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2012 : Le grand coup de mou
de la grande boucle
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Un petit Tour ?

Avec un parcours aux défis sportifs limités, le Tour de France remporté par le Britannique Bradley Wiggins était cette année aussi prévisible qu'un grand prix de Formule 1.

Fabrice Le Quintrec

Fabrice Le Quintrec

Fabrice le Quintrec est rédacteur en chef adjoint à Radio France, spécialiste des revues de presse.

Ancien attaché culturel en poste à l'Ambassade de France au Japon, il est aussi auditeur de l'IHEDN (Institut des Hautes études de la Défense Nationale).

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Sans évoquer les persistantes rumeurs de dopage qui pèsent sur le sport de haut niveau en général et, en particulier, sur le cyclisme où la traque aux tricheurs se fait plus pressante, un fait saute aux yeux à l’issue de ce Tour 2012 : les britanniques se taillent la part du lion. Bradley Wiggins, vainqueur final, en jaune presque de bout en bout… deux Anglais sur les deux plus hautes marches du podium… le tiers des victoires d’étape raflé par des cyclistes d’outre - Manche.

Sans chercher à être rabat-joie, relativisions tout de même ce bilan.

D’abord, le parcours proposé cette année aux coureurs n’était pas fait, a priori, pour les grimpeurs ailés, si tant est qu’il en existe encore au sein du peloton : Pla d’Adet, Galibier, Izoard, Alpe d’Huez, Ventoux ne figuraient pas au programme. Le Tour 2013, pour sa centième édition, ne manquera pas de corriger le tir et de durcir les difficultés, si l’on en croit les premières annonces ou les indiscrétions qui ont déjà filtré.

Ensuite -et même les inconditionnels de la grande boucle doivent en convenir- la glorieuse incertitude du sport était résolument absente : aucun suspense, aucun rebondissement pour tenir les fans en haleine, aucune dimension épique. Où étaient les duels d’antan, le mano à mano Anquetil-Poulidor, Merckx face à Ocana puis Thévenet, ou encore LeMond et Fignon défiant Bernard Hinault ? Où étaient les chevauchées fantastiques ?

C’est sans doute ce qu’on appelle le « cyclisme moderne » et qui le rapproche d’un grand prix de formule un : celui qui part en pôle position finit par l’emporter. L’écurie la mieux organisée, la plus richement dotée, contrôle la course. Cette année, sur le Tour, cette écurie, c’était l’équipe britannique Sky avec ses rouleurs surpuissants, appuyant sur les pédales avec des semelles de plomb, décourageant toute velléité d’attaque, délivrant au compte-gouttes les autorisations de sortie…

Troisième nuance de taille à apporter : Wiggins, qui excelle sur route, après avoir collectionné les lauriers sur piste, est un champion hors normes, mais en ce mois de juillet 2012, il n’était sans doute pas le meilleur. En montagne, il souffrait, il peinait pour suivre l’élément le plus talentueux de sa garde rapprochée, son compatriote Christopher Froome, deuxième au classement général final. Mais l’oreillette fonctionnait ; Froome, à plusieurs reprises, reçut pour consigne de freiner ses ardeurs et de garder profil bas. Le leader de l’équipe ne devait pas être déstabilisé. Le numéro un des «  Sky » apparaît donc au bout du compte comme un coureur tout terrain, façon Indurain ; il était chaque jour parmi les premiers mais il a rarement fait la course en tête et, en dehors des deux contre la montre, il n’a pas réalisé de coup d’éclat.

Quelques mots tout de même afin de faire mieux connaissance avec le vainqueur qui, jusqu’à ce dimanche 22 juillet, souffrait d’un sérieux déficit de notoriété, y compris dans son pays : physique longiligne, épais favoris encadrant le visage, âgé de 32 ans, né à Gand en Belgique d’une mère anglaise et d’un père coureur cycliste australien. Ce père alcoolique, drogué et violent, Bradley confie qu’il n’en avait pas une haute opinion… Il abandonna ses enfants et finira battu à mort au cours d’une rixe. La presse britannique cite des anecdotes racontées par les proches de Bradley : celui-ci, bébé, servit de mule à son père, transportant dans ses couches les amphétamines dont il était consommateur. Dans les années 2000, Bradley fut, à de multiples reprises, champion du monde et champion olympique de poursuite, ce qui explique ses performances exceptionnelles dans l’effort solitaire face au chronomètre.

Si les caméras de France Télévision n’ont guère eu l’occasion de mettre Wiggins à l’honneur, puisqu’il ne s’est pas tellement mis en évidence au cours des trois semaines de course, il est cependant un spectacle qu’elles n’ont pas raté : celui de la ferveur populaire, celui du patrimoine naturel, architectural, humain de la France profonde ; les camping-cars garés le long des routes, les militants CGT qui déploient leurs banderoles avec l’espoir d’être aperçus sur le petit écran, les monuments et même les champs pavoisés, décorés, les bourgades qui se mettent sur leur trente et un pour accueillir les coureurs…En ce mois de juillet, le Tour n’a sans doute pas été le feuilleton sportif intense qu’on était en droit d’espérer, mais, grâce aux directs de la télévision, il a, fidèle à son habitude, été la vitrine de la France des régions, de la France de Jean-Pierre Pernaut.

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