Intouchable : la convention démocrate dope Obama dans les sondages malgré un bilan économique très médiocre<!-- --> | Atlantico.fr
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Selon la dernière enquête CNN-Opinion Research,Barack Obama est crédité de 52% d'intentions de vote, contre 46% pour Mitt Romney.
Selon la dernière enquête CNN-Opinion Research,Barack Obama est crédité de 52% d'intentions de vote, contre 46% pour Mitt Romney.
©Reuters

Trans Amérique Express

Malgré l'accumulation de mauvaises statistiques économiques, Barack Obama semble avoir profité dans l'opinion des effets de la convention du parti démocrate la semaine dernière. Selon un sondage de CNN, il devance désormais Mitt Romney de 6 points (52-46).

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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Trois jours après la publication des dernières statistiques économiques américaines, faisant état d’une croissance anémique et d’un chômage persistant, les derniers sondages de la campagne présidentielle sont tombés ! On aurait pu s’attendre à ce qu’ils soient défavorables à Barack Obama. C’est l’inverse ! Le président sortant gagne des points !

Une surprise qui a plusieurs explications. Un, il bénéficie du coup de pouce de la convention démocrate. Deux, Romney ne parvient pas à "décoller". Trois, il règne autour de sa réélection comme un air d’inévitabilité.  

En effet, compte tenu de la situation économique américaine la véritable surprise de la campagne présidentielle n’est pas qu’elle soit indécise, c’est qu’Obama soit encore dans le coup. D’autres auraient déjà sombré. Aucun président n’a été réélu avec un tel bilan depuis Roosevelt.

D’abord les chiffres. Le chômage aux Etats-Unis a baissé de 8,3%  à 8,1% en août. Bonne nouvelle ? Pas vraiment. Ce recul de 0,2% ne résulte pas de la création d’emplois – moins de cent mille ont été créés au mois d’août, contre cent-trente mille attendus  – mais de la baisse de la population active. Plus de 350 000 personnes sont sorties des statistiques du chômage. Sans pour autant avoir trouvé un emploi. Ils sont partis par l’autre porte. La mauvaise. Celle de la résignation. Ils ont cessé de chercher. N’étant plus inscrits, ils ne font plus partie de la population considérée comme active.  

Le Wall Street Journal estime à huit millions le nombre d’Américains qui ont ainsi quitté la population active depuis le début de la crise. Selon le site Bloomberg,si l’ensemble des personnes qui avaient un emploi en 2007, soit avant le début de la « Grande Récession », était pris en compte, le chômage serait de 11,6% aux Etats-Unis. Plus élevé qu’en France !

Au lieu de cela, le taux de chômage s’inscrit juste au-dessus de 8% pour le 43 ème mois consécutif. Il a passé cette barre en février 2009 – au lendemain de l’investiture de Barack Obama – et n’est jamais retombé dessous depuis.

La croissance américaine au second trimestre s’est établie à 1,7%. Aucune amélioration n’est attendue pour la seconde moitié de l’année. Alors que pour faire sensiblement reculer le chômage, les Etats-Unis auraient besoin d’une croissance de 4% et de la création de trois cent soixante-dix mille emplois par mois ! Et cela pendant plusieurs années…

Sachant que l’économie est la préoccupation prioritaire des Américains, on aurait pu s’attendre à voir la côte de Barack Obama subir le contrecoup de ces chiffres et tomber. C’est l’inverse qui s’est produit. Elle a grimpé de trois à cinq points. Au 10 septembre les instituts de sondage Gallup et Rasmussen donnent cinq points d’avance au président (50% contre 45%  et 49% contre 44%). Une semaine plus tôt ils donnaient les deux candidats à égalité (46-46). CNN lui donne six points d’avance, 52% contre 46%. Investor’s Business Daily ne lui en donne que deux, 46% contre 44%.

Ce petit bond en avant a plusieurs explications. La première tient à l’effet de la convention démocrate. Le rassemblement des démocrates à Charlotte en Caroline du Nord leur a permis d’occuper les écrans de télévision pendant trois soirées consécutives. Les discours de Michelle Obama et de Bill Clinton ont été bien reçus. Mieux d’ailleurs que celui d’Obama lui-même, jugé par certains de ses propres partisans comme terne et sans imagination.  Dénué de la "magie"  qui avait marqué les esprits en 2004 et 2008.

Les candidats bénéficient toujours de ces grandes messes politiques. 2012 ne fait pas exception. Le bond observé demeure cependant modeste. En 1992, Bill Clinton avait gagné près de 15 points à l’issue de la convention démocrate. Jimmy Carter en avait gagnés 12 en 1980 et Al Gore huit en 2000. Ce qui n’avait pas empêché ces deux derniers candidats de perdre en novembre… 

La seconde explication tient aux difficultés de la campagne de Mitt Romney. Le candidat républicain ne parvient pas à capitaliser sur les faiblesses de son adversaire. Malgré l’effet positif de la convention républicaine, fin août, sa propre côte ne "décolle" pas.

Mitt Romney n’a pas su crée ce lien personnel et quasi sentimental avec les électeurs, si important pour les scrutins présidentiels. Dans son camp les critiques fusent pour avoir choisi de céder la tribune à Clint Eastwood, à une heure de grande écoute, durant la convention, plutôt que de diffuser un film biographique préparé par sa campagne pour justement tisser ce lien personnel et "humaniser"  son personnage.

Mitt Romney ne parvient pas non plus à marteler un message unique et clair. Ce week-end, plutôt que de revenir sur le chômage et sur son "plan pour créer douze millions d’emplois", il a choisi de parler de la place de Dieu, dans sa vie et dans la vie américaine. Un message important pour sa base conservatrice, mais qui n’est pas susceptible de lui rallier les électeurs indépendants dont il aura besoin le 6 novembre.

La troisième explication, tient à une notion totalement irrationnelle, celle du "capital sympathie" accumulé par le président sortant. Un capital qui lui procure une quasi immunité électorale. 

Selon cette analyse le président Obama est une sorte de président "téflon", du nom de ce revêtement sur lequel tout glisse et rien ne pénètre. Avec pour résultat que sa côte est insensible aux aléas de la conjoncture. Ainsi, les Américains auraient absous leur président de toute culpabilité dans la crise qu’ils traversent. Ils savent que la responsabilité ne lui en incombe pas. Elle incombe à ses prédécesseurs depuis plusieurs décennies. Et même si ses prescriptions pour en sortir ne rencontrent pas le succès espéré, elles valent mieux que le choc économique et social promis par les républicains…

Cette dernière explication souffre toutefois d’une faiblesse notoire. Elle est difficilement vérifiable et provient de courants universitaires et médiatiques favorables par nature à Barack Obama.

De par sa personnalité, Obama a l’avantage du cœur. Reste à voir si le 6 novembre les Américains voteront avec leur cœur. Ou leur raison.

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