Starbucks, avec sa nouvelle machine, va-t-il reléguer Nespresso en division 2 ?<!-- --> | Atlantico.fr
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La chaîne Starbucks a lancé ce jeudi sa propre cafetière.
La chaîne Starbucks a lancé ce jeudi sa propre cafetière.
©Reuters

C'est fort de café

La chaîne Starbucks a lancé ce jeudi une cafetière censée concurrencer la célèbre Nespresso. Saveurs, prix, format propriétaire, environnement : le consommateur est-il le gagnant de cette nouvelle guerre commerciale ?

Ludovic Durand

Ludovic Durand

Ludovic Durand est le responsable de Chacunsoncafe.fr, un site spécialisé dans l'expresso "libre", avec pour objectif de faire redécouvrir la saveur et le plaisir d'un café expresso tout en proposant des solutions économiques et durables.

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Un marché qui attise les convoitises

Si l'on parle uniquement de celui du café portionné, celui-ci est encore modeste : 4% en valeur de la consommation mondiale de café mais 8% de la valeur ! Cependant en Europe, le café en dosettes capte entre 20 à 40% en valeur des ventes de café moulu (13 milliards € par an).

Côté machines, là où le secteur des cafetières filtre recule de 2%, celui des machines expresso progresse de 6%.  Mieux encore, la progression des machines à capsules est estimée à 12% par an jusqu'en 2015 et 8% au-delà (11 millions d'unités estimées en 2025 en Europe). La vente de dosettes sur le créneau de l'expresso offre ainsi de belles perspectives dans la plupart des pays développés avec des marges à l'avenant.

Un réseau de distribution tentaculaire

En apparence, le coup porté est rude, Starbucks™ fait l'effet d'un mastodonte, avec un chiffre d'affaires 2011 3,5 fois plus important que celui de Nespresso™.

Il peut s'appuyer sur un réseau de distribution physique maîtrisé et solide (20 000 magasins dans 60 pays - près de 80 en France), lui permettant de multiplier les contacts avec de nouveaux clients potentiels pour cette offre et de faire goûter tous les produits sans contrainte (contre 270 boutiques Nespresso™ et un réseau éclaté pour ses machines).

La promesse de la variété

La principale innovation proposée avec le système Starbucks™ c'est la variété supposée.

Face au système Nespresso™ centré sur le café à l'italienne (moins de 20 saveurs), Starbucks™ souhaite imposer la consommation d'une vaste gamme de produits issue de son savoir-faire (frappuccino, utilisation de sirops, boissons gourmandes). Ceci laisse envisager une conquête rapide des aficionados Starbucks™ (plus de 400 clients par jour par magasin) tout en séduisant les consommateurs intéressés par l'acquisition d'une machine à dosettes qui y verront un usage moins limité que Nespresso™.

Voilà pour la théorie, en pratique beaucoup de points sont sujets à caution.

Un tarif plus attractif que Nespresso™ ?

Une capsule Starbucks™ = 0,41€. En facial, c'est plus que Nespresso™, mais le dosage étant différent (argument Starbucks™), un 1kg de café Starbucks™ vous reviendra à 52 euros, contre environ 70€/kg pour celui estampillé Nespresso™.

Sauf qu'à l'usage, vous consommez une capsule pour une boisson, 2 même dans le cas d'un latte. Argument irrecevable = aucune économie avec la Verismo™ (ni sur la machine, ni sur les capsules).

Un coffee-shop n'est pas un point de vente

La force et l'efficacité supposées du réseau de distribution de Starbucks™ restent à prouver.

Sur son propre réseau, le passage entre la vente d'un café et celui d'une pièce d'électroménager laisse dubitatif, tant en terme de qualité que de synergie. En France, en 2008, 11% des ventes de machines expresso ont été faites sur Internet (contre +60% dans les hypers et hypers spécialisés). Starbucks™ va devoir batailler dur pour obtenir la même exposition que Nespresso™ et ses nombreux fabricants, vieux routiers de la distribution (Magimix, Krups...).

Un SAV sans expérience

Assurer le SAV sur de l'électroménager ne s'improvise pas. Starbucks™ n'a pas d'expérience dans le domaine et il semble peut probable que ses salons de café soient le lieu approprié.

La vente de capsules ne peut être portée que par la vente de machines et le service client associé. Un manque de référentiel difficile à surmonter.

Paroles, paroles...

Variété, c'est donc la promesse de Starbucks™. Sauf que pour son lancement, la Verismo™ ne présente que 5 cafés et 1 latte... A côté, Nespresso™ fait figure d'Eldorado.

De plus, si le tarif par capsule suggère effectivement un positionnement de type luxe, ni l'offre de café ainsi présentée, ni l'offre de machine (1 modèle unique / 4 couleurs aux US) ne corroborent ce positionnement.

Chez Nespresso™ il y en a pour tous les goûts et toutes les bourses. Cela peut faire la blague sur le marché nord-américain, où Nespresso™ avance à pas de velours, mais en Europe...

Un manque de référentiel familial

En Europe, Nespresso™ jouissait de l'image de Nestlé, figure de l'agroalimentaire, qui faisait partie du quotidien de millions de consommateurs. La pénétration de son offre au sein des foyers s'en est trouvée facilitée, la marque pouvant se reposer sur l'aura des autres produits du groupe. Starbucks™ ne peut y prétendre, elle reste une enseigne de salons de café (population active, jeune et urbaine). Un père de famille quadra se verra-t-il offrir une Verismo™ à Noël ? Rien n'est moins sûr.

Innovation 0 sur l'environnement

Tout comme pour la Nespresso™, la Verismo™ ne vous propose rien de mieux en terme de déchet. Un emballage capsule, pas de solution de recyclage.

Sur la machine, on peut également avoir des doutes sur sa longévité, à 149 €, un prix ne laissant pas envisager une qualité haut de gamme des matériaux utilisés. Sa pompe pressera-t-elle durablement les 8g de cafés de chaque capsule pour proposer un café de qualité ? SAV ?

Un client toujours vache à lait

Le système propriétaire mis en place par Nespresso™ a fait un émule. C'est une défaite pour les amateurs de goût.

La pseudo bonne affaire popularisée par la marque Suisse est en effet reprise par Starbucks™ : une machine peu chère à l'achat, un coût à l'usage exorbitant sans alternative possible. Lorsque comme nous, on est un puriste de l'expresso, le rapport qualité/prix fait bondir (voir notre comparatif sur le sujet).

Beaucoup de bruit pour rien ?

Au final la Verismo™ ne semble pas taillée pour le marché mondial. Une approche quantitative pour défendre sa capsule et son tarif, peu pertinente lorsqu'on sait que la qualité du café produit ne dépend en rien de celle-ci.

Une variété à confirmer pour laquelle l'intérêt reste à prouver, les habitudes de consommation étant largement différentes selon les pays.
Et surtout, l'engagement de Starbucks™ sur un marché de l'électroménager sans expérience ni référence.

La compréhension culturelle des habitudes de consommation n'est toujours pas le point fort de Starbucks™ (fermetures massives en Australie en 2008, difficulté à appréhender le marché indien).

La copie rendue est bien moins alléchante que celle du Suisse. Il suffirait à Nespresso™ d'investir le segment de saveurs étendues pour renvoyer Starbucks™ à ses frappuccinos, ce qui semble largement à sa portée.

Starbucks™ mise probablement plus sur le marché nord-américain. L'amateur de goût lui n'y a rien gagné.

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