Si l’amour et le désir deviennent les seules justifications du mariage, comment construire les normes sociales à l'avenir ?<!-- --> | Atlantico.fr
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"Curieusement, alors que le mariage est en perte de vitesse (...) la revendication en faveur du mariage homosexuel se fait plus pressante", constate Albert C. Querfiniec
"Curieusement, alors que le mariage est en perte de vitesse (...) la revendication en faveur du mariage homosexuel se fait  plus pressante", constate Albert C. Querfiniec
©Reuters

Ils se sont dits oui

Le projet de loi sur le mariage gay et l'homoparentalité devrait être adopté en 2013. Le débat actuel revient pour peu sur les conséquences sociales et psychologiques de ce brouillage des repères traditionnels.

Albert C.  Querfiniec

Albert C. Querfiniec

Albert C. Querfiniec est journaliste. Il écrit pour Atlantico sous pseudonyme.

 

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Le peuple de gauche a tendance à appréhender l’Histoire (et à l’enseigner, s’agissant de la majorité des professeurs de collège ou lycée) comme une suite de conquêtes sociales et de droits nouveaux, témoignant d’une « longue marche », inexorablement victorieuse, vers le Progrès. La caisse de résonance médiatique pose le débat sur le mariage homosexuel en termes simples, voire simplistes : « Etes-vous pour ou contre un supplément de libertés individuelles et une véritable égalité des droits pour tous ? »

La reconnaissance du mariage homosexuel est un « marqueur » de gauche, qui fait partie des engagements de campagne de François Hollande, dont l’application ne grèvera pas les budgets publics et qui témoigne d’un optimisme foncier sur le « mieux vivre ensemble ».

Cette  reconnaissance permettra-t-elle de « réenchanter » le rêve français ?

Comme le remarque en substance le Docteur Jean-Paul Mialet, psychiatre et neuro-psychologue, et auteur de « Sex aequo » publié chez Albin Michel, c’est la sacralisation du désir s’exprimant ici et maintenant qui tend à prévaloir sur toute autre considération.

A vrai dire, nul ne sait quelles seront, à long terme, les conséquences sociales, psychologiques de ce brouillage des repères traditionnels, quel en sera l’impact sur une institution familiale déjà passablement mise à mal. Dans un pays où, dans le prolongement des dérives post soixante-huitardes, on ne croit plus à grand-chose, il est tout à fait logique que l’on s’en prenne à ce qui reste du lien matrimonial traditionnel. Le principe de précaution, qui a désormais valeur constitutionnelle, ne pourrait-il pas, en l’occurrence s’appliquer ?

Les homosexuels vivent-ils donc si mal leur condition pour avoir besoin d’apparaitre comme des couples classiques, inscrits sur des registres ? Dans ce cas, mieux vaudrait, peut-être, débattre de la difficulté, pour le gai ordinaire, d’assumer son homosexualité.

Au-delà de cette question du mariage, on voit poindre la revendication de progéniture.

Dans ce débat, on voudrait nous présenter l’enfant à naître comme un « droit », un avantage en nature lié à la condition de couple ;  on se marie et on aurait « droit » à former un foyer fiscal unique avec deux parts au titre de l’impôt sur le revenu, on aurait « droit » à recevoir un livret de famille en mairie, on pourrait toucher des allocations diverses et variées, on disposerait aussi d’une couverture médicale pour l’ensemble de la famille, et le fait d’avoir un enfant ferait aussi partie de ces « droits ». Quelle opinion se fait-on alors de l’existence, de l’identité, de l’autonomie et de la dignité de la personne à naître ?

Le « droit » à l’adoption pour les couples homosexuels, s’il est entériné, ne fait-il pas peu de cas de l’avis et de la vie des enfants ? Il y a beaucoup de malveillance et de cruauté dans les cours de récréation. Et quel avenir réservera-t-on à des enfants privés, pendant des années si importantes pour leur construction personnelle, de la présence structurante d’un représentant de chaque sexe ?

On nous dit : « Ce qui compte, c’est qu’il y ait de l’amour au sein du couple. Mieux vaut deux homosexuels formant un ménage paisible et heureux qu’un couple hétéro en situation de conflit ou de crise. ». Le mariage serait-il donc simplement la reconnaissance officielle d’un amour sincère, ou bien s’agit-il aussi d’autre chose ? En effet, si l’approche est purement affective, si, seules comptent  la qualité et l’intensité des sentiments, où placer le curseur ? Et d’ailleurs, doit-il y avoir une limite ? Le Cardinal Philippe Barbarin s’est pris une volée de bois vert avec sa remarque sur la polygamie et  l’inceste. Mais réfléchissons-y bien : si le mariage consiste simplement à prendre acte d’une relation dans laquelle il y a un réel attachement et beaucoup d’amour fusionnel, on peut imaginer de nombreuses variantes, toutes sortes de pratiques conjugales ou sexuelles, paraissant aujourd’hui hors normes et qui pourraient revendiquer, un jour, droit de cité. Après tout, les mœurs évoluent ! L’hypothèse même du mariage homosexuel n’aurait pas été abordée dans les débats publics il y a quarante ou cinquante ans. Est-on dans le domaine du relatif, du fluctuant ou dans celui des principes et des normes sociales?

Lisons, ou relisons, par exemple, la pièce de théâtre « La chèvre » d’Edward Albee !

Et à partir du moment où le mariage homosexuel sera célébré sous les ors des palais officiels, de quel droit interdire à ces couples la procréation médicalement assistée ou la gestation pour autrui? Pourquoi le droit d’enfanter continuerait-il à faire l’objet d’une aussi patente et injuste discrimination?

En matière de droits (fiscalité, héritage..), le pacs fournit déjà un cadre juridique approprié qui séduit même de nombreux couples hétérosexuels.

Curieusement, alors que le mariage est en perte de vitesse, qu’on se marie plus tard (quand on le fait), et que quarante cinq pour cent de ces unions débouchent  sur un divorce, la revendication en faveur du mariage homosexuel se fait  plus pressante, moins, d’ailleurs de la part des individus concernés eux-mêmes que des associations dites « représentatives » ; étrange époque où beaucoup de couples depuis les jeunes encore sur les bancs de la faculté  jusqu’au sommet de l’Etat se contentent d’être des couples de fait, et où  la bien-pensance ambiante, relayée par de puissantes campagnes de presse, veut, toutes affaires cessantes et à tout prix, marier (même quand ils ne demandent rien) deux catégories de gens : les homosexuels d’une part et les prêtres de l’autre !

N’y a-t-il rien de plus urgent à faire ?...

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