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La France a peur...
des biberons !
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Santé

C’est le scandale sanitaire du moment : le bisphénol A, que l’on utilise notamment dans la fabrication des biberons, menacerait nos enfants. Mais depuis le mardi 1er mars, les biberons contenant du bisphénol A sont interdits à la vente en France. Face à la psychose ambiante, il convient de rester prudent...

Nathalie Hutter-Lardeau

Nathalie Hutter-Lardeau

Nathalie Hutter-Lardeau est nutritionniste diplômée d'Etat, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. 

Parmi ses livres figurent notamment La True Food aux Editions du Moment,  dans lequel elle explique comment déguster ses produits préférés en toute lucidité, 101 restos, 0 kilo, coécrit avec Nathalie Helal et Catherine Roig (Hachette, mars 2013), Mince Alors ! (Odile Jacob, Juin 2011), Des mots sur les maux du cancer  (Mango, 2009) avec le Professeur David Khayat et Wendy Bouchard, et  Le vrai régime anti-cancer  (Odile Jacob, 2010) avec le Professeur David Khayat et France Carp.

Elle a fondé en 2000 l'agence conseil en nutrition Evidence Santé, qui travaille avec l'Agence nationale de sécurité alimentaire sur la sécurité alimentaire, et le plan national nutrition santé, ainsi qu'avec plusieurs entreprises du secteur agro-alimentaire.

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Le problème, avec les alertes santé officielles, c’est le manque de nuances : jeter le bisphénol A avec le biberon, ça revient un peu à jeter le bébé avec l’eau du bain…

Sur le fond, on est d’accord. Le bisphénol A (BPA), c’est pas bon pour la santé. Il fallait l’interdire. Mais ce n’est pas non plus le Médiator de nos enfants. Les gros titres anxiogènes sur le sujet souffrent d’un petit hiatus spatio-temporel : les risques liés au bisphénol A concernent surtout les enfants devenus grands qui ont sucé des tétines et bu leur biberon au bisphénol A il y a vingt ou trente ans ! Mais signaler ce recul rend tout de suite la nouvelle beaucoup moins intéressante...

Les dangers diminuent, la psychose progresse

L’impression globale qui résulte de ces alertes récurrentes, c’est que notre alimentation serait de plus en plus nocive. Pour savoir si c’est vrai, j'ai interrogé le professeur Jean-François Narbonne, toxicologue à l’Université de Bordeaux et expert auprès de l’Afssa. Il est formel : "quand on parle du bisphénol A ou d’autres substances dangereuses pour la santé humaine, il faut préciser que les maladies d’aujourd’hui sont le résultat des expositions d’hier et de ce qui n’a pas été fait dans le passé pour les limiter. Même si tout n’est pas résolu, les taux d’exposition actuels sont plus faibles qu’hier. La réglementation et les contrôles ont été renforcés. Toute une liste de substances, dont le bisphénol A, a été mise à l’index. On a l’impression que le nombre des cancers est en augmentation parce que la nourriture serait de plus en plus polluée. C’est faux ! Attention : je ne dis pas non plus que tout va bien et que l’on peut baisser la garde. Il y a encore du travail, de la vigilance, beaucoup d’interrogations, d’où la nécessité de donner à la science les moyens d’avancer. Mais d’énormes progrès ont été faits. On a désormais une meilleure connaissance des dangers et surtout de leur impact en nombre de malades. Il en résulte une impression de risque augmentée alors qu’elle concerne des expositions dans le passé et que le danger a en réalité diminué du fait des nombreux progrès réalisés dans la recherche sur les substances toxiques pour notre santé, dans l’interdiction, la législation et la diminution de notre exposition à ces risques".

Ne pas paniquer, mais changer nos comportements

Au lieu de se contenter d’alerter l’opinion publique sur des risques liés au passé des consommateurs, il serait bien de l’informer sur les gestes simples qui nous permettraient aujourd’hui de limiter ceux qui demeurent. Soit parce qu’ils n’ont pas été encore découverts, soit parce qu’ils sont encore mal évalués.

Là encore, le professeur Narbonne est précis : "dans l’état actuel des connaissances, je recommanderais d’avoir un comportement responsable. Refuser de manger des framboises en janvier, c’est plus que du simple bon sens, plus qu’un refus du gaspillage des ressources planétaires, c’est aussi un geste sain à faire pour soi. Qui sait ce qu’il faut ajouter aux framboises pour qu’elles voyagent jusqu’à nos tables hors-saison sans perdre leurs couleurs et leur texture ! Respecter les conditions d’utilisation des biberons et autres contenants plastiques car les industriels sont les premiers à chercher à limiter les risques éventuels dus à leur usure. Éviter de consommer trop fréquemment des boîtes de conserves. Et cuisiner le plus souvent possible des bons petits plats maison avec des légumes du marché, une préparation et une cuisson adaptés pour en préserver les qualités. Quant à l’alimentation des enfants, savoir qu’acheter bio ne résout que l’absence de résidus de pesticides. En résumé : varier au maximum les sources et les modes d’alimentation, de manière à limiter au maximum les contaminations potentielles et à réduire au maximum les taux d’exposition".

Autrement dit, puisque le risque zéro n’existe pas en matière d’alimentation, il est temps de nous souvenir que nous sommes des omnivores et d’adopter, pour limiter les risques, un comportement 100% variable !

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