Aide de la BCE à l'Espagne : pourquoi Rajoy pourrait la demander mais ne pas l'utiliser<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Aide de la BCE à l'Espagne : pourquoi Rajoy pourrait la demander mais ne pas l'utiliser
©

Ibère futé

L'Institut de la finance internationale (IIF) a incité vendredi l'Espagne à demander de l'aide à l'Europe. En début de semaine, le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, a pourtant affirmé qu'une telle demande n'était "pas indispensable" pour le moment.

Matilde Alonso Pérez et Elies Furio Blasco

Matilde Alonso Pérez et Elies Furio Blasco

Matilde Alonso Pérez est professeur à l’Université de Lyon 2. Elle est spécialiste en économie de l’Espagne.

Elies Furio Blasco est professeur à l’Université de Lyon 3 et anime le projet Dimension économique de l’Espagnol, dont l’objectif est l’analyse stratégique des entreprises espagnoles internationalisées.

Voir la bio »

L’Espagne, quatrième économie de la zone euro et plongée dans la récession, tente de redresser ses comptes publics. L’effort de rigueur prévoit 150 milliards d’euros d’économies d’ici à 2014.

Malgré ces efforts, le pays a du mal à rassurer les investisseurs et fait planer le suspense d’une demande d’aide à l’Europe et à la Banque centrale européenne (BCE) via le nouveau programme d’achat de dette de pays de la zone euro en difficulté.

Ce mécanisme sera activé pour l’Espagne si elle en fait la demande officielle. Mais le gouvernement de Madrid n’envisage pas une telle demande. En ce moment, « ce n’est pas indispensable pour défendre les intérêts des Espagnols », explique Mariano Rajoy en assurant qu’il demanderait l’aide proposée « si l’Espagne en a besoin ».

La personnalité de Rajoy et la politique politicienne font prévoir qu’il faudra attendre le lendemain de la demande d’aide pour entendre Rajoy parler autrement.

L’Espagne redoute les dures conditions qui lui seraient imposées en échange et Rajoy estime que les marchés sont apaisés par l’annonce de la BCE. Le comportement du Premier ministre espagnol laisse penser qu’une réduction de la prime suffirait pour s’en sortir.

Pour Rajoy le « sauvetage virtuel » serait le meilleur scénario. Faire la demande et ne pas s’en servir auraient des avantages. La BCE interviendrait sur le marché secondaire, la prime de risque serait en forte baisse et la charge de la dette (second poste en ordre d’importance dans le budget de l’Etat en 2013 après les retraites) serait tout simplement « liquidée ».

Le sauvetage virtuel épargnerait le gouvernement de Rajoy d’une situation à la grecque : les ajustements à répétition, les demandes de délai supplémentaire, les doutes sur le versement des tranches d’aide… Si Rajoy devait faire de nouveaux ajustements, les Communautés autonomes seraient les candidates à les mettre en route et cela entraînerait de nombreux inconvénients économiques, sociaux et politiques.

D’abord, il n’y a plus tellement de marge économique. Pour mémoire, 9 régions sur 17 largement déficitaires et endettées ont déjà demandé de l’argent au Fonds national de liquidité (FLA). A titre d’exemple pour comprendre la fragilité des régions, une partie de l’administration de Valence, une communauté autonome très lourdement endettée, a subi le 30 octobre une coupure électricité pour non-paiement des factures.

Les rues de principales villes espagnoles sont le théâtre d’importantes manifestations contre la rigueur du gouvernement. Les citoyens perçoivent l’ajustement très inégal. Les élus du parlement régional de Madrid payent le repas de leur « cantine » 3,55 euros, alors que le prix de la restauration scolaire à Madrid est de 4,80 euros (3,80 euros si l’enfant mange à l’école un repas préparé à la maison).

Les conséquences politiques sont également embarrassantes. Le parti de Rajoy a sauvé la Galice où le Parti populaire (PP) a remporté les dernières élections du 22 octobre. Cependant, il a assisté le même jour à une perte importante de voix au Pays basque. Les prévisions en Catalogne, où les élections du Parlement sont prévues pour le 25 novembre, sont très médiocres pour les populaires. Face à la poussée indépendantiste catalane, le parti de Rajoy sera rudement mis à l’épreuve. Et les problèmes de Rajoy avec les régions dépassent le Pays basque et la Catalogne. Même les présidents régionaux populaires commencent à douter des mesures du gouvernement.

Par ailleurs, le compromis trouvé en Europe sur la mise en place d’une supervision bancaire en zone euro prendra plus de temps que prévu. L’Espagne voit l’espoir d’une recapitalisation directe des banques par le MES s’éloigner. Les doutes sur l’application des accords en Europe sont un risque pour Rajoy.

Le sauvetage virtuel constitue également un risque impressionnant sauf si l’Espagne parvient à améliorer ses perspectives économiques. Les déclarations de la ministre de l'Emploi et de la sécurité sociale, Fatima Bañez, sur la récupération économique alors que le chômage a encore grimpé (25,8%), laissent penser que la chute du prochain trimestre sera moins violente. Pour Rajoy, la récupération de la croissance économique est l’atout décisif pour préparer les prochaines échéances électorales.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !