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Twitter est-il en train de ringardiser Facebook ?
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Futur MySpace ?

Cinq ans après son lancement, le site de micro-blogging Twitter attire -enfin- les adolescents. Un succès qui pourrait bien se faire au détriment de Facebook.

Eric Delcroix

Eric Delcroix

Eric Delcroix est conférencier et consultant, spécialiste du web 2.0, des réseaux sociaux et de l'identité numérique. Il a notamment participé à l'ouvrage Les réseaux sociaux sont-ils nos amis ?, paru en juin 2012. Il est créateur du site Génération Z.

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Atlantico : 16% des 15-24 sont déjà sur Twitter en France, selon les derniers chiffres de l'institut ComScore. Et une étude de la fondation Pew Center montre que 16% des jeunes américains âgés de 12 à 17 ans utilisent aujourd’hui ce site de micro-blogging, le double d’il y a deux ans. Comment expliquer cette arrivée massive des jeunes sur ce réseau ?

Eric Delcroix : Ce que j’ai observé, notamment lors de mes conférences auprès de jeunes, c’est que beaucoup d’entre eux  passent sur Twitter car les animateurs radios de leur âge y sont déjà. Ils rejoignent les animateurs de Skyrock et les vedettes dont ils sont fans. Cela leur permet d’être au courant tout de suite de tout ce qui se passe.  C’est la principale source de passage que j’ai observé.

Une fois qu’ils ont eu ce premier contact avec leur vedette ou leur passion, ils se retrouvent avec des gens de leur classe ou de l’extérieur, et commencent donc à communiquer entre-eux à l’intérieur même de Twitter. 

A ce niveau là, quelle est donc la différence avec Facebook ?

A mon avis, il n’y en a pas beaucoup. Ils l’utilisent un peu comme du chat. Mais Facebook reste très « communautaire » , c’est-à-dire que quand ils mettent un message, ils savent que tout le monde va pouvoir le lire, dans le groupe auquel ils appartiennent. A la limite, ils ont moins conscience d’être complètement publics dans Twitter que dans Facebook. Ils n’ont pas conscience que dans Twitter, tout est public, car ils ne protègent rien.

Pourtant, cela fait quelques années que les jeunes sont sensibilisés à la question de la vie privée sur Internet…

Dès qu’on parle de cybercriminalité, de dangers en ligne, on focalise toujours sur Facebook sans parler du reste. Ça fait longtemps que j’essaye d’expliquer aux jeunes que les dangers sont partout sur Internet.

En fait, ils vont tout simplement sur cette plate-forme parce qu’elle leur convient mieux, notamment parce qu'elle elle est plus rapide. En plus, ils adorent écrire des petits textes : si on regarde leurs profils Facebook, ce n’est pas du baratin. 140 caractère, ça leur convient très bien. Mais ils ne voient pas, surtout au début, les différences entre publier sur Facebook et publier sur Twitter. Ils ne se rendent pas compte que tout le monde peut repérer leur Tweet. Je le vois bien avec mon compte  tweetennord, qui est un robot qui récupère les tweets en rapport avec le Nord. De temps en temps, je vois des jeunes qui râlent parce que j’ai récupéré leur tweet. Ils ne comprennent pas que quelqu’un qui ne fait pas partie de leur univers puisse y avoir accès.

Une des raisons avancées pour expliquer le départ des jeunes de Facebook est l’arrivée de la famille –parents, cousins, etc- sur le compte, ce qui donne l’impression aux jeunes d’être « espionnés ». Twitter n’est-il pas leur « jardin secret » ?

Je n’ai pas eu cet écho là. En fait, ils savent maintenant plutôt bien utiliser Facebook, en gérant la visibilité de ce qu’ils publient –privé, public, pour tel ou tel groupe…

Par contre, une des autres explications peut être l’effet de mode. Y être avant leurs amis peut jouer...

Ils y arrivent pourtant avec quelques années de retard, puisque Twitter est né en 2007.

Ils étaient déjà en retard sur Facebook ! Au début, ils ne voulaient pas s’y inscrire car on ne pouvait pas changer le fond d’écran. Et à mon avis, la mode Twitter va peut être passer. J’ai l’impression qu’ils vont maintenant sur Pinterest. Les jeunes l’ont très vite pris en main, notamment les filles.

Facebook est-il donc déjà devenu ringard, et Twitter suit-il ce chemin ?

Non… Il faut distinguer les usages. A une époque, tout le monde parlait de Skyblog, qui a quasiment disparu aujourd'hui, alors que les blogs existent encore. Facebook et Twitter ne sont pas près de s’éteindre, car ils ont des usages propres. Pour prendre l’exemple d’une de mes filles, qui est de cette génération : elle a un Twitter et un Facebook, où elle va régulièrement. Elle jongle avec les deux, avec des usages différents.  Sur Facebook, elle interagit avec ses copines, devient fan de marques, etc. Sur Twitter, elle parle plutôt de ses activités susceptibles d’intéresser plus de monde.

L’autre raison qui peut expliquer le succès de Twitter est l’usage des téléphones portables. Il est beaucoup plus simple d’envoyer un tweet à partir d’un portable que de se promener dans un compte Facebook. Et ce dernier est bien conscient de son retard, puisqu’il travaille là-dessus. A l'inverse, un des inconvénients de Twitter est la gestion des photos, puisque contrairement à Facebook, on ne peut pas créer de galeries.

Au niveau de la vie privée, c’est plutôt un mal pour un bien, non ?

Oui, mais cela montre aussi que les jeunes n'en ont pas le même usage. Dans les conférences, je dis souvent que je ne mets pas Twitter dans les réseaux sociaux. C’est pour moi du « web temps réel ». Déjà, dans le mode d’acceptation des gens, il est différent de Facebook, puisque dans Twitter tout le monde peut suivre tout le monde. L’autre différence, c’est que la durée de vie d’une info dans Twitter est très courte, de 30 minutes à peine, alors qu’elle est plus longue dans Facebook. Avec Twitter, les jeunes sont dans l’instantanéité.

Propos recueillis par Morgan Bourven

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