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Zones de sécurité prioritaire : "Manuel Valls est l'alibi d'une gauche qui donne des gages de sécurité sans réellement en faire"
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France, intérieur/nuit

Le ministre de l'Intérieur a indiqué ce mardi que "quinze zones de sécurité prioritaire" (ZSP) seraient déployées sur le territoire dès septembre. Elles devraient servir de test, avant l'instauration de 50, voire 60 zones similaires, d'ici un an.

Bruno Beschizza

Bruno Beschizza

Bruno Beschizza est conseiller régional d'Île-de-France, élu en mars 2010 en Seine-Saint-Denis et Secrétaire National de l'UMP à l'emploi des forces de sécurité.

Avant 2010, il était commandant fonctionnel de Police, secrétaire général du syndicat Synergie-Officiers.

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Atlantico : Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, annoncé la création de "quinze zones de sécurité prioritaire" (ZSP) en septembre. Cette initiative va-t-elle dans le bon sens ? 

Bruno Beschizza : François Hollande avait parlé de plus 60 zones durant sa campagne. Mais lorsque Manuel Valls est arrivé place Beauvau, on a vu qu'il n'y avait rien dans les cartons et que le gouvernement était seulement dans la déclaration d'intention. Manuel Valls a annoncé la création de seulement 15 zones sans préciser lesquelles. Cette réforme va se faire à budget constant, voir a minima, puisque le budget du ministère de l'Intérieur va baisser. Il n'y aura pas de création de nouveaux effectifs, mais seulement des redéploiements. Il s'agit avant tout de déshabiller Pierre pour habiller Paul. On fait rêver le peuple de gauche avec le retour d'une police de proximité, il n'en est rien. Le ministère n'en a pas les moyens.

Mais, il y a plus grave. Lors de la présentation de leur circulaire, le ministre de l'intérieur et le Premier ministre ont souligné le fait que la collaboration entre le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice devait bien se passer. Je pose simplement une question :  pourquoi le ministre de l'intérieur et le ministre de la justice n'ont-ils pas cosigné la circulaire pour lui donner plus de force ? Le problème de l'insécurité en France résulte de l'impunité dont jouissent les délinquants devant la justice. Nicolas Sarkozy n'a cessé de le dénoncer au risque de s'attirer les foudres des corps intermédiaires. Si Jean-Marc Ayrault avait vraiment eu la volonté et la capacité de donner un nouveau souffle à la justice, il aurait fait cosigner cette circulaire par Manuel Valls et Christiane Taubira. Seul une réponse pénale efficace permettra de mieux assurer la sécurité de nos concitoyens. Quand une personne est interpellée par deux policiers, ce n'est pas la peine de dire : "demain il faudra plus de policiers !" Il faut simplement que la personne interpellée aille en prison. 

Mais au-delà des questions de justice et d'effectifs, la police ne doit-elle pas avoir une action plus ciblée ? Certaines zones sensibles, comme la Seine-Saint-Denis, sont démunies...

Je vis depuis 40 ans en Seine-Saint-Denis. J'ai été élevé dans un HLM sensible à Montreuil et je suis élu du département. La solution n'est pas de fixer plus d'effectifs par villes, mais, comme le préconise le préfet de Paris Michel Gaudin, la mise en place de la police d'agglomération. C'est à dire, une police qui ait une réelle connaissance des phénomènes de délinquance, des lieux et des horaires où la délinquance se passe. L'idée est de pouvoir mutualiser l'ensemble des forces de polices de la grande plaque parisienne pour envoyer les effectifs nécessaire à un instant T et à un endroit Y en fonction des besoins. Renaud Vedel, ancien directeur adjoint du cabinet du préfet de police de Paris et nouveau directeur adjoint de celui de Manuel Valls, a beaucoup travaillé sur cette idée. Je ne peux pas imaginer qu'il défasse, aujourd'hui, ce qu'il a fait il y a deux ans. 

Quant à Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale et président du Conseil général de la Seine-Saint-Denis, il  va sans doute profiter de sa position et obtenir des effectifs supplémentaires pour son département. Mais, par le jeu naturel des mutations, ces effectifs ne seront plus là dans trois ans. Parce que je suis un ancien policier et un habitant de la Seine-Saint-Denis, conscient de la souffrance des habitants de ce département difficile, je ne veux pas mentir aux gens.

Plus généralement, comment jugez-vous les premiers pas de Manuel Valls au ministère de l'Intérieur ? 

Manuel Valls est un élu de terrain que je respecte énormément. En tant que maire de banlieue, il a toujours pris des mesures pragmatiques. Mais aujourd'hui, il est dans un gouvernement dans lequel il aura des difficultés à s'épanouir.

Depuis qu'il est arrivé, il a dû digérer les déclarations de Cécile Duflot sur le cannabis, et celles de Najat Vallaud-Belkacem sur la prostitution. Il doit maintenant affronter l'hostilité de son propre camp sur la question de l'immigration. Manuel Valls est obligé de donner des gages à l'idéologie de la gauche en détricotant l'héritage de Claude Guéant qu'il aurait pourtant pu parfaitement assumer. Par ailleurs, il n'aura pas les moyens matériels ni les outils juridiques pour mettre en place la politique qu'il veut mener. Manuel Valls est l'alibi d'une gauche qui donne des gages de sécurité sans réellement en faire.

 Propos recueillis par Alexandre Devecchio

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