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Victoire en trompe l'œil des libéraux aux Pays-Bas : la Hollande est moins "europhobe", mais toujours pas "europhile"...
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La fin du populisme ?

Le Parti libéral (VVD) et le Parti travailliste (PvdA) sont arrivés largement en tête des élections législatives aux Pays-Bas. Le Parti de la liberté (PVV) de Geert Wilders, qui milite pour une sortie de l'Union européenne, devrait quant à lui perdre le tiers de ses sièges.

Christophe de Voogd

Christophe de Voogd

Christophe de Voogd est historien, spécialiste des Pays-Bas, président du Conseil scientifique et d'évaluation de la Fondation pour l'innovation politique. 

Il est l'auteur de Histoire des Pays-Bas des origines à nos jours, chez Fayard. Il est aussi l'un des auteurs de l'ouvrage collectif, 50 matinales pour réveiller la France.
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Atlantico : Les partis néerlandais favorables aux politiques de rigueur dans la zone euro sont arrivés mercredi largement en tête des élections législatives aux Pays-Bas, le Parti libéral (VVD) du Premier ministre sortant Mark Rutte étant crédité d'un siège d'avance sur le Parti travailliste (PvdA). Le Parti de la liberté (PVV) de Geert Wilders, hostile à l'immigration et qui milite pour une sortie de l'Union européenne, pourrait quant à lui perdre le tiers de ses sièges. Comment  expliquez-vous ce recul de l’extrême droite ?

Christophe de Voogd: La situation économique des Pays-Bas est bien meilleure que celle de la France. Même si la crise existe aussi, la balance commerciale du pays est excédentaire, le chômage ne dépasse pas les 6% et le déficit budgétaire se réduit. Le contexte, très différent de celui du Sud de l'Europe, est plus favorable aux partis de gouvernement.

Par ailleurs, Geert Wilders a commis une erreur stratégique en présentant les élections comme un référendum sur l'Europe. S'il y a un sentiment anti-européen aux Pays-Bas, l'aventure de l'abandon de l'euro apparaît aussi comme un pari risqué. Les Hollandais savent compter et se rendent compte qu'ils sont un grand pays exportateur (la Hollande est le sixième exportateur mondial). Leur balance commerciale est notamment très excédentaire avec les pays de l'Euroland. Tout éclatement de la zone euro aurait donc des conséquences économiques très néfastes sur les Pays-Bas. Par ailleurs, quoi qu'ils pensent sur l'Europe, les Pays-Bas ont tout intérêt à préserver la zone euro.

Les Pays-Bas  avaient voté «  Non » au référendum sur le traité européen en 2005, est-ce vraiment la fin de l’ "euroscepticisme" aux Pays-Bas ?

Il faut nuancer et être prudent. Il s'agit d'une défaite des partis anti-européens plus que d'une victoire des partis pro-européens. Il n' y a pas d'europhilie. La tonalité d'ensemble reste méfiante vis-à-vis de l'Europe, notamment vis-à-vis des transferts de souveraineté et des transferts financiers vers les pays du Sud.

Le parti libéral, qui est arrivé en tête des élections, a un agenda qui chez nous serait qualifié d' "eurosceptique". Il propose notamment l'arrêt des transferts de souveraineté et la sortie de l'Europe des pays qui ne respectent pas les règles aussi bien pour la zone euro que pour l'espace Schengen. Enfin, il prône le renforcement du contrôle national sur les décisions européennes.

Le parti travailliste arrivé en deuxième position a, en revanche, un discours plus positif et est partisan de plus d'intégration européenne. A une condition, que le contrôle démocratique soit renforcé.

Le Parti libéral et le Parti travailliste vont former une coalition pour appliquer des politiques d’austérité. N’est-ce pas la porte ouverte à un retour encore plus spectaculaire des populismes dans quelques années ?

L'historien que je suis est plus spécialiste du passé que de l'avenir. Mais, l'accord entre les deux grands partis va prendre beaucoup de temps car ils sont quasiment à égalité. Le Parti travailliste, qui est arrivé juste derrière, peut avoir des exigences très fortes sur le programme et les postes ministériels. D'autre part, le processus de nomination du Premier ministre a changé. Autrefois, c'est la reine qui avait l'initiative, aujourd'hui c'est le parlement. Les négociations risquent donc d'être encore plus compliquées que prévues.Cela peut durer des semaines, voire des mois.

Le Parti libéral arrivé en tête est hostile à une politique de relance en Europe voulue par la France et les pays du Sud. Est-ce vraiment une bonne nouvelle pour la construction européenne ?   

Il y avait un danger populiste de gauche et de droite extrêmement fort. Leur défaite est plutôt un point positif pour l'Europe. Mais attention à ne pas crier trop vite victoire. Les Pays-Bas restent sur une position très vigilante vis-à-vis de l'Europe. Avec l'Allemagne, pour ce qui est des déficits budgétaires, ils seront intransigeants. La victoire de l'actuel Premier ministre s'est aussi faite sur le mot d'ordre suivant : " Pas un centime de plus pour la Grèce ! "

Propos recueillis par Alexandre Devecchio

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