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London Calling : cette obsession
de la diplomatie française à vouloir envers et contre tout un couple franco-britannique, alors que
ça ne fonctionne pas
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London calling

François Hollande a rencontré le Premier ministre britannique à Londres ce mardi. Cette première visite officielle au Royaume-Uni est l'occasion pour l'Elysée d'insister sur le "partenariat franco-britannique". Pourtant, après la sortie de David Cameron sur la taxation des hauts revenus, les points de désaccords ne manquent pas. Pourquoi cette volonté française d'encourager l'amitié franco-britannique à tout prix ?

Bruno Bernard

Bruno Bernard

Anciennement Arthur Young.
Ancien conseiller politique à l'Ambassade de Grande-Bretagne à Paris, Bruno Bernard est aujourd'hui directeur-adjoint de cabinet à la mairie du IXème arrondissement de Paris.

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Existe-t-il une obsession française de l’axe franco-britannique ? Une obsession que les Britanniques regarderaient avec un mélange de condescendance et d’incompréhension : « mais pourquoi diantre ces ″ froggies ″ tiennent-ils tant à se lier à nous ? ». La France occuperait-elle le rôle de l’éternel amoureux que la Grande-Bretagne tiendrait à distance sans jamais dire totalement non ?

Premièrement, si la France a une obsession diplomatique, c’est celle du maintien de son rang au sein de la société des Nations, une obsession qu’elle partage totalement avec la Grande-Bretagne.

Deuxièmement, il n’existe qu’un seul axe essentiel pour la diplomatie et la politique française, c’est l’axe franco-allemand ; l’axe sur lequel s’est construite l’Union européenne.

Enfin, l’axe franco-britannique existe, qu’on le veuille ou non. Cet axe est physique, il est matérialisé par le tunnel sous la Manche et a modifié à jamais les relations diplomatiques entre les deux pays. A cause de lui, la France est le seul pays d’Europe continentale avec qui le Royaume-Uni possède une frontière terrestre. De par son existence, la coopération entre les deux pays est quotidienne et souvent plus technique que politique, notamment en ce qui concerne la lutte contre l’immigration illégale.

Il existe toutefois un domaine qui démontre l’existence d’un axe diplomatique et politique entre Paris et Londres. Ce domaine c’est la défense. Dictée par des considérations pratiques (réductions des coûts) mais aussi politiques (volonté de maintenir une puissance militaire de niveau mondial), cette coopération est prometteuse mais elle doit encore faire ses preuves. Néanmoins, il ne faut pas se méprendre, si prometteuse soit-elle, cette coopération ne fera jamais oublier ce qui sépare les deux capitales c’est à dire leurs visions de l’économie, de la société ou encore de l’Union européenne.

En dehors de la coopération technique et de la défense, il existe donc une diplomatie que je qualifierai de « confrontationnelle ». Une diplomatie fondée sur les différences fondamentales susmentionnées et sur un rapport de force permanent.

David Cameron dans son style provocateur l’a d’ailleurs bien illustrée lorsqu’il a proposé d’accueillir les entreprises françaises qui fuiraient les hausses d’impôt du nouveau président Français. Ces manières, que l’on pourrait qualifier de brutales, illustrent pourtant bien la manière britannique de fonctionner qui pourrait être résumée ainsi : nous sommes en concurrence avec le monde entier, n’espérez pas de cadeaux de notre part. Le Premier ministre britannique a vu une opportunité de faire venir des entreprises sur son territoire et l’a saisie end of the story

Les Français, êtres civilisés au possible, n’ont pas trouvé ces manières convenables. Peut-être était-ce le cas ? Elles étaient surtout inimaginables pour eux. Ce discours empreint de confiance en soi agressive est tellement étranger à la psyché nationale où le doute le dispute à une certaine arrogance.

Les Français ont une véritable fascination pour la Grande-Bretagne (qu’ils ont souvent tendance à résumer à Londres), son pragmatisme, son histoire, ses traditions, sa capacité à évoluer avec son temps. Pourtant les Français savent qu’il est inutile d’essayer de transposer quoi que ce soit de britannique sur leur territoire, leur administration ou même leur économie, la greffe ne prendrait pas. Imaginerait-on de voir apparaître des « change managers » dans les administrations françaises afin de faire évoluer les manières de travailler ou l’équivalent d’un dispositif comme le civil service fast stream pour diversifier le recrutement au sein de l’administration publique ?

En conclusion il n’y a pas d’obsession française pour un axe franco-britannique, malgré les discours récurrents sur le sujet, mais il existe certainement un vieux fantasme (ou est-ce un complexe ?) de côté-ci de la Manche d’une véritable coopération politique avec le vieil ennemi. Difficile de savoir si l’objectif serait de franciser la politique anglaise ou au contraire d’angliciser la politique français mais il se trouve que beaucoup de politiques français de tous bords, restent impressionnés par les réalisations de Thatcher et de Blair et rêvent en secret de pouvoir faire la même chose en France. 

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