des profits dans la valeur ajoutée, pour investir et innover. Evidemment, ceci n’est pas possible sans débat et discussions sociales, mais on mesure le chemin à faire. C’est en 2013 qu’il commence.

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