Ces pisse-froids de Télérama : et si Tony Scott était un artiste et réalisateur de génie ? <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Culture
Ces pisse-froids de Télérama : et si Tony Scott était un artiste et réalisateur de génie ?
©

Le mal-aimé

Après son suicide, Tony Scott, est assassiné... par la critique. "On ne va pas jouer les hypocrites affligés " prévient Eric Libiot de L'Express tandis que Jérémie Couston, journaliste à Télérama, écrit "Ne comptez pas sur nous pour porter au pinacle ce réalisateur d'énormes bouses boursoufflées ".

Gael Golhen

Gael Golhen

Gael Golhen est rédacteur en chef de la rubrique cinéma du site internet du magazine Première.a

Voir la bio »

Atlantico : Tony Scott, le réalisateur de Top Gun mais aussi de True Romance, s'est suicidé lundi. En guise d'hommage, la critique se déchaîne. "Ne comptez pas sur nous pour porter au pinacle ce réalisateur d'énormes bouses boursoufflées" écrit notamment Jérémie Couston, journaliste à Télérama. Tony Scott méritait-il autant de haine ?

Gaël Golhen: On a le droit de ne pas aimer Tony Scott. On a même le droit de trouver que ses films sont mauvais, que Top Gun a salement vieilli, que Jour de Tonnerre, avec Tom Cruise et Nicole Kidman, était un véhicule pour un couple qui n'a pas tenu. Mais le dire de manière frontale et cash le jour de sa mort, cela manque manque d'élégance.

D'autant plus que le papier en question sous-entendait également que le suicide de Tony Scott était lié au talent de son frère, le réalisateur Ridley Scott... (Son suicide pourrait, en fait, être lié à un cancer incurable)

En dépit des critiques qui le visaient également de son vivant, Tony Scott n'a-t-il pas laissé une véritable empreinte sur le cinéma d'action américain, notamment par son style novateur ?

Il ne faut pas s'emballer et crier au génie alors qu'il a souvent été trainé dans la boue avant sa mort. Pour autant, Tony Scott vaut mieux que ce que laissent entendre les nécrologies de Télérama et de l'Express. Il n'est pas un simple artisan du blockbuster puisqu'il a contribué à définir le style esthétique du cinéma d'action des années 80, notamment du blockbuster façon Jerry Bruckheimer (producteur de Top Gun, le Flic de Beverly Hills ou Pirates des Caraïbes).

Ses films se caractérisent par une vraie furie visuelle, un montage hyper rapide qu'il a emprunté au cinéma asiatique, notamment à John Woo (réalisateur de The Killer et Volte/Face). Tony Scott était à l’affût de ce qui fait avancer le cinéma. Il a nourri le cinéma pop-corn de ses obsessions d'avant-garde et a imposé une esthétique nouvelle.

 Top Gun est-il "une énorme bouse boursouflée" ou le film d'une époque ?

Non, ce n'est pas une bouse. D'une certaine manière les trois gros films des années 80 de Tony Scott (Top Gun, Le Flic de Beverly Hills 2 et Jour de Tonnerre) ont défini le cinéma d'action de cette période et influencent désormais le cinéma contemporain. Aujourd'hui, ils sont datés esthétiquement, mais ils ont laissé une empreinte réelle.

Existe-t-il en France une forme de mépris de la part de la critique pour ce qui est populaire ?

Oui, la violence dont a fait preuve la critique française est injuste. Il y a toujours un soupçon, notamment en France, envers les réalisateurs qui ont du succès. Même des géants comme James Cameron (Titanic, Avatar) ou Steven Spielberg ont mis des années à s'imposer aux yeux de la critique française. 

Pour autant, c'est le boulot de la critique de donner son avis et je ne peux pas en vouloir à Jérémie Couston de ne pas aimer Tony Scott. Au contraire, son point de vue, comme celui d'Eric Libiot dans l'Express, permet de se poser des questions sur ce qui marche ou qui ne marche pas.

Quels sont les longs métrages qu'il faut retenir de la filmographie de Tony Scott ?

Pour un Top Gun, il y a un True Romance ou un USS Alabama qui est pour moi son vrai chef d'oeuvre. C'est un film d'un classicisme extrême qui va à l'encontre de l'image de pubard hystérique qu'a parfois Tony Scott. USS Alabama est nourri au grand cinéma engagé des années 60 et délivre un vrai message antimilitariste. Par ailleurs, il met en scène les acteurs majeurs que sont Denzel Washington et Gene Hackman.

De manière générale, il y a une forme de refus du compromis dans les films les plus expérimentaux de Tony Scott, comme Domino ou Man on Fire, qui force le respect et l'admiration.

Tony Scott a-t-il des héritiers dans le cinéma américain contemporain ?

C'est un cinéaste important par l'héritage qu'il laisse. De manière consciente ou inconsciente, Michael Bay (réalisateur de Bad Boys, Transformers), pour sa folie dans le montage, a sans doute été influencé par Tony Scott. De même, Paul Greengrass (réalisateur de la Mort dans la peau et Vol 93), par son approche ultra réaliste, peut être considéré comme l'un de ses héritiers.

propos recueillis par Alexandre Devecchio

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !