Projets culturels abandonnés : les mauvais calculs d'économie budgétaire d'Aurélie Filippetti<!-- --> | Atlantico.fr
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Aurélie Filippetti a enterré plusieurs projets culturels de l'ex-gouvernement dans un contexte budgétaire difficile.
Aurélie Filippetti a enterré plusieurs projets culturels de l'ex-gouvernement dans un contexte budgétaire difficile.
©Reuters

Bug culturel

Aurélie Filippetti a annoncé l'arrêt de plusieurs projets culturels du précédent gouvernement. La ministre de la Culture a indiqué qu'elle entendait faire porter l'effort budgétaire sur "certains projets (...) non budgétés par l'équipe Sarkozy".

Christian Combaz

Christian Combaz

Christian Combaz, romancier, longtemps éditorialiste au Figaro, présente un billet vidéo quotidien sur TVLibertés sous le titre "La France de Campagnol" en écho à la publication en 2012 de Gens de campagnol (Flammarion)Il est aussi l'auteur de nombreux ouvrages dont Eloge de l'âge (4 éditions). En avril 2017 au moment de signer le service de presse de son dernier livre "Portrait de Marianne avec un poignard dans le dos", son éditeur lui rend les droits, lui laisse l'à-valoir, et le livre se retrouve meilleure vente pendant trois semaines sur Amazon en édition numérique. Il reparaît en version papier, augmentée de plusieurs chapitres, en juin aux Editions Le Retour aux Sources.

Retrouvez les écrits de Christian Combaz sur son site: http://christiancombaz.com

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En prétendant que la Culture est le disque dur de la politique, la ministre Filippetti prête le flanc à la critique car si le disque est truffé de secteurs défectueux, si la perte de données s'annonce impressionnante, c'est que le logiciel est nul. Son entretien avec le Monde en témoigne :  elle n'a pas de politique, mais désormais elle a une excuse, c'est qu'elle manque d'argent pour trouver des programmeurs compétents.

L'exercice qui consiste à analyser un discours publié sur la page internet d'un ministère trouve certes ses limites quand il s'agit d'un entretien livré à un grand quotidien. Contentons-nous de souligner que dans son entretien de rentrée, la Ministre témoigne d'emblée d'une rancoeur d'élue locale quand elle parle de l'équipe Sarkozy, comme si elle faisait allusion à une mafia de colleurs d'affiches. Je rappelle qu'elle fait allusion à des gens aussi divers que Christine Albanel ou Frédéric Mitterrand, des gens qui ne peuvent pas être réduits à leur équipe et que nous ne sommes pas dans le folklore municipal mais dans les affaires de la France. Plusieurs de nos gouvernants semblent tarder à s'en apercevoir.

Jetons un œil hautain et hâtif sur le catalogue des bonnes et mauvaises intentions de notre ministre et commençons par relever l'un des projets qu'elle enterre, le fameux Lascaux 4, projet financé aux trois quarts par le Privé dont les travaux viennent de commencer, et qu'elle ampute d'un quart de son budget sans même daigner en parler au président socialiste du Conseil général concerné (Dordogne), lequel vient d'apprendre par la presse qu'il était sur la paille.

Pour équilibrer le commentaire, parlons cette fois d'un projet qu'elle ressuscite, le plus grotesquement démagogique de la décennie, celui d'une villa Médicis des quartiers difficiles, machine à gaz qui souffre d'un défaut de chiffrage, d'imagination, et de légitimité philosophique puisqu'il s'agit de mettre l'art noble à la portée des pauvres, au lieu de  permettre aux enfants sans fortune d'aller étudier à Rome, comme ce fut pourtant le cas pendant des siècles, au temps où la France n'était capable, hélas, que de produire des Debussy, des Delacroix et des Camille Saint Saëns .

En gros cette stupidité qui date de l'ère Mitterrand et qui a été reprise par une droite à plat ventre consiste à débarquer avec tous les fastes de la culture bourgeoise dans une zone qui n'est pas desservie par les transports en commun,  tout en continuant à régler sans sourciller les ardoises de la vraie villa Médicis, celle qui permet à son directeur de promener son chien dans les jardins en tenant des discours oiseux pour un salaire non négligeable et d'ailleurs non publié.

D'une manière générale, tout ce qui coûte très cher à la République en matière de culture n'est ni public ni mentionné par Mme Filippetti à l'exception des intermittents du spectacle dont elle nous dit qu'ils sont parfois coupables de certains abus, mais dont la seule excuse est qu'ils sont des précaires. En d'autres termes, s'ils prennent leurs aises avec le budget de l'Etat, c'est parce qu'ils ont faim comme le clochard qui vole un bifteck, sauf que d'après la Cour des comptes ce n'est plus un bifteck mais des troupeaux entiers, de boeufs bien gras, qui sont détournés, par le système, au profit  de des bénéficiaires de cette usine à corned beef. N'importe, elle leur rend hommage en répétant les sornettes habituelles, qu' ils contribuent à l'animation, qu' on leur doit des bienfaits de toute sorte, et qu'elle n'y touchera pas, ou alors,peut-être,  quand tout le monde aura le dos tourné.

En revanche elle se rabat sur des projets vraiment dispendieux comme le centre des réserves du Louvre à Cergy Pontoise, dont elle annonce la suppression avec une incroyable légèreté, sans s'aviser que le député-maire socialiste, à qui elle n'a pas téléphoné non plus, est un ami personnel du Président, et va probablement installer sa tente dans la cour de l'Elysée, afin d'exiger et d' obtenir un démenti officiel.

Au total ce qui ressort de cet entretien qui aborde toutes les questions sans en résoudre aucune, c'est la pauvreté du langage, de la démarche, l'absence d'ergonomie devant l'ampleur de la tâche,  le défaut de vision, d'intentions, de volonté, devant une situation qui exigerait du courage mais qu'elle traite avec l'art du balancement qu'elle tient de ses maîtres : il faudrait faire des économies tout en ne réduisant aucune dépense, il faudrait mettre l'accent sur l'éducation artistique tout en ne revenant pas aux fondamentaux du genre je suis un élève de sixième et mon prof de dessin nous donne à dessiner une pomme sur une assiette. Non, les profs de dessin, de nos jours, quand il en reste, forment des plasticiens, c'est à dire des artistes en moins bien, en plus geignard, en plus prétentieux, en plus dépensier, des gens qui, par exemple, sont abonnés à la newsletter du Ministère.

Eh bien pour ma part, je ne souhaite plus la recevoir.

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