Il est urgent de débarrasser la ville du carcan de règles qui l'asphyxient

Le XXIème siècle est urbain : c'est la première fois dans l'histoire de l'humanité que la majorité de l'humanité vit dans des villes. L'ère d'Internet nous faisait croire que nous pourrions tous habiter à la campagne et travailler à distance, mais il s'avère que la technologie rend la ville encore plus attractive. Rien ne remplace l'interaction entre les gens. Les villes sont aussi le coeur de l'innovation, dans tous les sens du terme : c'est de ce creuset et des rencontres spontanées entre des millions de gens attirés ensembles que naissent les révolutions économiques, artistiques, culturelles, et même politiques, comme on l'a vu à Paris en 1789 et au Caire cette année.

Les villes sont aussi une des clés de la protection de l'environnement : le mode de vie citadin est le mode de vie le plus compatible avec la protection de l'environnement. Les citadins prennent moins la voiture, ont des habitations plus petites, et donc crées moins d'émissions en carbone. Les citadins sont aussi en meilleure santé, parce qu'ils marchent plus. En somme, une des questions les plus importantes du siècle est : pourrons-nous réussir cette urbanisation pour sauver le XXIème siècle ? Si les villes sont la clé de l'avenir, la politique et l'économie de la ville sont essentielles.

Les villes sont une bénédiction. On s'en rend compte lorsqu'on réalise que ce qui fait la ville, se sont ses habitants. Ce qui fait une ville n'est pas sa position géographique ou son architecture, ce sont les gens qui y vivent. Une ville avec de très beaux bâtiments meurt si ses habitants la quittent. Les grandes villes attirent plus de gens talentueux parce qu'elles en ont déjà beaucoup, en un cercle vertueux, qu'il faut encourager. Ce qui fait les villes, c'est la volonté de millions de gens de vivre et collaborer ensemble. Ainsi, plus une ville est dense, plus elle est riche — dans tous les sens du terme. Riche économiquement, mais riche humainement aussi, car cette densité permet d'avoir plus d'interactions entre les gens, qui créent plus de relations et plus d'idées.

Les questions de logement sont donc essentielles : si les gens ne peuvent pas se loger, c'est une tragédie non seulement humaine mais sociale et économique, car nous perdons l'avantage de cette densité de création humaine. Dans un contexte urbain où les gens veulent habiter les uns avec les autres, le meilleur moyen de leur permettre de se loger (et de leur donner la densité qu'ils demandent) est d'augmenter l'offre de logements pour permettre aux prix de baisser. La politique a ici un rôle clé à jouer, mais ces enjeux sont très mal compris. Elle a aussi un rôle à jouer pour empêcher la spéculation immobilière, qui dans presque tous les pays est subventionnée par les règles fiscales.

Dans ce sujet comme dans de nombreux autres, il faut libérer la ville afin que sa magie puisse faire effet. Libérer la ville c’est supprimer toutes les réglementations du logement qui englobent des normes de hauteur, de construction et de vétusté des bâtiments. Celles-ci entravent l'accès facile et pas cher à l'habitation et ce faisant empêchent les villes d'être denses. Sans cette densité, les habitants peinent à vivre et à collaborer ensemble et ne parviennent pas à créer de la valeur humaine et économique. 

Il est impossible de surestimer la bénédiction qu'est la ville. Et il est par conséquent impossible de surestimer les dégâts que font les politiques qui l'enchaînent.