Les Roms, la droite, la gauche... Deux poids, deux mesures<!-- --> | Atlantico.fr
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"Sous l’ancien gouvernement, il était interdit de prononcer le mot Rom, sous peine d’être accusé de discrimination."
"Sous l’ancien gouvernement, il était interdit de prononcer le mot Rom, sous peine d’être accusé de discrimination."
©Reuters

Guerre des mots

Le mot "Rom", banni du temps de la droite, redevient acceptable. Certains mots passent donc mieux dans la bouche des dirigeants de gauche que dans celle des gouvernants de droite ?

Maxime  Tandonnet et Sylvain Saligari

Maxime Tandonnet et Sylvain Saligari

Maxime Tandonnet est un haut fonctionnaire français, qui a été conseiller de Nicolas Sarkozy sur les questions relatives à l’immigration, l’intégration des populations d’origine étrangère, ainsi que les sujets relatifs au ministère de l’Intérieur.

Il commente l'actualité sur son blog personnel.

Sylvain Saligari est avocat au barreau de Paris. Il est spécialisé dans le droit d'asile.

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Compte tenu de mon histoire personnelle et de ma position actuelle, je ne suis  certainement pas en mesure de prendre part à la polémique sur les Roms. Cependant, je ne peux m’empêcher de relever le nouveau paradoxe de cet œil de Caïn, du « big brother » qui surveille l’Europe et s’exprime à travers les éditoriaux de la presse bienpensante, les commentaires quasi unanimes de la télévision et de la radio, les communiqués de Bruxelles, de Paris et du monde associatif, le discours politique et les jurisprudences diverses.

Sous l’ancien gouvernement, il était interdit de prononcer le mot Rom, sous peine d’être accusé de discrimination. Un prêtre se disant ami des Roms a été jusqu’à déclarer qu’il priait pour que « le chef de l’Etat ait un infarctus » : fait sans précédent je crois dans l’histoire de la République depuis sa proclamation en 1870. Un autre, plus haut dans la hiérarchie, a fait allusion à la Shoah à propos de la politique de démantèlement des camps illégaux de Roms, tout comme d’ailleurs une commissaire européenne. Un haut fonctionnaire de la République a été tout près d’être traîné devant la justice pour une circulaire comportant le terme Rom. Un ministre, à l’époque, avait (sérieusement) inventé la formule PRISI « populations roumaines itinérantes en situation irrégulière» afin d’éviter ce mot … Les citoyens, notamment Franciliens, pouvaient chaque jour côtoyer la  réalité des bidonvilles insalubres sous les bretelles d’autoroute, les phénomènes de mendicité infantile, etc, etc. Cependant, le mot était interdit en public.

Aujourd’hui, le pouvoir a changé. Des hommes et des femmes aux intentions pures et généreuses sont aux commandes de l’Etat. Dès lors, le mot Rom est à nouveau autorisé. Ils annoncent en gros, quoi qu’on en dise, une politique comparable : le démantèlement des campements illégaux sur la base d’une décision de justice et le retour dans leur pays de ceux qui sont en situation illégale : normal, ce sont les lois de la République… L’enrobage diffère un peu il est vrai : on ouvre (comme il est prévu par les traités européens) le marché de l’emploi aux Roumains et aux Bulgares. Tout le monde est content et fait semblant de croire que cette mesure est destinée aux Roms…  En réalité, l’ouverture porte sur les Roumains et les Bulgares formés et qualifiés pour un métier, ce qui ne correspond pas forcément à la situation des populations en détresse vivant dans des squats et bidonvilles … Cependant, aujourd’hui,  plus rien n’est pareil. Le « méchant Sarko » s’en est allé, remplacé par des gens pleins de bonté, et la conscience européenne, apaisée, voit désormais les choses d’un tout autre œil…

Les solutions existent et se trouvent avant tout, chacun le sait, dans les pays d’origine, en Roumanie et en Bulgarie. Elles dépendent de la bonne volonté des deux gouvernements à utiliser correctement la manne européenne de dizaines de millions d’euros qui leur est versée pour l’accès à l’emploi et une vie décente de leurs citoyens roms. La responsabilité de chaque Etat envers ses citoyens est un principe du droit international qui vaut à l’intérieur de l’Europe. Mais voilà, taper du poing sur la table, ce n’est pas vraiment dans l’air du temps.

Cet article a préalablement été publié sur le blog de Maxime Tandonnet

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