Baisse de 30% des salaires du gouvernement : et s'il fallait surtout envisager une rémunération aux résultats ?<!-- --> | Atlantico.fr
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A l'occasion du conseil des ministres ce jeudi 17 mai, le gouvernement a entériné sa première décision : le Président de la République et ses ministres connaîtront une réduction de salaire de 30%.
A l'occasion du conseil des ministres ce jeudi 17 mai, le gouvernement a entériné sa première décision : le Président de la République et ses ministres connaîtront une réduction de salaire de 30%.
©Reuters

Méritocratie

A l'occasion du conseil des ministres ce jeudi 17 mai, le gouvernement a entériné sa première décision : le Président de la République et ses ministres connaîtront une réduction de salaire de 30%. Mais ne serait-il pas plus juste de rémunérer les ministres selon leurs resultats face aux problèmes de dette, croissance et chômage ?

Aurélien Véron

Aurélien Véron

Aurélien Véron est président du Parti Libéral Démocrate et auteur du livre Le grand contournement. Il plaide pour passer de l'Etat providence, qu'il juge ruineux et infantilisant, à une société de confiance bâtie sur l'autonomie des citoyens et la liberté. Un projet qui pourrait se concrétiser par un Etat moins dispendieux et recentré sur ses missions régaliennes ; une "flat tax", et l'ouverture des assurances sociales à la concurrence ; le recours systématique aux référendums ; une autonomie totale des écoles ; l'instauration d'un marché encadré du cannabis.

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Atlantico : Le nouveau gouvernement de Jean-Marc Ayrault, pour son premier conseil des ministres ce jeudi 17 mai, a entériné sa première décision : la réduction de 30 % du salaire du Président de la République (et de ses ministres). Quel œil portez-vous sur cette nouvelle mesure ?

Aurélien Véron : Il est vrai que les sommes concernées peuvent paraitre dérisoires quand on les compare au montant des dettes publiques. Cela reste donc tout à fait symbolique. Mais la politique est faite de symboles et je trouve que celui-ci est un symbole d’austérité qui n’est pas négatif.

Si cela a du sens, l’intérêt est tout de même très limité. La symbolique ne suffit pas et j’aurais aimé que l’on passe à l’action. J’aurais voulu que l’on pousse les ministres à être performants et donc les rémunérer selon leurs résultats. Les enjeux pourraient être les suivants : réduction de la dette, compétitivité et réduction du chômage. Cela donnerait des rémunérations flottantes avec des primes fondées sur le résultat. Si la dette est réduite et la croissance repart, les ministres sont mieux rémunérés. Je trouve cette proposition beaucoup plus imaginative. Elle n’est pas seulement dans l’austérité comptable (je coupe !) mais dans l’austérité intelligente (je réforme !).

Peut-on appliquer cette proposition à tout le gouvernement ? Ne serait-il pas absurde de baisser le salaire du ministre des Sports, par exemple, pour un manque de résultats en termes de réduction de dettes ou de croissance ?

Même si chacun gère son pôle, ses missions, ses compétences, je trouverais cela logique d’associer tous les ministres aux résultats communs du gouvernement. Un gouvernement, c’est un travail collectif, d’équipe. Tous les ministres se doivent d’être solidaires des résultats du gouvernement dans son ensemble.

Pour que la mesure soit efficace, certains proposent de l’étendre à tous les hauts fonctionnaires. Qu’en pensez-vous ?

Les entreprises se sont réformées par la force des choses. Le seul secteur qui ne s’est pas réformé depuis trente ans est l’Etat. Je n’attends pas de lui qu’il se serre la ceinture bêtement mais qu’il révise son activité. Il y a des actions de l’Etat aujourd’hui qui n’ont aucun sens au 21ème siècle. On paye toujours des fonctionnaires pour des missions qui n’ont aucun intérêt pour le pays.

Une équipe, ce n’est pas seulement la rémunération mais aussi l’organisation et le management. Aujourd’hui, la fonction publique n’est plus adaptée aux enjeux modernes. Elle est séparée en centaines (voire même milliers) de corps, avec des grilles de rémunérations totalement rigides et des points catégoriels qui n’ont plus de sens. Réduire les salaires des hauts fonctionnaires de 30% est, encore une fois, une mesure comptable. Je préfère que l’on vise l’organisation en l’ouvrant et en la modernisant. Cela veut notamment dire la suppression du statut de fonctionnaire. On pourrait également introduire des rémunérations flexibles et variables avec des primes qui incitent à la performance.

Couper des salaires, sans possibilité d’amélioration, revient à démotiver les gens. Même si cela serait aussi un symbole fort, en général, cela n’aboutit pas à des performances remarquables…

Un article publié sur le site Challenges.fr révèle que « plus d'une centaine de fonctionnaires seront désormais mieux payés que le chef de l'Etat ». Trouvez-vous cela logique ?

Cela ne me choque pas qu’un haut fonctionnaire, dont la mission est fondamentale, soit mieux payé que le président de la République. Si un ambassadeur, dans un pays extrêmement sensible, avec des enjeux essentiels pour la France, réalise un travail vital pour notre sécurité ou notre économie, il n’est pas absurde qu’il soit mieux rémunéré que le chef de l’Etat.

D’ailleurs, dans beaucoup d’entreprises, le patron est parfois moins bien payé que certains salariés les plus performants de son entreprise.

Cette mesure ne joue-t-elle pas aussi le jeu de ceux qui assimilent les politiques à des « profiteurs » qui ne pensent qu’à leurs intérêts personnels ?

Les politiques sont quand même un peu des « profiteurs ». Ce n’est pas étonnant si en France on a autant de députés alors que dans les autres pays européens, par rapport au nombre de citoyens, il y en a moins. Ce n’est également pas un hasard si on peut cumuler les mandats ou s’il existe une opacité totale dans les moyens attribués aux élus.

Notre classe politique est très opaque et vit très grassement. Qui peut nier que les hommes politiques sont devenus aujourd’hui, en grande partie, des « profiteurs » ?

Propos recueillis par Jean-Benoît Raynaud

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