Les vraies bonnes raisons (non-fiscales) d'aller s’installer en Belgique

Assez curieusement, les Belges ont peu défendu leur image dans les polémiques qui entourent les projets d’évasion fiscale de quelques riches Français. Et c’est bien dommage : d’imposture historique née du Congrès de Vienne, la Belgique se transforme petit à petit en pays par défaut où l’on s’installe seulement pour échapper au reste du monde.

Or, il existe de nombreuses bonnes raisons, des raisons positives, de franchir la frontière, et il m’a semblé qu’une œuvre de justice s’imposait pour redire aux Français qu’ils peuvent émigrer en Belgique même s’ils ne payent pas l’impôt sur la fortune.

L’autoroute du Soleil, en Belgique, n’est pas payante !

Vous en avez assez de payer une fortune pour descendre dans le Sud ? Installez-vous en Belgique, où l’autoroute du Soleil est entièrement gratuite. Car beaucoup de Français l’ignorent, la Belgique dispose d’une autoroute du Soleil. Et en plus, ça marche (le soleil) ! Elle permet de joindre le Luxembourg à la côte belge bien connue pour son ensoleillement (d’où le nom de l’autoroute).

Au passage, on n’hésitera pas à faire quelques haltes bienfaisantes dans les Ardennes belges. Par exemple à l’abbaye d’Orval, à un jet de pierre de la France, où la bière est un délice égalé, à mon avis, par la seule Trappiste de Rochefort, elle-même fabriquée dans les Ardennes. Les amateurs n’hésiteront pas à profiter des charmantes boucles de la Semois surplombées par le château de Bouillon, dont l’un des seigneurs conduisit la première Croisade. Ou encore des collines de Spa, qui regorgent de sources vivifiantes cachées dans les bois.

Les fruits de mer sont deux fois moins chers qu’en France !

Au bout de l’autoroute du Soleil, ne pas manquer de s’arrêter à Ostende où les petites échoppes de fruits de mer sur le port de pêche sont un délice à prix cassé. C’est l’occasion de manger les fameux Maatjes vinaigrés, ou les roll-mops. Les amateurs noteront que les restaurants du port offrent du baby-homard canadien à des prix qui font rêver les Français. Certes, il est moins ferme que le homard breton, mais il est aussi bien moins cher...

D’une manière générale, la côte belge réserve des surprises agréables, avec de belles plages de sable fin, et des équipements beaucoup plus abordables qu’en France. À Ostende, ville de James Ensor, pour les connaisseurs, ne pas manquer de visiter le Thermae Palace, hôtel néo-classique délirant. Je recommande une visite hivernale, agrémentée d’une séance de sauna à la Villa Aqua, qui vous permettra de vous balader nu dans le jardin après un Aufguss régénérant.

Le vin belge est d’une qualité tout à fait détonante

Très peu de Français savent que les Belges produisent du vin. La Belgique dispose même d’appellations d’origine contrôlée ! Dont les côtes de Sambre et Meuse, glorieux département français après la Révolution. Pour ma part, j’ai un faible pour les vins de la province du Limbourg, proche de la Hollande, où la terre mélange les alluvions de la Meuse et le sable de la Campine.

Je garde un souvenir ému d’un Chardonnay de Genoels-Elderen, produit à Rimst, dans le pays thiois, c’est-à-dire dans les terres néerlandophones qui appartenaient jadis à la principauté de Liège. On y trouve de jolies notes d’agrumes, de fruits jaunes, une belle longueur en bouche qui accompagnent magnifiquement une belle sole ou un poisson charnu comme la daurade ou le bar.

Faites connaissance avec la responsabilité individuelle et l’esprit communal flamand

J’ai coutume de vomir le nationalisme des Flamingants, dont la tradition culturelle est tout sauf flamande. En revanche, beaucoup de Français gagneraient à s’imprégner de l’esprit des polders. Pour survivre dans ces terres gagnées sur la mer, les habitants ont toujours dû s’organiser entre eux et de façon pragmatique pour éviter que la mer ne reprenne ses droits. Le système des caisses d’entretien des canaux de drainage et des digues, sous la conduite d’un dickgraf élu, est assez bien décrit par les fonctionnaires français sous l’Empire.

Ce système ne reposait que sur l’engagement des habitants, et ne déléguait pas à l’Etat la tâche d’assurer la survie de la communauté. Chacun prenait sa part de l’effort, sinon il subissait une sanction, qui était d’abord collective. Merveilleux système allergique à toute bureaucratie et à toute réglementation inutile ou décourageante. Cette tradition explique largement la réussite économique flamande d’aujourd’hui, et l’absence d’esprit aristocratique en Belgique.

Foin de cette caste coupée des réalités, occupée à défendre ses privilèges et ses pré-carrés, foin de cet esprit qui distinguent sans cesse les petites gens que l’on méprise et les grands de ce monde devant qui l’on rampe. Les Flamands aiment l’égalité, la vraie : celle qui se fonde sur l’effort individuel pour préserver la prospérité du groupe.

Revenez aux sources de l’empire carolingien et de l’esprit républicain

Charlemagne est né près de Liège, à Herstal... Ville manufacturière par excellence. Les Liégeois aiment à fêter ce souvenir avec leur héros local, Tchantchès, marionnette truculente qui, plus encore que Guignol, incarne l’esprit frondeur et les valeurs de loyauté. Au demeurant, flânez dans les rues de Liège, depuis la Montagne de Buren qui commémore la résistance liégeoise de 1468 (un souvenir vivant dans l’esprit local!) à l’occupation bourguignonne et l’attachement populaire à la France, jusqu’aux ruelles de la république libre d’Outremeuse. Allez-y en octobre, au moment de la Grande Foire, ou le 14 juillet, jour du défilé des grognards et du feu d’artifice qui rappelle que la ville se souleva contre les Autrichiens dès 1789 !

En un mot, n’allez pas en Belgique pour vivoter dans une banlieue ennuyeuse de Bruxelles, au milieu de Français décadents. Allez en Belgique pour retrouver ce qu’était la France d’avant...