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Présidence du groupe UMP : 
l'heure des règlements de compte
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Reconstruction

Alors que le PS a obtenu la majorité absolue à l'Assemblée nationale, l'UMP désignait mercredi son chef de groupe parlementaire. Avec l'élection de Christian Jacob, la guerre Copé/Fillon pour diriger l'UMP peut enfin véritablement commencer...

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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L’UMP n’échappe pas à la règle : quand elles ne donnent pas lieu à des règlements de comptes, les défaites sont toujours l’occasion d’examens de conscience, et de remises en cause idéologiques et surtout personnelles, en l’occurrence de ceux qui ont initié de la stratégie de l’échec, autrement dit l’équipe dirigeante. Elles font voler en éclat des amitiés : depuis hier soir, on peut dire que la « bande des mousquetaires », les fameux quadras de l’UMP composée de Jean-François Copé, François Baroin, Valérie Pécresse et Bruno Le Maire, a vécu.

Désormais, c’est chacun pour soi : François Baroin ne l’a pas encore déclaré officiellement, mais le Maire de Troyes songe à 2017. Quant à Valérie Pécresse, elle a choisi son camp : l’ancienne ministre du Budget rallie officiellement François Fillon, avec qui elle veut faire équipe pour la conquête de l’UMP, et plus si possible. Elle le fait dans une interview au Figaro en déclarant notamment : « Cinq ans, c'est très court pour se forger une légitimité d'homme d'État. Nous avons la chance d'avoir François Fillon, qui en a déjà la stature, qui a un bilan remarquable en matière de réformes, qui a l'expérience des temps de crise, qui a la confiance des militants, profitons-en ! »

Non, ce n’est pas le moment de penser à 2017, ont rétorqué presque en chœur Bruno Le Maire et Xavier Bertand (chacun de leur côté). Ce dernier invoque « un travail important d'analyses. Pourquoi justement on a eu ces deux défaites (à la présidentielle et aux législatives) ». « Un travail également de reconstruction à partir de nos valeurs », et  aussi « un travail d'opposition avec la gauche... C'est un travail immense», a-t-il déclaré sur Europe 1. Quant à Bruno Le Maire, il réclame « de la hauteur… la psychothérapie de groupe on le fait une fois, pas deux fois. C'est sur le projet pour la France que nous sommes attendus… L'important pour moi, c'est qu'on retrouve notre unité et surtout qu'on ait quelque chose à dire aux Français. Il faut qu'on arrêt de se parler entre nous ! », a-t-il déclaré sur BFMTV. On en est loin pour l’instant.

Mercredi, loin des tractations des socialistes autour du perchoir, le premier round de la guerre à l'UMP s’est déroulé dans le cadre de l’élection ou plutôt la réélection de Christian Jacob à la tête du groupe parlementaire. Dans la matinée, il a suffi d’un seul tour de scrutin pour que Christian Jacob l’emporte haut la main avec 117 voix sur 198 votants, contre 63 à son challenger Xavier Bertrand, et seulement 17 à Hervé Gaymard. Cette victoire sans appel a aussitôt été interprétée comme une première manche gagnée en faveur de Jean-François Copé, et un mauvais départ pour son concurrent François Fillon,(supposé soutenir Xavier Bertrand), désormais en campagne pour la direction du parti. Mais les choses ne sont pas si simples : ce bon résultat est aussi le fruit de la cote personnelle de Christian Jacob dont les collègues ont reconnu la disponibilité et les qualités de fédérateur, tout autant que sa proximité avec le secrétaire général de l’UMP. Dès les résultats connus, quelques élus, dont François Baroin ont mis les points sur les « i » : « le temps du groupe n’est pas celui du parti ».Sous-entendu : Christian Jacob doit rester neutre.

Mais hier on attendait aussi la grande explication post-électorale : les députés étaient invités à élire leur chef sans que le scrutin soit précédé d’un débat, voire d’une simple présentation des trois candidats. La réunion du groupe, elle, était programmée pour l’après-midi, juste avant celle du bureau politique, deuxième round de ce match qui ne fait que commencer. Après « une pensée pour les amis qui ont subi une défaite », est venu le temps de la prise de parole .

Dans le viseur de ceux qui considèrent que « c’est bien parce que la droite au pouvoir n’a pas été suffisamment la droite, que l’extrême droite affaiblie en 2007 est redevenue forte en 2012 », comme l’affirment les tenants de la droite populaire, et à l’inverse de ceux qui estiment que le parti s’est trop droitisé et que la stratégie du ni-ni (ni Front républicain, ni Front national), adoptée pour l’entre-deux tours des législatives a échoué, Jean-François Copé. Il voudrait se positionner en homme de synthèse, qui organise le débat, avec la mise en place d’ « une réflexion sur les valeurs qui nous rassemblent », une sorte de « groupe de parole » pour tenter d’élaborer la nouvelle ligne politique du Mouvement populaire, auquel Xavier Bertrand reproche « d’avoir perdu son P».

L’exercice est périlleux. Quelques « défaits », membres du bureau sont montés au front, Nadine Morano en tête : dans son viseur, François Fillon qui l’a implicitement désavouée après qu’elle se soit fait piéger par l’humoriste Gérald Dahan, à propos des « valeurs communes de l’UMP avec celles du Front national ». L’affaire a fait grand bruit juste avant le deuxième tour. « Pendant que certains étaient dans des champs de pâquerettes, j'étais sur un champ de mines », s’est-elle lamentée, en faisant allusion à l’ancien premier Ministre qui se présentait dans une circonscription tranquille à Paris.

François Fillon a répondu « si j’ai blessé des gens, je le regrette ». Un intervenant a aussi fait remarquer à l’ancienne ministre de la formation professionnelle qu’il fallait être clair sur « les valeurs », sous-entendu qu’elle ne l’aurait pas été. Et François Baroin, également mis en cause par Nadine Morano, a rétorqué à son ancienne collègue qu’elle a « expliqué sa défaite pendant 25 minutes sans jamais se remettre en cause ». Ambiance.

Les oreilles de l’ancien chef du gouvernement ont encore sifflé quand des intervenants ont reproché à l’exécutif d’avant de ne pas avoir interdit les triangulaires (qui auraient empêché la présence de candidats du Front national dans un certain nombre de circonscriptions), comme le préconisaient plus de cent députés dans une proposition de loi.

Tous ces contestataires ont été très applaudis ; avantage Copé, ont conclu les proches du sectaire général. Les contestataires pourront encore vider leur sac dans les fameuses réunions qui vont se tenir tout au long du mois de juillet pour permettre de réfléchir aux « valeurs » et à la nouvelle doctrine de l’UMP. Les participants pourront continuer de se morfondre sur le « ni-ni » aujourd’hui critiqué, mais qu’ils ont tous accepté au nom de l’unité du parti. Et c’est le piège qu’ils veulent éviter à l’avenir.

Aujourd’hui c’est la direction de l’UMP qui est en jeu ; elle sera renouvelée en automne à l’occasion d’un congrès. Son futur chef sera-t-il le candidat de 2017 ? Il détiendra en tous cas les clefs de la candidature et Jean-François Copé espère bien les garder en main. Mais d’ici là beaucoup de rebondissements, de coups d’éclats, voire de coups bas sont à prévoir. Car toute reconstruction est généralement précédée d’une balkanisation. Celle-ci est en cours.

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