JO de Londres : l’explication scientifique du succès des nageurs français<!-- --> | Atlantico.fr
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Mercredi, Camille Muffat a décroché sa troisième médaille : le bronze du relais 4X200 m libre.
Mercredi, Camille Muffat a décroché sa troisième médaille : le bronze du relais 4X200 m libre.
©Reuters

French frogs

Moisson de médailles aux JO pour l'équipe de France de natation. Un succès qui s'explique notamment par des considérations techniques...

Raymond  Catteau

Raymond Catteau

Pédagogue et théoricien français de l'activité physique, Raymond Catteau a créé une méthode d'apprentissage de la natation diffusée en France, en Italie et en Espagne. Il est l'auteur de la natation de demain, une pédagogie de l'action.

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Atlantico : Comment peut-on expliquer les succès des Yannick Agnel, Camille Muffat et autres nageurs français à ces JO de Londres ?

Raymond Catteau :Les nageurs français sont plus performants et nagent plus efficacement. Pour moi, la performance est le produit de deux choses un peu contradictoires : le rendement et la puissance. Le rendement, c’est le rapport de l’énergie transformée à l’énergie dépensée, il est toujours inférieur à 1. Autrement dit, l’énergie transformée utilement est toujours inférieure à l’énergie consommée.
Le nageur doit nager juste. Pour cela il doit faire un compromis entre des pertes de vitesse et des accélérations. A chaque coup de bras, on produit une accélération qui est immédiatement suivie d’un freinage, d’une perte de vitesse. Quand on nage juste, on se fatigue moins et on a donc un meilleur rendement. La puissance va jouer un rôle déterminant mais elle est, à la limite, en contradiction avec le rendement. Les deux ne peuvent toujours pas évoluer dans le même sens.  
Le principe d’action du nageur, c’est à la fois de passer à travers l’eau et prendre appui sur l’eau. Quand il passe à travers l’eau, le nageur est freiné et quand il prend appui, il n’a pas de point fixe comme sur terre, c’est-à-dire qu’il met des masses d’eau en mouvement.
Le nageur grâce à une position maintenue (posture) accélère plus efficacement les masses d’eau. Ces accélérations ne se produisent  pas paradoxalement selon la même loi physique sur terre ou dans l’eau. En effet, pour obtenir une accélération dans l’eau, il faut mettre en jeu une force croissante, alors que sur terre une force constante accélère la masse sur laquelle on agit. C’est la spécificité aquatique, le mécanisme auquel doit  s’habituer toute personne qui souhaite devenir nageur performant. 
Ces principes ont tendance à être de plus en plus respectés à travers le monde. On n’y échappe pas en France, où techniquement on les respecte. Yannick Agnel nage en amplitude, en alliant puissance et rendement.

Dans quelle mesure l'école de Nice, où s'entrainent notamment Yannick Agnel et Camille Muffat, est devenue la place forte de la natation française ?

Je pense que l’école niçoise est entrée depuis pas mal de temps en rupture avec la vision traditionnelle de la natation. Les victoires de Camille Muffat  et de Yannick Agnel reposent sur une justesse de nage et une dimension psychologique non négligeable. Leurs derniers succès aux Jeux Olympiques l'attestent.
Dans une compétition, le nageur doit savoir gérer son énergie en fonction des épreuves qui l’attendent. Pendant la course, physiquement, la régularité d’allure s’impose. Pourtant,  la dimension psychologique entre en jeu et peut parfois bouleverser la loi physique. Le nageur met la pression à son adversaire en prenant provisoirement  l’ascendant sur lui.
La natation comporte des ruptures. Au départ comme au virage, on prend appui sur un monde solide qui permet d’atteindre des vitesses de déplacement très supérieures à celles de la nage. La reprise de nage devra s’ajuster à l’inévitable perte de vitesse consécutive à ces poussées sur le « solide ». Ensuite il faudra retrouver le juste alignement et l’immersion possible, de cette façon, le nageur est beaucoup moins freiné.
Ce qui est remarquable aujourd’hui, c’est de voir que le nageur est devenu auteur de sa performance. On ne lui donne plus d’ordres de l’extérieur. Il construit sa course en connivence avec son entraîneur, c’est ce qu’on appellerait une pédagogie de l’entrainement.
Propos recueillis par Charles Rassaert

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