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Sommets de Matignon ou de Rio : 
ces réunions servent-elles 
encore à quelque chose ?
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EDITORIAL

"Sommet social" à Matignon, "sommet de la Terre" à Rio : Il serait temps de faire de ces rendez-vous des réunions efficaces et pas uniquement symboliques.

Alain Renaudin

Alain Renaudin

Alain Renaudin dirige le cabinet "NewCorp Conseil" qu'il a créé, sur la base d'une double expérience en tant que dirigeant d’institut de sondage, l’Ifop, et d’agence de communication au sein de DDB Groupe.

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Il y aura deux sommets en juin. Le sommet social qui s‘ouvre ce mardi par une série de discussions avec les représentations syndicales et dont vous entendez parler abondamment, et un autre, dont on parle peu, et pourtant essentiel, le sommet de Rio. Cela n’évoquera sans doute pas grand chose, peut-être un peu davantage si on parle du « sommet de la Terre » de Rio, et peut-être encore un peu mieux si on rappelle qu’il s’agit du cinquième sommet de la Terre, après ceux de Stockholm en 1972, Nairobi en 1982, Rio en 1992 et Johannesburg en 2002. Notre rendez-vous tous les 10 ans.

Alors pourquoi parler de ces deux sommets, qui n’en seront peut-être pas d’ailleurs ? Et bien tout simplement parce qu’ils doivent, ils devraient, tous les deux parler d’avenir, de vision, de stratégie, de long terme, de consensus, mais pas le consensus mou à l’eau tiède, le consensus fort, celui qui crée une dynamique collective, une mise en convergence des actions. Surtout, ces deux sommets devraient parler de développement et d’emplois vertueux. La réunion sociale qui démarre aujourd’hui parlera-t-elle des secteurs porteurs de demain ? Des filières d’avenir ? De stratégie industrielle ? des ressources et des opportunités dans les services ? De compétitivité (un mot en train de devenir tabou ?) ? De création d’entreprises ? De développement du tissu économique des TPE/PME ? D’innovations et de recherche ? Plus vraisemblablement il s’agira surtout de hausse du Smic (pour rappel, les plus fortes augmentations, supérieures à 5%, eurent lieu de 2003 à 2005 par les gouvernements Raffarin et Villepin), de retraite à 60 ans, de réduction des avantages fiscaux liés aux heures supplémentaires, et d’encadrement (contrôle ?) des plans sociaux.

Faut-il le rappeler, les représentations syndicales des salariés sont plus syndicales que représentatives, avec 7 à 8% de salariés syndiqués (les chiffres sont quasiment impossibles à établir de façon précise), en érosion constante (moitié moins qu’en 1980), et majoritairement constituées de fonctionnaires. La France, historiquement, a le taux de syndicalisation le plus faible de l’OCDE, et surtout une difficulté immense à instaurer un dialogue constructif entre représentations syndicales des salariés et du patronat (il y a même souvent discorde au sein de chacune de ces familles). Il en résulte que depuis des décennies le dialogue social est surtout un dialogue de sourds.

Le calendrier n’est par ailleurs pas très bien choisi. Entre deux tours électoraux, le second visant pour le gouvernement actuel à lui donner une majorité parlementaire, il y a peu de chances que ce sommet social fasse des vagues, mais de l’écume certainement.

Nous sommes plus propices à la confrontation qu’au dialogue, sans doute pour des raisons culturelles (valorisation de l’esprit révolutionnaire, culture égalitaire, lutte des classes, etc.) mais aussi en raison d’un orgueil mal placé qui consiste à considérer comme un aveu de faiblesse le fait d’être d’accord, et à valoriser la confrontation.

Et pourtant… ce dialogue constructif est nécessaire, et nos difficultés historiques ne doivent pas nous rendre fatalistes. En cette période de remise en cause de notre modèle économique (nous ne créons plus de croissance), social (sentiment d’injustice, chômage persistant, et Etat providence en berne), financier (dette structurelle et faillite comptable), et écologique (croissance non durable), nous sommes en train de traverser une période de mutation qui impose ordre de marche et vision commune et partagée. D’une certaine manière l’enjeu impose le dépassement de soi, et surtout des égos.

En 1972, au premier sommet de la Terre à Stockholm et dans le cadre du Club de Rome, nous nous interrogions sur la croissance, sur la pérennité de la croissance, sur les vertus d’une forme de maîtrise de la croissance (rappel : dans les années 1970, la croissance de la France était de 5,9%). En 2012 à Rio (du 20 au 22 juin), « l’économie verte » sera un thème central. Autrement dit, le double enjeu est bien à la fois social et environnemental, celui des rencontres de Matignon et de Rio à la fois, d’une croissance retrouvée et d’une croissance soutenable. De Rio, on parlera sans doute peu, et pourtant, en fixant l’horizon, en travaillant sur les mutations, en cherchant à transformer les contraintes en opportunités, en dépassant les clivages politiques et géopolitiques, en raisonnant à l’échelle de la planète, en parlant de filières d’avenir, Rio est une source de réponses pour des sommets sociaux d’avenir, constructifs et ambitieux.

Chercher à préserver les acquis du passé, oui, pourquoi par, il faut construire une géologie sociale où les strates s’accumulent, mais la seule condition pour rendre ceci viable est de le faire en construisant l’avenir.

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