Récession : l'Europe peut-elle encore échapper au pire ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les enquêtes de conjoncture se sont à nouveau dégradées, montrant que le début de la consolidation observée au cours des premiers mois de 2012 était loin d’être acquis.
Les enquêtes de conjoncture se sont à nouveau dégradées, montrant que le début de la consolidation observée au cours des premiers mois de 2012 était loin d’être acquis.
©Reuters

Zone rouge !

Les enquêtes de conjoncture laissaient entendre une récession mesurée en Europe pour l'année 2012, mais de nouvelles tensions sont apparues sur les taux d’intérêt des pays les plus fragiles, et notamment l'Espagne. Un certain nombre de facteurs pourraient toutefois permettre à la zone euro de ne pas s’enfoncer.

Alain Henriot

Alain Henriot

Alain Henriot est Directeur délégué du Centre d’observation économique et de Recherche pour l’Expansion de l’économie et le Développement des Entreprises. Ses principaux thèmes de recherche portent sur l’analyse conjoncturelle, plus particulièrement en économie internationale.

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Fin 2011 - début 2012, les enquêtes de conjoncture européennes, notamment celles réalisées auprès des directeurs d’achats avaient cessé de reculer. Elles montraient même une légère amélioration, suggérant que le tassement de l’activité observé au cours de la seconde partie de l’année 2011 ne s’était pas prolongé.

Cela validait l’idée que s’il y avait récession en zone euro, celle-ci resterait mesurée, en tout cas sans commune mesure avec la contraction de 2008-2009. Ce redressement des enquêtes de conjoncture coïncidait par ailleurs avec une accalmie des tensions sur les marchés financiers européens, grâce aux deux opérations massives de refinancement des banques européennes menée par la BCE.

Malheureusement, cette accalmie n’a pas duré. De nouvelles tensions sont réapparues sur les taux d’intérêt des pays les plus fragiles, avec une attention se concentrant sur l’Espagne. Dans ce contexte, les enquêtes de conjoncture se sont redégradées, montrant que le début de la consolidation observée au cours des premiers mois de 2012 était loin d’être acquis.

Comment expliquer ce retournement ? La crise européenne se joue en fait autour d’un triptyque articulant activité, finances publiques et systèmes bancaires, autour duquel des effets circulaires nourrissent la crise. Pour consolider leurs comptes publics, les pays européens se sont engagés dans des programmes de consolidation budgétaire. Ceux-ci sont nécessaires, mais à court terme ils pèsent sur l’activité. Dans le cas de l’Espagne, les banques, qui souffraient déjà de la crise immobilière, doivent maintenant faire face à une moindre de demande de crédit et à une augmentation des prêts non performants. D’une manière plus générale, les banques européennes se montrent d’une extrême prudence, en laissant dans les coffres de la BCE environ 80 % des montants reçus lors des dernières opérations de refinancement. En retour, elles durcissent leurs conditions de crédit, ce qui pèse sur l’activité. Sur ce plan, la dernière enquête de la BCE montrait une certaine amélioration en avril, mais dans le contexte actuel on peut craindre que des tensions sur la distribution de crédit réapparaissent. Finalement, la faiblesse de l’activité rend encore plus difficile l’ajustement des comptes publics.

Par ailleurs, le retournement des enquêtes de conjoncture annonce aussi une certaine contamination des pays en crise vers ceux plus solides, notamment à travers les flux de commerce extérieur et les crispations du système bancaire. C’est notamment le cas pour l’Allemagne.

Quelles sont dès lors les perspectives économiques pour la zone euro ? Avec toutes les incertitudes politiques et institutionnelles qui caractérisent la zone, il est clair que l’on flirte avec la zone rouge. Nul ne sait vraiment ce qu’il adviendra si la Grèce ne réussit pas à mettre en place après les élections un gouvernement pro-européen, respectant les engagements pris. Ce climat n’est pas propice à la restauration de la confiance, pourtant essentiel pour les acteurs économique. On peut néanmoins encore faire l’hypothèse que le pire n’est jamais certain ! D’une part, les mesures d’ajustement des comptes publics pourraient être un peu moins marquées l’an prochain, pesant moins sur l’activité.

Surtout, trois facteurs de soutien pourraient permettre à la zone euro de ne pas s’enfoncer :

  • Le recul des cours des matières premières, notamment du pétrole, devrait limiter les pressions inflationnistes et redonner du pouvoir d’achat ;
  • L’affaiblissement de l’euro constitue un autre soutien aux exportations ;
  • La croissance mondiale a plutôt bien résisté à la crise européenne, grâce aux États-Unis et à la Chine, portant les exportations européennes. 

    Ce dernier point reste toutefois encore à confirmer, puisque l’économie américaine montre de nouveau des signes de fragilité et que la Chine pourrait aussi ralentir.

Enfin, du côté de la politique monétaire, la BCE conserve quelques armes pour éviter le pire : baisse du taux de référence de 1 % à 0,5 %,  nouvelle injection de liquidités pour éviter toute asphyxie du secteur bancaire, achat de titres sur le marché secondaire de la dette public.

La zone euro reste dans une situation très difficile, entourée de nombreux risques. Elle n’échappera pas à la récession cette année. Mais il faut espérer que les quelques éléments mentionnés ci-dessus nous permette d’éviter le pire.

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