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Bruno Beschizza : "Sur le récépissé de contrôle d’identité, le premier flic de France, Manuel Valls, ne peut pas s’opposer à tous les autres"
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Socialiste de droite

Officiellement, le débat sur l'attestation de contrôle d'identité sera tranché à l'automne, lorsque le Défenseur des droits, Dominique Baudis, aura rendu public son rapport. Mais le projet d'un récépissé censé lutter contre les contrôles au faciès semble enterré par le ministre de l'Intérieur, qui planche déjà sur d'autres solutions.

Bruno Beschizza

Bruno Beschizza

Bruno Beschizza est conseiller régional d'Île-de-France, élu en mars 2010 en Seine-Saint-Denis et Secrétaire National de l'UMP à l'emploi des forces de sécurité.

Avant 2010, il était commandant fonctionnel de Police, secrétaire général du syndicat Synergie-Officiers.

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Atlantico : Après des semaines de concertation, Manuel Valls a enterré le projet de récépissé de contrôle d'identité censé lutter contre les contrôles au faciès. Comment expliquez-vous cette marche arrière ?

Bruno Beschizza : La nomination de Manuel Valls, on le voit sur ce dossier mais aussi sur la politique d'immigration, est un malentendu : le ministre de l'Intérieur va plaire aux hommes et aux femmes de droite !

Manuel Valls a l'intelligence d'écouter les personnels et de comprendre qu'il ne peut pas faire passer cette mesure sans les y associer. Les syndicats, de gauche comme de droite, sont unanimement opposés à ce projet. Le ministre de l'Intérieur, qui a la renommée d'être un homme autoritaire, un républicain qui aime l'ordre, ne peut pas se permettre de faire passer une mesure contre l'avis des policiers. On ne peut pas être le premier flic de France en étant contre tous les flics de France !

Manuel Valls est de bonne foi. Il est fier d'être ministre de l'Intérieur,  mais est obligé de réaliser un numéro de contorsionniste car il est empêtré dans les déclaration du candidat Hollande. Le ministre de l'Intérieur a été rappelé à l'ordre par le Premier ministre. Pour l'instant, Manuel Valls a trouvé un allié objectif en la personne de Dominique Baudis, le Défenseur des droits, qui ne remettra son rapport qu'à la rentrée. Cela lui permet de gagner du temps. Mais, le projet n'est pas définitivement enterré. Je pense qu'on va assister à un feuilleton à rebondissement...

Aujourd'hui, plus Manuel Valls bouge, plus il s'enfonce. Je pense qu'il va être confronté à d'autres difficultés. Sur la politique d'immigration, sur la lutte contre le trafic de stupéfiants, Manuel Valls est en contradiction avec l'idéologie prônée par la majorité actuelle.

Pourquoi les policiers sont-ils aussi hostiles à cette mesure ?

Cette mesure est détestable et vexatoire : il s'agit de montrer aux association antiracistes que la gauche est de retour et qu'on peut de nouveau humilier les "flics fachos". Il faut montrer "aux flics" que la rue n'appartient plus à l'ordre républicain, mais au microcosme associatif parisien bienpensant. Ces association ont contribué à faire élire François Hollande sur cette promesse. Elles réclament leur trophée. J'appelle cela du racisme "antiflics", de la "flicophobie". Pour le policier de terrain, c'est insupportable.

Aujourd'hui, une partie de la population française manifeste une certaine défiance à l'égard de la police. L'attestation de contrôle d’identité n'est-elle pas un bon moyen de rétablir un lien de confiance entre les citoyens et la police ?

Moi, homme de droite, j'assume, haut et fort, le fait d'avoir confiance a priori dans tous les représentants des forces de l'ordre.

Toutefois, ayant été syndicaliste policier, je sais aussi que certains policiers peuvent sortir du droit. J'ai voté moi-même des révocations de policier. Mais le cliché de l'impunité chez les policiers est faux. La police est l'une des professions les plus contrôlées dans l'administration française. Les policiers sont contrôlés par la hiérarchie, par la police des polices, par les magistrats.

Pour maintenir le lien de confiance entre les citoyens et les policiers, il faut donner à ces derniers les moyens de faire leur travail. Le meilleur moyen de regagner la confiance de la population, c'est d'assurer au mieux sa sécurité. Si demain les individus qui agressent leurs concitoyens sont interpellés et vont en prison, la confiance envers la police reviendra.

Certains individus, dans certains quartiers sensibles, considèrent que la rue leur appartient et qu'ils tiennent le quartier. Pour eux, la remise d'un récépissé de contrôle d'identité sera perçu comme un acte de faiblesse, une forme de soumission. Pour les policiers, le contrôle d'identité est un outil de travail indispensable. 

Plusieurs études démontrent que lorsqu'on est noir ou d'origine maghrébine, on a respectivement 6 et 8 fois plus de chance qu’un blanc d’être contrôlé par un policier... Comment expliquez-vous ce constat ?

Alain Bauer, ami d'enfance de Manuel Valls, est celui qui tient le discours le plus intéressant sur cette question. Le problème n'est pas racial ou ethnique, mais démographique. Les quartiers pauvres concentrent un certains type de population. Lorsque vous  patrouillez à minuit dans certains quartiers, vous avez plus de chances de tomber sur de jeunes garçons, qui ont entre 16 et 18 ans, que sur "un troupeau de majorettes"...

Propos recueillis par Alexandre Devecchio

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