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François Hollande : fin des Grands soirs, bonjour les petits matins blêmes
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Gueule de bois

Le président de la République a des réveils difficiles. La France aussi.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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C’est un poème célèbre de Prévert. Son titre : « La promenade de Picasso ». Il raconte les tourments d’un peintre, pas très doué mais plein de bonne volonté, qui essaie de peindre une pomme. Et il se termine comme suit :

« Le peintre arraché à ses songes / Comme une dent / Se retrouve tout seul devant sa toile inachevée/ Avec au beau milieu de sa vaisselle brisée/ Les terrifiants pépins de la réalité »

François Hollande ressemble à ce peintre. Et comme lui, il découvre (ou affecte de découvrir) les terrifiants pépins de la réalité. Comme lui il fait ce qu’il peut, c’est à dire pas grand-chose ou rien. Le problème, c’est qu’il avait fait croire qu’il pouvait beaucoup et certains (plus désespérés que d’autres), on, en l’entendant, cru qu’il pouvait tout. Lionel Jospin avait dit : « L’Etat ne peut pas tout », il a perdu les élections. François Hollande a dit le contraire, il a gagné les élections.

On ne fera pas ici le procès des promesses non tenues et des annonces sans lendemain. Sans doute le président de la République ne pouvait-il faire autrement que de renoncer et de manger son chapeau. Et sans doute que, contraint et forcé par les terrifiants pépins de la réalité, il n’avait pas d’autre choix. Mais quand même ! Comment ne pas se souvenir des accents lyriques, voire révolutionnaires, de sa campagne électorale et des premières semaines de son pouvoir.

« Mon ennemi c’est la finance ! » s’était-il exclamé. Non, non il ne le répéterait plus aujourd’hui… « Il y aura une loi contre les licenciements boursiers », avait-il déclaré, remplissant d’espoir des milliers d’ouvriers et d’employés. Non, non il n’y aura pas de loi contre les licenciements boursiers… « La fermeture d’Aulnay-Sous-Bois  est inacceptable » avait-il renchéri. Il l’accepte évidemment aujourd’hui… Jamais, avait-il dit, il ne signerait en l’état le Traité Budgétaire Européen. Bien sûr qu’il l’a signé…

Jean-Luc Mélenchon, qui a le sens de la formule, a dit de François Hollande, avec une morgue on ne peut plus condescendante : « C’est un brave homme ». Il n’a pas dit : « C’est un homme brave ». Tout est dit. Et tout est là. La crise est la crise (enfin elle est devenue la crise car pendant la campagne la seule crise c’était, dans la bouche de François Hollande, Nicolas Sarkozy). Et François Hollande est bien obligé d’en prendre la mesure. Au demeurant, il n’y a là ni crime ni délit. Mais pour le moins une tragique faute morale. Un désastre qui pèsera peut être plus lourd que nos milliards de déficit. Car quand on s’improvise marchand de rêves et que les rayons de son magasin sont honteusement vides, les pauvres gens, les gens pauvres en restent durablement blessés.

C’est que François Hollande a pendant sa campagne trouvé des accents et des tonalités qui faisaient entendre la musique et les frissons du Grand Soir. Quand tout irait mieux, quand la lumière de gauche aurait dissipé les ténèbres sarkozyens. Et au réveil pas de Grand Soir. Juste les petits matins blêmes, les aubes blafardes propices aux exécutions. Dans la tradition guillotinière française, on accordait aux condamnés à mort une dernière cigarette. Et bien il n’y aura même pas ça ! Le gouvernement de Hollande vient d’augmenter les prix des cigarettes et annonce qui les augmentera encore…

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