L’Espagne va-t-elle connaître la lumière au bout du tunnel ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Pour régler le problème de liquidité, l’austérité budgétaire suffit : réduction des dépenses, hausse généralisée des impôts…
Pour régler le problème de liquidité, l’austérité budgétaire suffit : réduction des dépenses, hausse généralisée des impôts…
©

Sortie de crise

L'Espagne serait sur le point de demander une aide globale à l'Union européenne. Cette probabilité oblige à se poser la question des conséquences d’une aide financière assortie d’un programme d’ajustement.

Matilde Alonso Pérez et Elies Furio Blasco

Matilde Alonso Pérez et Elies Furio Blasco

Matilde Alonso Pérez est professeur à l’Université de Lyon 2. Elle est spécialiste en économie de l’Espagne.

Elies Furio Blasco est professeur à l’Université de Lyon 3 et anime le projet Dimension économique de l’Espagnol, dont l’objectif est l’analyse stratégique des entreprises espagnoles internationalisées.

Voir la bio »

L’expérience de la région latino-américaine des décennies 80 et 90 du XXème siècle illustre les effets de la mise en place d’un sauvetage financier. L’Amérique latine était à l’époque confrontée à un grave problème de dette externe. Pour y faire face se sont succédé autant des programmes d’ajustement structurel que des diagnostics de la crise. Il s’avérait nécessaire de savoir s’il s’agissait d’une crise de liquidité ou bien d’une crise de solvabilité et de perte de confiance.

Chacune de ces deux possibilités demandait une réponse différente. Pour faire face à une crise de liquidité, un ajustement rapide et profond conviendrait. La crise de solvabilité exigerait tenir compte de la dette mais également de la capacité de paiement laquelle va dépendre de la capacité de l’économie à générer des revenus, autrement dit, de la croissance économique.

Une partie des analyses du cas espagnol sont focalisées sur le problème bien réel de la liquidité de la dette. Cependant un autre problème peut surgir et être stratégique pour l’économie espagnole.

La liquidité d'un marché financier représente la capacité à acheter ou à vendre rapidement les actifs qui y sont cotés sans que cela ait d'effet majeur sur les prix. L’Espagne emprunte à des taux élevés et le prix des obligations d’État ne cesse de chuter. Cette incidence sur le prix de l’actif est en rapport avec la réduction de la liquidité du marché. Voilà pourquoi les décisions de la Banque centrale européenne d’intervenir sur le marché obligataire donnent de la liquidité et stabilisent les prix.

Pour régler le problème de liquidité, l’austérité budgétaire suffit : réduction des dépenses, hausse généralisée des impôts… Car une façon d’éliminer un problème de liquidité d’un marché consiste à faire disparaître le marché, cela passe par une réduction de la dette publique espagnole et des émissions d’obligations d’État.

Cette solution entraîne deux problèmes. D’abord, les ajustements ont créé de tensions sociales. Les syndicats semblent décidés à jouer la carte de la mobilisation. Ensuite, les tensions politiques sont de plus en plus pesantes. Si le gouvernement de Rajoy dispose d’une large majorité parlementaire et régionale, la stabilité politique dépend aussi d’autres variables et Barcelone vient d’écrire un nouveau scénario politique. Le président de la Generalitat a demandé un « pacte fiscal », la souveraineté fiscale, à Madrid et la création d’une structure d’État. Le gouvernement de Rajoy, pour sa part, fait appel à la Constitution et au statu quo et ignore le défilé de Barcelone, une marée humaine d’un million et demi de manifestants, accusant Madrid d'avoir plongé la région dans une crise fiscale et réclamant l’indépendance de la Catalogne.

Par ailleurs, résoudre l’équation de la liquidité accroit l’insolvabilité. Le problème de solvabilité touche le secteur public, les banques et le secteur privé. Pour garantir la solvabilité, les réformes devraient être à long terme, peu agressives et capables de rendre compatibles la réduction de la dette et la reprise de la croissance économique. Seule la croissance permet d’envisager une augmentation des revenus publics et privés capables de solder la dette.

Résoudre la solvabilité laisse tout de même planer un doute, celui de l’aléa moral, un effet pervers qui peut apparaître dans certaines situations de risque. Si le comportement imprudent de l’Espagne venait à « être compris » et si l’Espagne était épargnée d’un sauvetage strict, comment avoir l’assurance qu’elle ne recommencerait plus ? Un début de réponse vient des réformes institutionnelles telles que la supervision bancaire au niveau de l’Union européenne.

Si l’Espagne demande un sauvetage global et qu’elle est soumise à une conditionnalité sévère, on aura fait face au problème de la liquidité, partiellement à la question de l’aléa moral, mais on gardera le problème de l’insolvabilité. Une question qui va peut-être revenir en force.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !