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L’UMP osera-t-elle enfin
le libéralisme ?
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Osons !

Alors que la confrontation s'accentue entre François Fillon et Jean-François Copé pour la présidence de l'UMP, la France reste le seul pays civilisé dans lequel il n’existe ni mouvement ou parti libéral qui pèse sur la scène politique. L'UMP doit-elle saisir cette opportunité ?

Jean-Philippe Feldman

Jean-Philippe Feldman

Jean-Philippe Feldman est agrégé des facultés de droit, ancien Professeur des Universités et maître de conférences à SciencesPo, et avocat à la Cour de Paris. Il est vice-président de l’Association pour la liberté économique et le progrès social (A.L.E.P.S.).

Dernier ouvrage publié : Exception française. Histoire d’une société bloquée de l’Ancien Régime à Emmanuel Macron (Odile Jacob, 2020).

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Depuis son origine, et comme son nom l’indique, l’UMP est une machine de guerre au soutien du Président de la République ou d’une écurie présidentielle. A l’issue des élections d’avril-juin, elle se comprend plutôt comme la désunion pour la minorité non présidentielle... Alors que l’UDF était une confédération qui respectait plus ou moins des idées sensiblement différentes, elle a été explicitement érigée dans un but électoral, les idées devenant dès lors accessoires. On pouvait penser que la cure d’opposition à laquelle elle se trouve astreinte, lui ferait le plus grand bien en obombrant pour un temps les ambitions personnelles et en mettant au devant de la scène les idées. La guerre, jusque là larvée, qui oppose le secrétaire général actuel à l’ancien Premier Ministre, amène à en douter, au moins de manière provisoire. 

Les ambitions sont à l’évidence légitime. La soif du pouvoir est attachée à tout homme politique, mû, on a trop tendance à l’oublier, comme chaque individu, par son intérêt. Mais ce serait une erreur dramatique que les ambitions prennent le pas sur les idées, en continuité avec une campagne électorale dont le vide conceptuel a été abyssal.

Certes, quelques sensibilités ont plus ou moins émergé, sur fond de règlements de compte post-présidentiels. Mais ils se sont réduits à une opposition entre une droite nationaliste et une droite sociale qui s’est construite, non pas de manière autonome pour l’essentiel, mais autour de l’hypothèque du Front National. Pour une partie de l’UMP, il convient d’éviter toute alliance avec l’extrême droite et de contrer la majorité socialiste en mettant en avant la modération, autrement dit une social-démocratie qui est en réalité la marque de fabrique des conservateurs depuis plusieurs décennies. Pour une autre partie de l’UMP, il faut avant tout s’opposer à l’angélisme et à la naïveté socialistes en insistant sur les notions traditionnelles d’ordre et de nation pour phagocyter l’extrême droite.

Or, cette division est en fait plus apparente que réelle, car elle évince les véritables questions. Nationaliste ou « humaniste », ces tendances de l’UMP demeurent profondément conservatrices. Il s’agit toujours, fût-ce de façon sensiblement différente, de modeler la « société », d’encadrer des individus débiles, de les « protéger », selon une expression partagée par tous les candidats lors de la dernière élection présidentielle, contre tout et contre tous. Il n’est dès lors guère surprenant que la droite ait fini par perdre les élections car, entre l’original et la copie, les gens finissent toujours par préférer celui-là à celle-ci.

Quelle est la légitimité d’hommes qui ont systématiquement anticipé la politique de François Hollande, soit par des innovations malheureuses, soit du fait de la poursuite des erreurs passées ? La dette publique et les déficits budgétaires ? Ils ont explosé depuis 1980, quelle que soit la couleur politique des gouvernants. Le chômage ? Son traitement « social » a été la ligne continue des hommes au pouvoir à compter du premier choc pétrolier. Les impôts ? La France est au sommet européen et mondial depuis la IVème République, et la situation a empiré à compter des années 1970. Le respect du droit de propriété ? L’interventionnisme de l’État a réduit chaque année la sphère de la société civile, telle une peau de chagrin.

Comment s’opposer de manière crédible à une banque publique d’investissement lorsque l’on a créé le Fonds stratégique d’investissement ? Aux emplois aidés lorsqu’on les a réactivés ? Aux droits économiques et sociaux lorsqu’on a inventé le droit opposable au logement ? A l’écologisme politique lorsqu’on a pensé le « Grenelle de l’Environnement » ? A la hausse de la fiscalité, lorsqu’on a créé en un quinquennat une trentaine de taxes supplémentaires et une nouvelle tranche à l’impôt sur le revenu ? 

Une droite nationaliste et social-démocrate est dans l’incapacité d’établir un programme de rechange, parce qu’elle croit toujours qu’une bonne politique tient aux hommes qui exercent le pouvoir, alors qu’il convient avant tout de prémunir l’individu contre les hommes du pouvoir.

Le pessimisme n’est pourtant pas de rigueur. La présence des socialistes à la tête de l’État est un aiguillon pour la transformation de la droite. Il appartient à cette dernière d’opérer une rénovation intellectuelle qui lui permette de comprendre l’importance des grands principes (droits de l’homme, liberté, propriété, responsabilité) au détriment d’un pragmatisme et d’un « courtermisme » qui ont été érigés en leitmotiv depuis trop d’années. C’est toute la légitimité des libéraux au sein de l’UMP que de peser pour que les principes passent le pragmatisme, les idées l’ambition, la rénovation le replâtrage.

La France est le seul pays civilisé dans lequel il n’existe ni mouvement libéral, ni parti de gouvernement au sein duquel les libéraux pèsent. Aussi la création d’un authentique courant libéral, qui doit se comprendre comme le relais des partisans de la liberté dans la société civile, est-elle une nécessité au sein de l’UMP si celle-ci entend non seulement reconquérir le pouvoir, mais encore l’exercer à bon escient.

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