Vue du Royaume-Uni
Marine Le Pen à la sauce anglaise
Voyage polémique ce lundi 14 mars à Lampedusa, en Sicile, pour la leader du FN qui évoquera "les problèmes liés aux flux migratoires de clandestins". Pourtant, Outre-Manche, Marine Le Pen serait plus à ranger du côté du parti conservateur que du "British national party", le parti britannique d'extrême-droite.
Les derniers sondages de Marine Le Pen suscitent l’émoi de toute la France politique. Deux sondages consécutifs la donnent à plus de 20% et déjà on entend les appels à l’annulation des primaires au PS et à la candidature unique à droite. La démocratie serait-elle en danger ?
Marine Le Pen : une "tory" britannique ?
Vus de Grande-Bretagne pourtant, Marine et le Front, débarrassé des relents d’antisémitisme, seraient au Parti conservateur. Croire qu’ils seraient l’équivalent de Nick Griffin et du British national party, qui interdisait jusqu’en 2010 aux personnes de couleur d’adhérer, est de la paresse intellectuelle.
Chez les conservateurs britanniques, il existe plusieurs courants dont un au sein duquel le Front national, version Marine, pourrait tout à fait se retrouver : le « Cornerstone group », dont la devise est « Drapeau, Foi, Famille ». Fort de 40 députés, il est présidé par Edward Leigh MP, qui est aussi, petite coïncidence, président du groupe parlementaire d’amitié franco-britannique. Très conservateurs socialement, imprégnés de religion, défenseurs intransigeants de l’État-nation, ces députés seraient toutefois peut-être un peu trop libéraux et pas assez étatistes pour le nouveau Front. Inversement, on peut se demander si les nouvelles positions tendance socialisante du Front sur le rôle de l'État ne risqueraient pas d'effaroucher Outre-Manche : « l’État fort », « l’État protecteur » et « l’État stratège » ne sont pas des slogans très populaires chez les Tories.
France vs Royaume-Uni : des divergences sur le rôle de l'État
La droite française a toujours préféré la gauche britannique, notamment à cause de ces divergences sur le rôle de l’État. Souvenons-nous de l'enthousiasme soulevé par Tony Blair lors de sa venue à l'Assemblée nationale en1998 chez les députés de droite ou de son intervention devant le Conseil national de l’UMP 10 ans plus tard. En France, Blair aurait été UMP.
Entre la France et la Grande-Bretagne tout est décalé. En France la dépendance à l’État de la société déporte le centre de gravité politique vers la gauche. L’actuel Premier ministre britannique, est un conservateur modéré et pourtant ses réformes radicales de l’État-providence le classent, selon les standards politiques français, très à droite de Nicolas Sarkozy. Le PS est à gauche du Labour et l’UMP à gauche des Tories.
L'influence de la droite conservatrice européenne
Si l’on suit ce décalage, Marine et le Front, à droite de l’UMP, seraient les interlocuteurs bien des Tories. Ils se retrouveraient sur la question de l’Europe, de l’indépendance nationale et de l’autorité de l’État ; ils divergeraient un peu sur la politique migratoire avec un Front plus à droite et, enfin, ils ne seraient pas du tout d’accord sur le libre-échange et l’interventionnisme avec un Front quasiment de gauche sur ces sujets-là. Certes, des différences politiques subsistent, mais les points communs sont néanmoins suffisamment saillants pour que le Front, version Marine, apparaisse comme un cousin du vénérable ancêtre tory.
Le Front national se transforme petit à petit, non pas en un parti de droite extrême comme le prédit Alain Minc mais en un parti de droite dure tout à fait semblable aux partis de droite conservateurs européens. Il rappelle le RPR des débuts, celui de Michel Debré et de Charles Pasqua, de Marie France Garaud et de Pierre Juillet, la légende gaulliste en moins.
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