Tweetweilergate : la première dame est-elle consciente qu'elle a porté atteinte à la sacralité de la présidence ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Tweetweilergate : 
la première dame est-elle consciente 
qu'elle a porté atteinte 
à la sacralité de la présidence ?
©

En rupture

En 140 caractères postés sur Twitter, Valérie Trierweiler a rompu avec la tradition de prudence et de retenue des compagnes des chefs de l'Etat français, alors même que celles-ci n'ont pas de statut officiel.

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot est l'auteur de Trônes en majesté, l’Autorité et son symbole (Édition du Cerf), et commissaire de l'exposition Trésors du Saint-Sépulcre. Présents des cours royales européennes qui fut présentée au château de Versailles jusqu’au 14 juillet 2013.

 

Voir la bio »

Devenir roi à cinq ans, même pour Louis XV, ne relevait pas, pour les héritiers de la race des lys, de la meilleure aubaine pour suivre désormais, à leur guise, les sentiers fleuris de l’école buissonnière ou pour mener la légendaire oisive existence des rois fainéants.

L’apprentissage du "métier de roi", au contraire, occasionnait bien des peines et bien des efforts drastiques aux jeunes héritiers des Grands. Leur laborieux apprentissage était comparable en cela à celui de nos chefs d’Etat actuels, qu’ils soient élevés à la tête d’un royaume ou d’une république.

Ces derniers, le bac en poche avec une ou deux années d’avance, sortis majors des meilleures promotions des grandes écoles, ayant parfois connu, à vingt ans, l’épreuve du feu, inlassables compétiteurs dans l’obtention de circonscriptions électorales, jaloux détenteurs de portefeuilles ministériels toujours éphémères, infatigables champions, tout d’abord malheureux, des campagnes présidentielles, progressent difficilement vers le faîte du pouvoir. L’ascension est bien rude, pleine d’embûches, d’épreuves qu’il faut savoir vaincre en affichant toutes les marques du désintéressement et sous les traits de la plus sereine complaisance. Ce long chemin est si âpre que l’expérience acquise par le candidat parvenu à satisfaire ses desseins politiques pourrait apparaître désormais suffisante pour le prémunir de tout faux pas.

Le tweet envoyé par Madame Trierweiler à son ami Olivier Falorni démontre l’illusion d’une telle hypothèse ! Sous l’Ancien régime, les candidats à la royale magistrature auraient-ils été plus solidement corsetés grâce aux principes auxquels ils savaient devoir se soumettre pour rendre impossible pareille distorsion entre les vues du chef d’Etat qu’ils incarnaient et leur épouse légitime, voire d’une dame de volupté ? Cela semble bien improbable.

Emancipée comme elle a tenu à le proclamer sans ambages dès son avènement, Valérie Trierweiler a-t-elle cherché tout simplement à exprimer par un simple message un vœu purement personnel ? A-t-elle voulu exercer de secrètes représailles sur la personne de l’ancienne épouse de son actuel compagnon ? Dans le contexte de la campagne actuelle pour les élections législatives, une partie de billard à trois s’est-elle engagée à La Rochelle avec l’intervention masquée de François Hollande, comme se plaît à le suggérer Bernard Pivot dans l’une de ses dernières chroniques ?

Le garde-fou des vieux principes ayant été rejeté par les protagonistes de cette affaire, toutes les hypothèses, tous les fantasmes trouvent dès lors raison et matière à s’exprimer.

La présidence "normale" ayant suscité la vocation d’une "première dame normale", le couple présidentiel a brûlé ses vaisseaux. En se débarrassant ainsi de toutes les amarres qui leur auraient permis de rester à l’abri de divergences, de dissensions dont la divulgation est toujours si nuisible à l’alchimie qui doit entourer le théâtre du pouvoir pour mieux le préserver, François Hollande et sa compagne se retrouvent en pleine ligne de mire.

N’acceptant pas de se conformer à la couleur passe-muraille adoptée non sans efforts par toutes ses devancières, Valérie Trierweiler  ne méconnait pas seulement les usages que des siècles de prudente pratique imposaient à son rôle secondaire auprès du chef de l’Etat. Mais empiétant sur le domaine réservé à son compagnon, elle s’empare ainsi d’un rôle que les institutions lui refusent, mettant de surcroît en évidence la faiblesse des liens juridiques qui la relient avec François Hollande et qui, dans le cas contraire, auraient pu être l’amorce d’une justification.

Encore moins au sommet du pouvoir qu’ailleurs, les sentiments les plus nobles et les plus authentiques ne suffisent pas à justifier le rang occupé. Chaque titulaire d’une qualité doit savoir s’astreindre à beaucoup d’abnégation pour bien tenir son rôle, car c’est en disparaissant sous les exigences du poids de la charge qu’il sera le plus assuré de réussir en obtenant même la paradoxale capacité de pouvoir de temps en temps s’en abstraire.

Mais c’est là montrer un tempérament exceptionnel, très étranger aux manières normales des simples électeurs que nous sommes ! 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !