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Cet inquiétant socialisme de l'offre qui se cache derrière la conversion du gouvernement à la compétitivité
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Inventer l'eau tiède

François Hollande a développé l'idée d'un socialisme de l'offre, symétrique à un socialisme de la demande. Ce concept qui a fait des ravages terribles a déjà été mis en pratique par d'autres avant lui...

Bruno Bertez

Bruno Bertez

Bruno Bertez est un des anciens propriétaires de l'Agefi France (l'Agence économique et financière), repris en 1987 par le groupe Expansion sous la houlette de Jean-Louis Servan-Schreiber.

Il est un participant actif du Blog a Lupus, pour lequel il rédige de nombreux articles en économie et finance.

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On connait la spécialité de François Hollande, c’est la synthèse. Il a fait des merveilles au Parti socialiste grâce à cette capacité à concilier le chaud et le froid, pour fabriquer l’eau tiède. Il tente la même chose, mais avec plus d’ambition, au niveau du parti français. Aura-t-il le même succès?

Les Français se nourriraient-ils de beau langage et non de bonne soupe ?

Nous revenons sur l’entretien accordé par Hollande aux journalistes.  Les journalistes, nous vous le rappelons, sont les intermédiaires de la démocratie, ils représentent, en quelque sorte, le peuple souverain. Un esprit normal, qui vivrait debout et non pas à genoux devant le Pouvoir s’étonnerait de l’expression utilisée en France : accorder un entretien aux représentants, médiateurs du peuple souverain. Ne devrait-on pas inverser? 

Le pays est tellement pollué qu’il ne s’étonne même plus. Tout comme il ne s’étonne plus qu’on laisse passer des inepties de propagande pour justifier les reniements et virages politiques. 

Ainsi les soi-disant médiateurs du peuple souverain ont laissé passer une énormité incroyable. Preuve de leur nullité bien sûr, de leur absence de culture économique et politique ; preuve de leur complaisance. 

Ils ont laissé Hollande développer l’idée d’un socialisme de l’offre ! Socialisme de l’offre qui serait symétrique du socialisme de la demande.

Pour lui, la conception traditionnelle du socialisme est celle du socialisme de la demande. Il invente donc l’eau tiède du socialisme de l’offre. Soi-disant nouvelle variété de la sociale démocratie dont il se refuse à se réclamer pour éviter les scissions et permettre à ses camarades de continuer d’aller à la soupe. 

Et nos gobe-lunes de journalistes d’écouter bouche bée réinventer l’eau tiède ! 

Le socialisme de l’offre existe depuis longtemps et il a fait des ravages terribles. L’URSS, de sinistre mémoire, pratiquait un socialisme de l’offre, on a vu le résultat lorsque l’Etat et ses prébendiers se mêlent de deviner ce que veut le peuple, de deviner l’avenir, de diriger les ressources et de conduire la production.

Plus près de nous, Helmut Schmidt, ou Helmit Schmudt, comme disait le vieux Marchais, a pratiqué en Allemagne le socialisme de l’offre. Il disait la fameuse idiotie largement reprise, même par les Giscardiens : les profits d’aujourd’hui font les investissements de demain et les emplois d’après-demain. C’est avec notre Helmut que l’Allemagne a commencé à dériver, à chuter; accumulant un endettement qui a failli la faire crouler comme une vulgaire France. 

Comment, dans un pays où l’Etat central dirige 56% de la dépense nationale, dans un pays où les gouvernements locaux ou régionaux, les entreprises publiques ou semi publiques représentent encore 20% du PNB, comment, dans un pareil  Etat de tiers payant généralisé, peut-on oser proférer semblable absurdité ? 

Les règles du jeu de la compétitivité et même de la compétence ne s’appliquent qu’à moins d’un quart des acteurs de l’économie. Et il faut leur en demander des efforts, à ces quelques pourcents du secteur libre, libre, mais avec des boulets aux pieds, pour qu’ils puissent tirer la charrue du pays. 

Le socialisme n’est ni de la demande ni de l’offre car il est d’ailleurs. Il est dans la prétention de quelques-uns de savoir mieux que les autres, dans tous les domaines, surtout ceux qui leur sont étrangers. 

Le socialisme, c’est cette infatuation qui conduit à croire que parce que l’on est le représentant de la fraction de la population la moins avertie de la chose économique, on est le mieux à même à conduire cette économie. 

Le socialisme, c’est cette aberration qui consiste à croire que parce que l’on nie les inégalités, on accède par l’adoubement miraculeux de l’élection au paradis de la compétence, de l’expérience et du savoir pour tous. 

Le socialisme, il est au cœur du système dans lequel l’individu est, par essence, l’ennemi et la société, elle, est  la mesure de toute chose. Le bien incarné. 

C’est pour cela que nous disons que la fausse droite est socialiste, elle croit les mêmes choses, elle pratique le même dirigisme, avec un habillage diffèrent, c’est tout. 

Et le pire est que les résultats sont les mêmes. 

Il n’y a pas de différence entre un socialisme qui prétend se préoccuper du business et de l’investissement et un socialisme qui prétend se préoccuper de produire de la demande.

Ce sont les deux faces d’une même médaille, celle d’un système dans lequel une minorité avide de  pouvoirs, de richesses, de reconnaissances féminines et masculines- et oui il faut vivre avec son temps- une nomenklatura, prétend savoir et faire mieux que ceux qui en ont fonction,  sous prétexte de collecte de suffrages. Sous prétexte de plaire et de séduire. 

Les hit-parades d’opinion, hélas, n’ont jamais garanti vérité ou efficacité. Ils garantissent en revanche le règne des évidences de court terme  les plus trompeuses, les plus coûteuses, le règne des intérêts particuliers, de l’intérêt général dévoyé. 

Réfléchissez par exemple aux résultats de nomination des anciens proches de Mitterrand, voire de Sarkozy à la tête du nucléaire français. A la tête des banques. A la tête des compagnies d’assurances. A la tête de l’industrie de l’armement. A la tête d’Air France… A la tête de la future Banque d’investissement. 

Comment un système qui repose sur un mensonge, une négation du réel pourrait-il être efficace?

Le réel, c’est le règne de l’inégalité qui fait avancer la société , qui la fait progresser, échapper à la rareté, qui fait advenir des jours meilleurs et échapper à la barbarie et l’obscurantisme. 

Comment un système bâti sur un mensonge, une dénégation originelle, pourrait-il être efficace?

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