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Marseille : pas besoin de l’armée, mais d’une véritable volonté du gouvernement de comprendre et d’agir
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Des mots contre les maux

Recrudescence des règlements de comptes, trafic de drogue et d'armes en hausse... Marseille fait face à une insécurité grandissante. Outre la réunion d'un comité interministériel et l'annonce que Christiane Taubira videra les prisons, que fait le gouvernement pour lutter contre cette vague criminelle ?

Xavier Raufer

Xavier Raufer

Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date:  La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers. 

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A (re)lire :Insécurité : Marseille est aujourd’hui bien plus gangrénée par les bandes de cité que par la mafia

Résumons : des bandes de cités passées au crime organisé, soutenues par un fan club de « sociologues » présentant immuablement ces gangsters comme « des victimes de l’exclusion et du racisme » ; une municipalité aveugle à la gravité de la menace (« Marseille n’est pas Chicago ! ») ; enfin, des policiers et magistrats coupés du milieu criminel local, comptant les cadavres et réagissant ensuite tant bien que mal. Voici maintenant la phase du traitement : quatre questions sur l’efficace et l’inefficace en matière de lutte anti-crime.

1 – Faut-il "envoyer l’armée" à Marseille ?

Pour être gentil, cette lubie locale relève de l’affolement ; plus sévèrement, du showbiz. Nulle part ni jamais, une armée n’est efficace contre des criminels noyés dans une population complice (l’économie souterraine) ou apeurée (la loi du silence). Il ne s’agit pas ici de la bataille d’Alger, mais de neutraliser de fort classiques bandes criminelles, face auxquelles une police vite et bien informée est efficace. Et qu’elle le soit est un problème politique, de gouvernement, puisqu’en France la police est nationale.

2 -  Et le "Comité interministériel" de M. Ayrault ?

La composition même du comité sent le spectacle. De façon ennuyeuse, la réalité marseillaise est incomprise par le gouvernement, qui réagit comme il le peut, en faisant de la com’.

Avant d’engager ces conciliabules, le Premier ministre et ses conseillers devraient se poser une question fondamentale, que voici. Et si, à Marseille et alentours, les tueries à l’arme de guerre n’étaient pas le mal lui même, mais le seul symptôme d’un drame plus profond ? Car, dans la région PACA, pourquoi cette paralysie de la police et de la justice face au banditisme ? En privé, des magistrats régionaux s’inquiètent : pourquoi n’y a-t-il plus de grosse saisie de cocaïne en PACA depuis deux ans ? Pourquoi, quand on veut arrêter de gros truands, des opérations secrètes de la police échouent-elles trop souvent ? Pourquoi des policiers font-ils irruption à l’aube dans des logis vides, pour n’y trouver qu’un lit encore chaud ? Répondre à ces dramatiques questions, c’est régler l’affaire au fond - plutôt que de s’obnubiler sur les Kalachnikov, simples objets en eux-mêmes inoffensifs, si nul bandit n’en use.

3 – Que devrait faire le gouvernement en matière de lutte contre les bandes criminelles ?

Ce que les services spéciaux et la police française font fort bien avec les islamistes : du renseignement ciblé. Or, notre police ne fait pas de renseignement criminel. Pour des raisons troubles, son ancien chef a toujours refusé d’engager la DCRI dans le renseignement criminel opérationnel. Le ministre de l’Intérieur et le nouveau chef de la DCRI devraient d’urgence agir en ce sens. Quand on saura, précisément et assez tôt, ce que prépare le milieu (ici, marseillais) ; quand on découvrira qui le protège et qui l’informe - ce qui est plus crucial encore - le problème sera bientôt résolu. Il faut commencer par le renseignement criminel. C’est décisif car comme le disait Platon : « Le commencement est la moitié du tout ».

4 – Et qu’a fait jusqu’à présent le gouvernement ?

On va de l’affligeant au catastrophique.Mme Taubira a clamé à sons de trompe qu’elle allait vider les prisons - imaginez le sentiment d’impunité - d’invincibilité même - qui enivre dès lors de jeunes brutes pas toujours très subtiles.

Mais il y a pire encore. En août, Mme Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, annule brutalement la création d’une nouvelle section de criminologie au Conseil National des Universités - alors qu’une vraie vague criminelle déferle sur la France. Ce consternant diktat rappelle les excès de 1794 : « La République n’a pas besoin de savants ». Une ministre de la Recherche décidant à la soviétique de ce qui est scientifique ou pas. L’irénisme et le lyssenkisme comme les deux mamelles sécuritaires du gouvernement. Le comité interministériel de M. Ayrault devrait être plutôt pittoresque…

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