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L'administration française, si souvent indifférente à la protection des citoyens
©Reuters

Société

L'administration française est très soucieuse de procédure, de contrôle, de pouvoir, mais s'occupe beaucoup moins de protéger les citoyens. Voici quelques superbes exemples de lutte obstinée du service public contre l'endiguement de l'épidémie de coronavirus.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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L’administration française, engagée dans la lutte contre le coronavirus, vient de donner plusieurs exemples de sa capacité… à faire le contraire, à force d’être obsédée par les règles, les procédures et la détention de son petit pouvoir. J’en ai listé quelques-uns…

L’administration française supprime la téléconsultation en Alsace…

L’affaire est passée un peu inaperçue, mais elle est pourtant savoureuse. Le 20 février 2020, la presse locale annonçait la fermeture d’un centre de télémédecine dans le village d’Oberbruck, à 20 kilomètres de Mulhouse. Le Haut-Rhin était pourtant déjà l’épicentre de la contamination en France… 

Les raisons données à cette fermeture étaient très simples :

« À l’issue de ces deux ans, on a fait le bilan avec l’ARS, qui a confirmé que l’expérimentation avait permis de recueillir une base de données importante. C’était un super-projet pour remédier à la désertification médicale. En revanche, le modèle économique n’était pas viable. Il fonctionnait avec des charges fixes trop lourdes par rapport au nombre de consultations. C’était trop coûteux, avec plus de 160 000 € de déficit enregistré. On a perdu beaucoup d’argent, ça nous a affaiblis », confie Fabienne Specht, directrice de l’Asame.

L’ARS, c’est-à-dire les services régionaux du ministère de la santé, a donc décidé de ne plus financer ce centre de téléconsultation installé à la campagne, parce qu’il coûtait trop cher… Cette fermeture est intervenue alors même que l’épidémie éclatait sur place. Et quelques jours avant que le Président Macron n’affirme que « quoi qu’il en coûte », il lutterait contre le coronavirus, et quelques jours avant que le ministre de la Santé ne fasse le promotion de la téléconsultation pour lutter contre l’engorgement des hôpitaux.

Bravo, l’administration française !

L’absurde guéguerre contre les cliniques privées

Avant même le confinement, la surcharge des hôpitaux publics est devenue une préoccupation majeure. Mais cette obsession n’a pas empêché l’administration de la santé de ne s’appuyer que sur les hôpitaux publics pour faire face à la vague qui arrivait, et de tenir à l’écart les méchantes cliniques privées. 

À de nombreuses reprises, le président de la Fédération de l’Hospitalisation Privée, Lamine Gharbi, a pourtant proposé ses services. Mais un concert d’esprits bien-pensants (dont le président de l’hospitalisation publique) a expliqué que c’était un peu compliqué…

La FHP a pourtant proposé 4.000 lits de réanimation. Mais les services de l’État font la sourde oreille, en ne livrant pas de masques de protection aux cliniques…

Ce qui s’est passé dans la région Grand Est est dramatique. Sur place, les hôpitaux sont saturés et transfèrent des patients vers des territoires lointains alors que nous avons des réanimations à Strasbourg, Reims, Metz et Nancy. Le problème c’est qu’elles ne pouvaient pas fonctionner jusqu’à mercredi dernier car nous n’avions ni masques, ni tuniques pour les personnels. On marche sur la tête !

L’administration française en guerre contre les masques FFP2

Alors que la France s’est réveillée, début mars 2020, en pleine pénurie de masques FFP2, notamment dans les hôpitaux publics, l’administration ne s’est guère précipitée pour pallier au plus pressé.

Un chef d’entreprise, François B., a par exemple acheté des dizaines de milliers de masques à Shangai pour protéger ses salariés. Comme il est à la tête d’une petite entreprise, il a cherché des services de l’État pour écouler son surplus.

La réponse qu’il a reçue est déconcertante : l’homologation des masques était américaine et ne portait pas le certificat « CE ». Donc, les masques ne pouvaient être fournis aux soignants parisiens. 

Voilà ce qui s’appelle avoir le sens des priorités : mieux vaut mourir sans masque que vivre avec des masques pour les soignants américains…

Surtout, ne testons pas avec des tests privés

Dans son obsession d’appliquer des procédures rigides et de garder le contrôle des opérations en écartant toute initiative privée, l’administration française a franchi un cap en refusant de confier à une clinique vétérinaire d’Indre-et-Loire la réalisation de 1.000 tests par jour. 

"pour l’instant, le ministère refuse pour « un argument juridique » explique les présidents des 4 départements. Le cadre réglementaire est différent « entre médecine humaine et médecine animale, un argument qui n’apparait pas recevable aux départements en période de guerre " 

Vous le voyez bien, là, le chef du bureau du ministère de la Santé, bien à l’abri de la contamination, expliquer aux malades sur le terrain que la réglementation ne permet pas d’agir, et que lui, au moins, il se préoccupe de l’intérêt général ?

Bureaucratie et stratégie de contrôle…

Les adeptes du service public comme meilleure protection contre les heurs et malheurs doivent bien se rendre à l’évidence aujourd’hui. L’administration française place son pouvoir et ses procédures très au-dessus de la protection des citoyens. 

Il faut d’urgence remettre à plat son fonctionnement.

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