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Historique : le G20 sera-t-il à la hauteur des enjeux qui pèsent sur l'économie mondiale ?
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Prise de conscience ?

Les dirigeants européens ont préparé vendredi par téléconférence le G20 qui se tient lundi et mardi à Los Cabos au Mexique. Si le président mexicain souhaite que les difficultés et divergences européennes n'occupent pas l'essentiel des discussions, il pourrait en être autrement... L’effondrement économique européen pénaliserait en effet simultanément la reprise américaine et la croissance asiatique.

François  Leclerc

François Leclerc

François Leclerc est chroniqueur de "L'actualité de demain" sur le blog de Paul Jorion ainsi que dans La Tribune.

Il est également l'auteur de "Fukushima, la fatalité nucléaire", aux éditions "Osez la République sociale!".

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Les dirigeants européens ont préparé vendredi par téléconférence leur défense, avant de rejoindre Los Cabos, la station balnéaire du Mexique où va se tenir les 18 et 19 juin un nouveau G20 des chefs d’État et de gouvernement. Une « large convergence de vue » qui ne trompe personne en est inévitablement ressortie d’après les porte-paroles. Des « discussions constructives et fructueuses » entre Angela Merkel et François Hollande s’en suivirent également par téléphone le lendemain, sur fonds de polémique entre celle-ci et Mario Monti.

Felipe Calderon, président du Mexique et hôte de la réunion, a exprimé sa procuration, et insisté sur le fait que celle-ci ne soit pas accaparée par les divisions et indécisions des autorités européennes : « notre objectif est de ne pas circonscrire, de ne pas réduire l’ordre du jour du G20 au thème européen », a-t-il déclaré. Charles Dallara, le directeur général de l’omniprésent Institute of International Finance (IIF), dont toutes les grandes banques mondiales occidentales sont membres, a été plus loin en proposant implicitement un ordre du jour, comparant ce G20 à celui qui s’était tenu à Londres en 2009 - marqué par de retentissantes décisions planétaires - pour réclamer qu’il soit à la hauteur.

Ce serait en effet insuffisant de ne retenir en prélude de Los Cabos que les innombrables exhortations à se ressaisir dirigées vers les dirigeants européens, constatant que de la Chine à l’Inde, et du Japon aux États-Unis, un « message fort » leur a été adressé, les invitant à l’action devant le danger d’une poursuite et intensification de la crise européenne. Car derrière cette inquiétude se révèle une autre préoccupation, relative à la croissance. Elle était annoncée comme venant d’Asie et allant tirer celle du monde entier, et elle n’est pas au rendez-vous.De Chine, du Japon et d’Inde viennent de ce point de vue des nouvelles alarmantes, alors que l’Europe déjà entrée dans la récession fait défaut et menace de s’y enfoncer.

C’est le message que fait passer Charles Dallara dans une lettre à Felipe Calderon qui met en avant le danger d’une généralisation de la récession et préconise, sans l’expliciter davantage, une action concertée des banques centrales que le G20 pourrait décider.Il y prévient que « le risque d’une récession mondiale, la deuxième en quatre ans, est tout à fait réel », et considère que « les marchés attendent et cherchent des preuves d’une réponse politique pour raviver les perspectives de croissance à l’échelle mondiale de manière durable ».

Restés l’arme au pied, la Banque du Japon et la Fed ont dernièrement déçu les attentes des marchés, et il est donc espéré que ce n’est que partie remise. Cela n’a pas été le cas de la Banque d’Angleterre, qui vient de lancer un ambitieux programme de relance de l’économie de dizaines de milliards de livres. Les spéculations vont bon train sur la possibilité d’un troisième round d’injection massive de liquidités de la BCE. Un « Big bang » monétaire est donc attendu, afin de faire repartir une machine toujours aussi rétive.

Que pèsent, dans cette perspective, la sortie d’Angela Merkel sur le « faux-débat entre croissance et rigueur budgétaire », ou bien le plan pour la croissance de François Hollande de 120 milliards d’euros, soit moins de 1% du PIB européen, qui vient d’être dévoilé ? Que pèse la vision proposée par Christine Lagarde, au nom du FMI, selon laquelle « tous les pays de la zone euro doivent accepter une communauté budgétaire, bancaire et financière, où les décisions seront prises de manière collective », quand l’incendie se propage et alors qu’elle reconnait que « cela ne peut pas se faire du jour au lendemain » ?

Charles Dallara voit plus loin que le nouveau gros coup de tabac qui se présente en Europe, à la faveur de la conjugaison des crises grecque, espagnole, et craint-on prochainement italienne. Comme il en a été fait état lors du dernier Congrès de l’Institute of Internationale Finance (IIF), de nouvelles restructurations de la dette souveraine représenteraient une grande menace pour le système financier, alors que les banques peinent à se renforcer, réclament des assouplissements réglementaires, continuent de réduire la taille de leur bilan et réduisent leur périmètre d’activité, tout en subissant les effets de la récession économique.

Elles ont à nouveau besoin d’air, ou plutôt de liquidités et la fragilisation de la dette souveraine ne fait pas leur affaire. Car par quoi d’autre remplacer dans leurs bilans ces actifs anciennement à « risque zéro » et qui ne peuvent plus jouer le rôle de pilier sur lequel le système financier reposait, tout en restant d’un coût abordable et ne pénalisant pas davantage leur rendement, décourageant d’autant les investisseurs qu’elles cherchent au contraire à attirer pour se renforcer ?

Sous la présidence de Jean Lemierre, un « comité mixte pour renforcer la prévention et la résolution de la crise souveraine » a été constitué par l’IIF, destiné à regrouper ses représentants avec ceux des banques centrales, des ministères des finances et du Fonds de stabilité financière européen (FESF). Il a pour objet d’anticiper des restructurations sauvages de dettes publiques et de les ordonner, à l’image de ce qui a été déjà opéré pour la Grèce. Sans attendre, des clauses d’action collective (CAC) sont systématique mises en place lors des émissions obligataires, avec vocation de contraindre ultérieurement tous les créanciers à appliquer des accords de restructuration adoptés par une majorité qualifiée. Sans toutefois aller encore jusqu’à envisager d’adopter les conclusions d’une étude du FMI datant de 2002 - vite enfouie au fond d’un tiroir - qui voyait grand et prévoyait comment restructurer la dette souveraine à l’échelle mondiale sous le nom de « Sovereign Debt Restructuration Mecanism » (SDRM)

La crise du désendettement public et privé - et non pas de la dette publique - est générale à l’économie occidentale. Si elle a pris une forme aiguë en Europe, elle n’en est pas moins larvée au Japon et aux États-Unis, où elle est de bien plus grande dimension, et où l’impasse que représente sa réduction est toute aussi totale même si elle se présente autrement. Les élections présidentielles américaines passées, la lancinante question du déplafonnement du budget va réapparaître. Au Japon, le financement du déficit va prochainement réclamer d’affronter les exigences du marché obligataire mondial. Seule la croissance pourrait amoindrir la peine et faciliter le processus, seulement voilà...

La problématique tabou d’une restructuration de la dette souveraine va-telle pouvoir longtemps être écartée, sachant qu’elle ne concernera plus un seul pays périphérique, comme d’antan, mais devra être généralisé ? S’il est possible de contenir l’éclatement de la bulle de l’endettement, la résorber est décidément une toute autre affaire, imposant un jour ou l’autre de prendre le taureau par les cornes.

Dans l’immédiat, le FMI annonce en prélude au G20 qu’il est prêt à accueillir les 430 milliards de dollars de contributions promis par une vingtaine de ses États membres. De quoi, comme prévu, renforcer l’actuelle capacité du Fonds de 380 milliards de dollars, afin de secourir si nécessaire les États européens. Et de quoi encore gagner du temps, qui se révèle par défaut le capital le plus précieux. Le chemin est sinueux et la pente rude…

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