L’Auvergne lance son "new deal" : les tops et les flops du développement économique régional <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Consommation
L’Auvergne lance son "new deal" : les tops et les flops du développement économique régional
©

Douce France

Alors que l'Auvergne lance un projet de "New Deal" pour attirer à elle des travailleurs de tous les niveaux de qualification, se pose la question du rôle des régions dans le redressement économique du pays.

Atlantico : La région Auvergne vient de lancer une grande opération nommée « New Deal en Auvergne » pour attirer les travailleurs dans cette région en voie de désertification. Alors que personne ne semble capable de prédire la fin de la crise, quel doit être le rôle de celles-ci dans l’effort économique ?

Maud Bazoche : Le principal problème de la France au niveau du développement économique régional est l’organisation quasi anarchique des collectivités territoriales, phénomène qui se complique d’année en année. La France est un gigantesque mille-feuille administratif dont chaque couche essaie de trouver sa place dans le développement économique, ce qui a tendance à compliquer l’efficacité de celui-ci. Dans l’ordre croissant, on trouve en premier lieu les intercommunalités pour lesquelles le développement économique des espaces fait partie des compétences obligatoires, les syndicats mixtes, parfois des associations regroupant ces intercommunalités, puis des organismes consulaires qui ont une vocation naturelle à cela, les conseils généraux et enfin la région puis l’Etat. L’ensemble rend les politiques de développement confuses et gène considérablement l’économie de nos régions en sapant notamment la notion de direction et en créant une superposition des responsabilités.

Il me semble que l’un des leviers fondamentaux que peuvent utiliser les régions pour améliorer leur économie est de se concentrer sur la formation supérieure et professionnelle. Les régions françaises doivent aussi et surtout faire en sorte de répondre aux exigences de leurs territoires en utilisant le potentiel de ces derniers. Je pense à la région centre dont le principal atout est l’espace incroyable dont elle bénéficie et qui ne s’en sert pas. Peut-être devrait-on utiliser de cet espace pour attirer des entreprises en mettant des terrains à leur disposition plutôt que de chasser l’activité pour y mettre des champs de blé. Nous sommes dans une période de grande précarité qui s’aggrave malgré les nombreuses politiques qui ont été tentées. Il faut à tout prix utiliser le potentiel de celles-ci en innovant dans les méthodes. Il me semble par exemple qu’il pourrait être intéressant de créer de grands ateliers publics industriels et agricoles. On pourrait y accueillir les personnes qui touchent les minima sociaux et leur offrir une formation accélérée, les relancer dans l’emploi et les sortir de l’assistanat. Celui-ci est en effet une logique qui ne permet pas de s’en sortir et qui limite les libertés. Celles-ci ne peuvent être retrouvées qu’en permettant à ces gens concernés d’apprendre un métier.

L’initiative économique des régions doit-elle être renforcée ? Doit-on leur donner une structure décisionnelle plus stable ?

Le problème de la direction des régions est fondamental dans la construction d’une politique économique viable à long terme. Elles sont effectivement dirigées par des hommes et des femmes politiques qui ont souvent tout abandonné pour leur carrière politique, ils travaillent donc plus souvent pour leur réélection que pour l’intérêt général. Apparaît donc effectivement la question d’une structure de gestion plus stable. Je crois surtout que ce qui manque foncièrement est la présence de grands philanthropes attachés aux régions comme c’était traditionnellement le cas jusque récemment. On peut citer la Famille Gaudin et la fondation du familistère de Guise. Peut-être que ce rôle là doit être repris par l’Etat et de sa représentation locale. Ce qui est certain c’est qu’il faut faire le ménage au niveau de l’attribution de la responsabilité du développement économique. Il faut que les entrepreneurs, les patrons et les autres acteurs soient confrontés à un nombre réduit de référent. Il faut que les jeunes créateurs d’entreprises soient encouragés par des prêts à très bas taux mais également qu’ils sachent à qui les demander. Il faut également être capable de regarder autour de soi. Il fut une époque à laquelle les fonctionnaires qui aspiraient à une grande carrière étaient obligés de voyager pour monter les échelons. A l’époque la structure coloniale de la France le permettait, ce n’est plus le cas aujourd’hui et il n’est pas question de remettre cela en cause. Cependant, il est envisageable d’organiser des programmes d’échanges entre des urbanistes, des responsables d’aménagement du territoire ou autres pour aérer un peu les esprits et apporter des idées nouvelles en France. Il est inconscient de laisser nos régions être dirigées par des gens qui ne sont jamais sorti de leur région ou de leur pays.

Quelles sont les régions qui ont créé une activité économique stable ayant résisté à la crise ? Celles qui n’ont pas réussi ?

Je pense à la région Nord Pas de Calais est particulièrement bien loti en la matière malgré ce que l’image qui s’y attache. Il y a par exemple de nombreuses, ruches et pépinières d’entreprise qui ont été mises en place notamment par le président du Conseil Général du Nord. L’idée a été ramenée d’Irlande et a vraiment permis de développer le tissu entrepreneuria local. Cependant, c’est une région complètement saturée par une urbanisation désordonnée qui nuit à l’activité économique. La Loire Atlantique me semble également un bon exemple de développement économique dont le projet général est centré sur la formation supérieure qui a été très encouragée. De plus, une  certaine qualité de vie est renforcée par un sentiment général démocrate chrétien qui a pu influencer la création de petite entreprise et d’entraide régionale. C’est également le cas de la proche Vendée de Monsieur De Villiers.

A l’inverse, la Région Centre est dans une situation très problématique particulièrement au niveau de l’Eure-et-Loir. Cela est notamment dû à un manque de leader pour faire avancer le développement global de la région. Les transports sont un exemple frappant. Le TGV traverse le département sans pour autant que le Maire de Chartres n’ait négocié une gare dans la ville ou dans sa périphérie. De la même manière certaines autoroutes traversent l’Eure-et-Loir sans qu’il n’y ait de sorties pour rejoindre les principales agglomérations du département. De plus, sous l’égide de la politique agricole européenne, on a transformé le département en un immense champ de blé sans même y développer d’agriculture en parallèle. Ni la moindre industrie agro-alimentaire qui aurait tout a fait eu du sens grâce à l’espace disponible et la proximité immédiate de Paris. Il n’y a presque plus d’élevage, ni d’abattoir ou de laiterie. Juste à côté le Loir-et-Cher est dans le même cas ainsi que la proche Sologne qui est essentiellement forestière mais que l’on n’exploite pas le moins du monde alors que le bois est l’une des matières premières les plus importée en France après le pétrole. C’est donc là l’exemple de l’un des grands paradoxes de la gestion des régions françaises, la création d’activité par la destruction d’activité et la sous-exploitation des potentiels.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !