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Crucial : derrière le choix des ministres, celui de leurs directeurs de cabinet
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A chaque Batman son Robin

Maintenant que nous connaissons nos ministres, reste à savoir avec qui ils travailleront. Leurs principaux collaborateurs restent leurs directeurs de cabinets, véritables bras droits. Est-il possible de se faire respecter des fonctionnaires de Bercy sans être inspecteur des finances ou de ceux de la chancellerie sans être magistrat ?

Didier Maus

Didier Maus

Didier Maus est Président émérite de l’association française de droit constitutionnel et ancien maire de Samois-sur-Seine (2014-2020).

 

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Atlantico : Lors de la nomination d'un gouvernement, le choix des ministres est longuement débattu et médiatisé. Pourtant, les directeurs de cabinets ne sont-ils pas d'autant plus cruciaux que dans certains ministères, je pense aux Finances ou à la Justice par exemple, il faut des personnalités connaissant parfaitement l'institution et ses rouages pour mener les équipes. Quels sont les enjeux liés au choix de ces directeurs de cabinets ?

Didier Maus : Il est évident que la nomination des ministres est plus importante que celle de leurs collaborateurs. Les membres du gouvernement sont des personnalités politiques, qu'ils soient élus ou non, et ont à répondre devant le Parlement et l'opinion publique de leur politique. Pour autant le choix d'un directeur de cabinet n'est pas un pur exercice de style. Il est le plus proche collaborateur du ministre et a souvent un bureau avec une porte communicant directement avec le bureau de celui-ci. Il doit, à mon avis, posséder deux qualités essentielles : d'abord une très bonne relation, de travail, voire amicale, avec le ministre et par conséquent une vraie proximité politique, même si la carte du parti politique n'est pas nécessaire, heureusement; ensuite une réelle compétence pour diriger les autres membres du cabinet mais surtout faire marcher les structures administratives dont le ministre a la responsabilité et assurer les liaisons avec les autres ministres, ce qu'il est convenu d'appeler l'interministérialiété. Il ne devrait jamais être possible de glisser une feuille de papier à cigarettes entre le ministre et son directeur de cabinet.

Quels sont les ministères où le choix du directeur de cabinet est particulièrement complexe ? Des ministères comme les Affaires étrangères, comme Bercy ou comme la Justice n'ont-ils pas besoin d'être plus spécifiquement dirigés par des hommes ou des femmes de poignes respectés de leurs pairs ? Le quai d'Orsay ne respecte t'il que le diplomates, Bercy que les inspecteurs des finances et la chancellerie que les magistrats ?

Oui. Mais l'expérience montre qu'il n'est pas toujours indispensable d'être un spécialiste d'un secteur pour être un bon directeur de cabinet. Il faut, par contre, avoir une capacité de travail hors du commun (jour, souvent soirée et week end), une aptitude à comprendre rapidement des dossiers complexes, à distinguer l'essentiel du moins important et être capable de veiller au respect des décisions gouvernementales et, encore plus, de les faire appliquer par les administrations concernées. Si, de plus, le directeur de cabinet bénéficie d'une autorité personnelle reconnue, cela constitue un avantage supplémentaire. 

Comment se construit la relation entre le ministre et le directeur de cabinet ? Doivent-ils se connaître au préalable ?

On trouve tous les cas de figure possibles, en fonction des parcours antérieurs du ministre et du directeur de cabinet. Il est évidemment préférable qu'ils aient déjà eu l'occasion de travailler ensemble, par exemple Lionel Jospin et Olivier Schrameck ou François Fillon et Jean-Paul Faugère. Il arrive souvent que le directeur de cabinet "suive" son ministre lorsque celui-ci change de ministère. La complicité est indispensable, mais en même temps il ne faut pas confondre les rôles et le directeur de cabinet doit être en mesure, dans un rapport à deux, d'être d'une grande franchise à l'égard de son ministre.

Sur quels critères sont choisit ces directeurs de cabinet ? Leur orientation et leurs fréquentations politiques peuvent-elles jouer ?

Pour les "grands" ministères, le choix est toujours approuvé par le cabinet du Premier ministre et, souvent, par celui du Président de la République. Le directeur de cabinet peut être amené à remplacer le ministre dans une réunion gouvernementale, sauf au Conseil des ministres. Il est évident qu'une compatibilité politique est indispensable. Elle peut être connue ou plus discrète. En tout cas, une loyauté absolue à l'égard de la politique du Gouvernement est indispensable. 

A-t-on des exemples, au sein de la Vème République, de relations ministre / directeur de cabinet particulièrement illustratives de cette relation et de ses enjeux ? Aussi bien dans le bon sens que dans le mauvais.

Il est très difficile de sonder les reins et les coeurs. On sait que dans une période déjà lointaine Raymond Barre, Premier ministre, avait une relation très confiante, avec ses deux directeur de cabinet successifs, Daniel Doustin et Philippe Mestre. Chacun sait également que le tandem Michel Rocard / Jean-Paul Huchon constituait une véritable équipe soudée et liée par la confiance et l'amitié. Seuls les échotiers sont en mesure de fournir des exemples de sens contraire.

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