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Grève en Corse, plus personne ne s’en aperçoit…
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Zone Franche

Les marins de la SNCM, en grève depuis le 31 janvier, font surtout le bonheur de la concurrence.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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A la provoc de Nicolas Sarkozy, pour qui « plus personne en France ne remarque une grève des transports », avaient répondu les millions de manifestants hostiles à la réforme des retraites. Service minimum ou pas, lorsque les agents de la RATP ou de la SNCF jonglent avec les subtilités des textes tous neufs qui régissent les débrayages, les usagers continuent en effet d’enfiler leurs baskets et de grimper sur leurs vélos…

Heureusement pour eux, toutefois, il n’est pas devenu nécessaire d’être un nageur hors pair pour relier la Corse au Continent lorsque les navires de la SNCM restent à quai. En grève depuis le 31 janvier dernier, les marins de cet armement privatisé en 2006 découvrent en effet à quel point leurs moyens de pression se sont affaiblis ― y compris en période de grands départs.

C’est que la fin du monopole est passée par là, quatre compagnies se disputant désormais les faveurs du public. Du coup, c’est à peine si les Bastiais ou les Ajacciens en route pour les stations de ski froncent un sourcil en apprenant que le Napoléon Bonaparte ou le Monte d’Oro font un nouveau break. Ils se contentent de réserver un passage sur un navire des Corsica Ferries et le tour est joué.

La CGT, qui est à l’origine du conflit, s’inquiète essentiellement d’une baisse des rotations affectant toutes les compagnies dès l’été prochain, agrémentée d’une réduction de la flotte de 10 à 9 ferries. Il n’est pas question de licenciements, mais la réorganisation des escales entre Marseille et Toulon n’est pas du goût du syndicat.

On ne saurait trop conseiller à ses leaders, puisqu’ils semblent avoir un peu de temps devant eux, de regarder la télé : France 3 Marseille s’est en effet procuré quelques chiffres édifiants, permettant d’établir que l’offre globale sur la liaison était de 9 millions de places en 2010 pour à peine 3 millions de passagers. Une surcapacité aussi énorme qu’intenable à long terme, mais dont les journalistes de la station régionale révèlent qu’elle est surtout à l’avantage de la SNCM dont les taux de remplissage sont de loin les meilleurs.

Résultat des courses, les marins de la SNCM fragilisent financièrement une entreprise qui n’en demandait pas tant, rabattent les voyageurs sur la concurrence dont les navires sont bourrés à craquer depuis le début de la grève (des unités supplémentaires ont dû être mobilisées par Corsica Ferries) et ne génèrent qu’une indifférence polie sur l’Ile de Beauté, où un conflit qui aurait autrefois fait les gros titres est traité en brève de pages intérieures dans Corse-Matin.

On hésite à ressortir le cliché un peu usé du type qui scie  la branche sur laquelle il est assis (d’autant plus qu’on vient tout juste de s’en servir pour évoquer la grève des dockers marseillais et havrais et la fuite des affréteurs vers les ports hollandais). On hésite, mais on le trouve tellement adapté, finalement, qu’on ne va pas s’en priver pour si peu... Et puis, après tout, ça prouve au moins que quelqu’un l’aura remarquée, cette grève. C’est toujours ça de pris.

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